Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
RIM_2/RIM32
Arthur RIMBAUD
POÉSIES II
1870-1872
L'Homme juste
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Le Juste restait droit | sur ses hanches solides : 6+6 a
Un rayon lui dorait | l'épaule ; des sueurs 6+6 b
Me prirent : « Tu veux voir | rutiler les bolides ? 6+6 a
Et, debout, écouter | bourdonner les flueurs 6+6 b
5 D'astres lactés, et les | essaims d'astéroïdes ? 6−6 a
« Par des farces de nuit | ton front est épié, 6+6 a
Ô Juste ! Il faut gagner | un toit. Dis ta prière, 6+6 b
La bouche dans ton drap | doucement expié ; 6+6 a
Et si quelque égaré | choque ton ostiaire, 6+6 b
10 Dis : Frère, va plus loin, | je suis estropié ! » 6+6 a
Et le Juste restait | debout, dans l'épouvante 6+6 a
Bleuâtre des gazons | après le soleil mort : 6+6 b
« Alors, mettrais-tu tes | genouillères en vente, 6−6 a
Ô vieillard ? Pèlerin | sacré ! Barde d'Armor ! 6+6 b
15 Pleureur des Oliviers ! | Main que la pitié gante ! 6+6 a
« Barbe de la famille | et poing de la cité, 6+6 a
Croyant très doux : ô cœur | tombé dans les calices, 6+6 b
Majestés et vertus, | amour et cécité, 6+6 a
Juste ! plus bête et plus | dégoûtant que les lices ! 6+6 b
20 Je suis celui qui souffre | et qui s'est révolté ! 6+6 a
« Et ça me fait pleurer | sur mon ventre, ô stupide, 6+6 a
Et bien rire, l'espoir | fameux de ton pardon ! 6+6 b
Je suis maudit, tu sais ! | Je suis soûl, fou, livide, 6+6 a
Ce que tu veux ! Mais va | te coucher, voyons donc, 6+6 b
25 Juste ! Je ne veux rien | à ton cerveau torpide. 6+6 a
« C'est toi le Juste, enfin, | le Juste ! C'est assez ! 6+6 a
C'est vrai que ta tendresse | et ta raison sereines 6+6 b
Reniflent dans la nuit | comme des cétacés ! 6+6 a
Que tu te fais proscrire | et dégoises des thrènes 6+6 b
30 Sur d'effroyables becs | de canne fracassés ! 6+6 a
« Et c'est toi l'œil de Dieu ! | le lâche ! quand les plantes 6+6 a
Froides des pieds divins | passeraient sur mon cou, 6+6 b
Tu es lâche ! Ô ton front | qui fourmille de lentes ! 6+6 a
Socrates et Jésus, | Saints et Justes, dégoût ! 6+6 b
35 Respectez le Maudit | suprême aux nuits sanglantes ! » 6+6 a
J'avais crié cela | sur la terre, et la nuit 6+6 a
Calme et blanche occupait | les Cieux pendant ma fièvre. 6+6 b
Je relevai mon front : | le fantôme avait fui, 6+6 a
Emportant l'ironie | atroce de ma lèvre… 6+6 b
40 — Vents nocturnes, venez | au Maudit ! Parlez-lui ! 6+6 a
Cependant que, | silencieux | sous les pilastres 4+4+4 a
D'azur, allongeant les | comètes et les nœuds 6−6 b
D'univers, remuement | énorme sans désastres, 6+6 a
L'ordre, éternel veilleur, | rame aux cieux lumineux 6+6 b
45 Et de sa drague en feu | laisse filer les astres ! 6+6 a
Ah ! qu'il s'en aille, lui, | la gorge cravatée 6+6 a
De honte, ruminant | toujours mon ennui, doux 6+6 b
Comme le sucre sur | la denture gâtée. 6−6 a
— Tel que la chienne après | l'assaut des fiers toutous, 6+6 b
50 Léchant son flanc d'où pend | une entraille emportée. 6+6 a
Qu'il dise charités | crasseuses et progrès… 6+6 a
—J'exècre tous | ces yeux de Chinois […]aines, 4+6 b
[…] qui chante : nana, comme un tas d'enfants près 11 a
De mourir, idiots | doux aux chansons soudaines : 6+6 b
55 Ô Justes, nous chierons | dans vos ventres de grès ! 6+6 a
mètre profils métriques : 6=6, (4+6), (11)
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