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Louise-Victorine ACKERMANN
PREMIÈRES POÉSIES
1862
XVII
Endymion
À Daniel Stern
Endymion s'endort sur le mont solitaire, 12
Lui que Phœbé la nuit visite avec mystère, 12
Qu'elle adore en secret, un enfant, un pasteur. 12
Il est timide et fier, il est discret comme elle ; 12
5 Un charme grave au choix d'une amante immortelle 12
A désigné son front rêveur. 8
C'est lui qu'elle cherchait sur la vaste bruyère 12
Quand, sortant du nuage où tremblait sa lumière, 12
Elle jetait au loin un regard calme et pur, 12
10 Quand elle abandonnait jusqu'à son dernier voile, 12
Tandis qu'à ses côtés une pensive étoile 12
Scintillait dans l'éther obscur. 8
Ô Phœbé ! le vallon, les bois et la colline 12
Dorment enveloppés dans ta pâleur divine ; 12
15 À peine au pied des monts flotte un léger brouillard. 12
Si l'air a des soupirs, ils ne sont point sensibles ; 12
Le lac dans le lointain berce ses eaux paisibles 12
Qui s'argentent sous ton regard. 8
Non, ton amour n'a pas cette ardeur qui consume. 12
20 Si quelquefois, le soir, quand ton flambeau s'allume, 12
Ton amant te contemple avant de s'endormir, 12
Nul éclat qui l'aveugle, aucun feu qui l'embrase ; 12
Rien ne trouble sa paix ni son heureuse extase ; 12
Tu l'éclaires sans l'éblouir. 8
25 Tu n'as pour le baiser que ton rayon timide, 12
Qui vers lui mollement glisse dans l'air humide, 12
Et sur sa lèvre pâle expire sans témoin. 12
Jamais le beau pasteur, objet de ta tendresse, 12
Ne te rendra, Phœbé, ta furtive caresse, 12
30 Qu'il reçoit, mais qu'il ne sent point. 8
Il va dormir ainsi sous la voûte étoilée 12
Jusqu'à l'heure où la nuit, frissonnante et voilée, 12
Disparaîtra des cieux t'entraînant sur ses pas. 12
Peut-être en s'éveillant te verra-t-il encore 12
35 Qui, t'effaçant devant les rougeurs de l'aurore, 12
Dans ta fuite lui souriras. 8
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