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Théodore de BANVILLE
IDYLLES PRUSSIENNES
1871
Cauchemar
Oui, venez tous ! Goths et Vandales 8
Graissés de suif, sortez encor 8
De vos tanières féodales, 8
Avec vos casques tachés d'or ! 8
5 Attilas de la parodie, 8
Ravageurs blonds, meute aux abois, 8
Qui n'avez pas l'âme hardie 8
Et qui vous cachez dans les bois ! 8
Soldats que le vieillard gourmande, 8
10 Immobile, et sur son coursier 8
Rêvant son Europe allemande, 8
Traînez vos lourds canons d'acier ! 8
Ainsi que des sauvages ivres, 8
Brûlez le passé radieux 8
15 Et les monuments et les livres ! 8
Brisez les images des Dieux ! 8
O superbes marionnettes 8
Au courroux froid et compassé, 8
Au fond, convenez-en, vous n'êtes 8
20 Que les fantômes du passé ! 8
Et vous pouvez sur votre housse 8
Copier en riches lampas 8
L'ancien blason de Barberousse : 8
Mais enfin, vous n'existez pas. 8
25 Trombe que l'ouragan soulève, 8
Vous êtes, ô peuple géant, 8
Un rêve effrayant, mais un rêve, 8
Qui s'enfuira dans le néant. 8
Quand la France, enfin délivrée 8
30 De cet horrible cauchemar, 8
Cherchera la foule enivrée 8
Des Vandales, et leur César, 8
Demandant à la plaine verte, 8
Au mont, pleins d'abris murmurants, 8
35 A l'ombre de la nuit déserte : 8
Où sont donc ces spectres errants ? 8
Qu'est devenu leur troupeau blême ? 8
Alors le mont aérien, 8
Les plaines et l'ombre elle-même 8
40 Diront : Nous n'en savons plus rien ! 8
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