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Théodore de BANVILLE
IDYLLES PRUSSIENNES
1871
Châteaudun
Châteaudun ! qui vois des bourreaux 8
Où furent des cœurs de lion, 8
Tu nous parais, nid de héros, 8
Plus sublime qu'un Ilion. 8
5 Comme on fauche des épis mûrs, 8
Les boulets rougis et fumants 8
Ont dans les débris de tes murs 8
Dispersé tes abris charmants ; 8
Mais tes fils, les chasseurs de loups, 8
10 Sont tombés purs et sans remords. 8
Ils étaient mille, et sous leurs coups 8
Dix-huit cents Prussiens sont morts. 8
Illustre cité (les Romains 8
Te nommaient ainsi) pour tes fils 8
15 Tu renaîtras ! par tes chemins 8
On entendra, comme jadis, 8
Dans tes arbres en floraison 8
L'alouette éveiller l'écho. 8
La devise de ton blason 8
20 Dit : Extincta revivisco ! 8
Mais, froid cadavre au pied des tours 8
Parmi les décombres mouvants 8
Fouillé par le bec des vautours, 8
Et cendre abandonnée aux vents, 8
25 Tu resplendis ! patrie en deuil, 8
Qui, devant le destin moqueur 8
Moins obstiné que ton orgueil, 8
Portas la France dans ton cœur ! 8
Car tes défenseurs belliqueux, 8
30 Frémissant d'indignation, 8
Laissaient à de plus lâches qu'eux 8
L'ignoble résignation ; 8
Voulant tous, d'un esprit têtu, 8
Que ton beau renom pût fleurir, 8
35 Ils eurent la mâle vertu 8
De tuer avant de mourir, 8
Et rien ne vaut le fier sommeil 8
De ces soldats couchés en rang 8
Sur la terre nue, au soleil, 8
40 Qui dorment, couchés dans leur sang. 8
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