Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LAF_1/LAF13
Jules LAFORGUE
LE SANGLOT DE LA TERRE
1878-1883
ROSACE EN VITRAIL
Vraiment ! tout ce qu'un Cœur, | trop solitaire, amasse 6+6 a
De remords de la vie | et d'adoration, 6+6 b
Flambe, brûle, pourrit, | saigne en cette rosace 6+6 a
Et ruisselle à jamais | de consolation. 6+6 b
5 Oh ! plus que dans les fleurs | de fard de Baudelaire, 6+6 a
Plus que dans les refrains | d'automne de Chopin, 6+6 b
Plus qu'en un Rembrandt roux | qu'un rayon jaune éclaire. 6+6 a
Seuls aussi bons aux spleens | sont les couchants de juin 6+6 b
Vaste rosace d'or, | d'azur et de cinabre 6+6 a
10 Pour ce coin recueilli | mysticisant le jour, 6+6 b
Tu dis bien notre vie | et splendide et macabre, 6+6 a
Et je veux me noyer | en toi, crevé d'amour ! 6+6 b
D'abord, ton Cœur, calice | ouvré de broderies, 6+6 a
Semble, dans son ardeur | d'âme de reposoir, 6+6 b
15 Un lac de sang de vierge, | où mille pierreries 6+6 a
Brûlent mystiquement, | nuit et jour, sans espoir ! 6+6 b
De ce foyer d'essors, | féerique apothéose, 6+6 a
Jaillissent huit rayons, | échelle de couleurs, 6+6 b
Où des tons corrompus, | mourants, se décomposent, 6+6 a
20 Symboles maladifs | de subtiles douleurs. 6+6 b
O blancs neigeux et purs, | ô pétales d'aurore, 6+6 a
Blancs rosés, lilas blanc, | fleurs des vierges écrins, 6+6 b
N'êtes-vous pas l'enfance, | où le remords encore 6+6 a
Et les spleens furieux | n'ont pas cassé nos reins ? 6+6 b
25 Et vous, l'âpre jeunesse | éclatant en vingt gerbes 6+6 a
D'ivresse, vers le calme | éternel du soleil, 6+6 b
Bleus francs, verts des juillets, | écarlates superbes, 6+6 a
Lits chauds de tresses d'or, | braises de rut vermeil ? 6+6 b
Alors, le grand bouquet | tragique de la Vie ! 6+6 a
30 Les mornes violets | des désillusions, 6+6 b
Les horizons tout gris | de l'ornière suivi , 6+6 a
Et les tons infernaux | Je nos corruptions ! 6+6 b
Ah ! quel riche trésor | l'artiste Amour étale ! 6+6 a
Orangés sulfureux, | or roux, roses meurtris, 6+6 b
35 Blancs de cold-cream ; et la | splendeur orientale 6−6 a
Des verts, des lilas noirs | et des jaunes pourris ! 6+6 b
L'alcool, les cuivres chauds | des alambics ; les bières, 6+6 a
Gamme de blonds ; les ors | liquides et vermeils, 6+6 b
Les verts laiteux, les blancs, | les bleus incendiaires, 6+6 a
40 L'opale des crachats | et le plomb des réveils. 6+6 b
Toussez, ô gris du spleen, | défilé monotone 6+6 a
Des tons neutres, plâtreux, | enfumés, endeuillés ; 6+6 b
Sépias, roux déteints, | averses, ciels d'automne ; 6+6 a
Soleils soufrés croulant | dans les bois dépouillés ; 6+6 b
45 C'est la mort, la câlin | en cire, aux fards malades ; 6+6 a
Et son clavier de verts, | des algues au fiel ; 6+6 b
Ses jaunes luxueux, | ses roses de pommades, 6+6 a
Ses bitumes fondant | dans le noir éternel ! 6+6 b
Chaste rosace d'or, | d'azur et de cinabre, 6+6 a
50 Va, je viendrai souvent | lire en toi, loin du jour, 6+6 b
L'illusion, plus morne | en son chahut macabre, 6+6 a
Et me noyer en toi, | crevé, crevé d'amour ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6−6
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