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Théodore de BANVILLE
IDYLLES PRUSSIENNES
1871
La Soirée
Lorsqu'en revenant du rempart 8
Où, plein d'une foi chaleureuse, 8
Il a bien veillé pour sa part, 8
Le père quitte sa vareuse, 8
5 En voilà jusqu'au lendemain ! 8
Il t'oublie, aigre vent qui souffles 8
Sur les talus, et, d'une main 8
Réjouie, il met ses pantoufles. 8
Après avoir dîné sans bruit, 8
10 Il regardera quelque estampe 8
Ou bien lira jusqu'à minuit 8
Aux douces clartés de la lampe, 8
Avec sa femme et ses enfants, 8
Amusant l'un d'eux sur sa jambe 8
15 Et voyant leurs fronts triomphants 8
Luire aux clartés du feu qui flambe. 8
Il caresse complaisamment 8
Cette jeune et chère couvée 8
Et suit avec un œil d'amant 8
20 Sa compagne enfin retrouvée, 8
Qui, charmante en sa floraison, 8
Sous le clair regard qui l'admire 8
Se promène dans la maison 8
Qu'elle éclaire de son sourire. 8
25 Alors le père tout heureux 8
Ne regrette ni les théâtres, 8
Où des cailloux aventureux 8
Ornaient de fausses Cléopâtres, 8
Ni les cafés, plus laids encor, 8
30 Où des Phrynés aux blancheurs mates 8
Flamboyaient sous leurs cheveux d'or, 8
Comme des bêtes écarlates. 8
Plus de cercles, où par monceau 8
L'or tombait, et ruisselait comme 8
35 L'eau méprisable du ruisseau ! 8
La femme a retrouvé son homme, 8
Et chacun reste avec les siens, 8
Riant à l'enfant qui babille, 8
Grâce à messieurs les Prussiens, 8
40 Qui nous ont rendu la famille ! 8
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