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ARV_1/ARV11
Félix ARVERS
POÉSIES
1833
MES HEURES PERDUES
A ***
Pourtant, si tu m'aimais ! si cette raillerie 12
Avait jeté racine et germé sourdement ; 12
Si, moi qui me jouais, si tu m'avais, Marie, 12
De la bouche et du cœur appelé ton amant ! 12
5 Si je t'avais trompée, et si j'avais su rendre 12
Si puissant et si doux mon sourire moqueur. 12
Que ton âme crédule ait pu se laisser prendre 12
Aux semblans d'un amour qui n'est point dans mon cœur, 12
Malheur à tous les deux ! Tôt ou tard l'imposture 12
10 Rapportera ses fruits d'angoisse et de douleur ; 12
Et toi, qui n'a rien fait, toi, pauvre créature, 12
Tu prendras comme moi ta moitié du malheur. 12
Et si j'avais dit vrai ; cependant, quand j'y songe… 12
O femme ! vois un peu ce que c'est que de nous ! 12
15 Pour peu que cette voix, qui riait du mensonge. 12
Eût de torrens d'amour inondé tes genoux ! 12
Comme un berceau d'enfant à la branche fleurie, 12
Si j'avais suspendu mon bonheur à tes pas, 12
Malheur, encor malheur ! car cette fois, Marie, 12
20 Hélas ! ce serait toi qui ne m'aimerais pas ! 12
Était-ce donc ta loi, pitoyable nature. 12
De reculer toujours le but que j'entrevois, 12
Et de ne mettre au cœur de chaque créature 12
Qu'un désir sans espoir, et qu'un écho sans voix 12
25 O malédiction ! était-ce ton envie 12
De n'accomplir jamais qu'une part du souhait, 12
Et le seul avenir est-il pour cette vie, 12
De haïr qui nous aime, ou d'aimer qui nous hait 12
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