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12 longueur métrique
6-6 mètre
VOL_2/VOL41
VOLTAIRE
(François-Marie Arouet)
La Pucelle d'Orléans
1752
CHANT XX
Argument
Comment Jeanne tomba dans une étrange tentation ; tendre témérité de son âne ; belle résistance de la Pucelle.
L'homme et la femme est chose bien fragile ; 4+6 a
Sur la vertu gardez-vous de compter : 4+6 b
Ce vase est beau, mais il est fait d'argile, 4+6 a
Un rien le casse : on peut le rajuster, 4+6 b
5 Mais ce n'est pas entreprise facile. 4+6 a
Garder ce vase avec précaution, 4+6 a
Sans le ternir, croyez-moi, c'est un rêve : 4+6 b
Nul n'y parvient ; témoin le mari d'Ève, 4+6 b
Et le vieux Loth, et l' aveugle Samson, 4+6 a
10 David le saint, le sage Salomon, 4+6 a
Et vous surtout, sexe doux, sexe aimable, 4+6 a
Tant du nouveau que du vieux Testament, 4+6 b
Et de l'histoire, et même de la fable. 4+6 a
Sexe dévot, je pardonne aisément 4+6 b
15 Vos petits tours et vos petits caprices, 4+6 a
Vos doux refus, vos charmants artifices ; 4+6 a
Mais j'avouerai qu'il est de certains cas, 4+6 a
De certains goûts que je n'excuse pas. 4+6 a
J'ai vu parfois une bamboche, un singe, 4+6 a
20 Gros, court, tanné, tout velu sous le linge, 4+6 a
Comme un blondin caressé dans vos bras : 4+6 a
J'en suis fâché pour vos tendres appas. 4+6 a
Un âne ailé vaut cent fois mieux peut-être 4+6 a
Qu'un fat en robe et qu'un lourd petit-maître. 4+6 a
25 Sexe adorable, à qui j'ai consacré 4+6 b
Le don des vers dont je fus honoré, 4+6 b
Pour vous instruire il est temps de connaître 4+6 a
L'erreur de Jeanne, et comme un beau grison 4+6 a
Pour un moment égara sa raison : 4+6 a
30 Ce n'est pas moi, c'est le sage Trithème, 4+6 a
Ce digne abbé, qui vous parle lui-même. 4+6 a
Le gros damné de père Grisbourdon, 4+6 a
Terrible encor au fond de sa chaudière, 4+6 b
En blasphémant cherchait l'occasion 4+6 a
35 De se venger de la Pucelle altière, 4+6 b
Par qui là-haut d'un coup d'estramaçon 4+6 a
Son chef tondu fut privé de son tronc. 4+6 a
Il s'écriait : « O Belzébuth ! mon père, 4+6 a
Ne pourrais-tu dans quelque gros péché 4+6 b
40 Faire tomber cette Jeanne sévère ? 4+6 a
J'y crois, pour moi, ton honneur attaché. » 4+6 b
Comme il parlait, arriva plein de rage 4+6 a
Hermaphrodix au ténébreux rivage, 4+6 a
Son eau bénite encor sur le visage. 4+6 a
45 Pour se venger, l'amphibie animal 4+6 a
Vint s'adresser à l'auteur de tout mal. 4+6 a
Les voilà donc tous les trois qui conspirent 4+6 a
Contre une femme. Hélas ! le plus souvent, 4+6 b
Pour les séduire il n'en fallut pas tant. 4+6 b
50 Depuis longtemps tous les trois ils apprirent 4+6 a
Que Jeanne d'Arc dessous son cotillon 4+6 a
Gardait les clefs de la ville assiégée, 4+6 b
Et que le sort de la France affligée 4+6 b
Ne dépendait que de sa mission. 4+6 a
55 L'esprit du diable a de l'invention : 4+6 a
Il courut vite observer sur la terre 4+6 a
Ce que faisaient ses amis d'Angleterre ; 4+6 a
En quel état et de corps et d'esprit 4+6 a
Se trouvait Jeanne après le grand conflit. 4+6 a
60 Le roi, Dunois, Agnès alors fidèle, 4+6 a
L'âne, Bonneau, Bonifoux, la Pucelle, 4+6 a
Étaient entrés vers la nuit dans le fort, 4+6 a
En attendant quelque nouveau renfort. 4+6 a
Des assiégés la brèche réparée 4+6 a
65 Aux assaillants ne permet plus l'entrée. 4+6 a
Des ennemis la troupe est retirée. 4+6 a
Les citoyens, le roi Charle, et Bedfort, 4+6 a
Chacun chez soi soupe en hâte et s'endort. 4+6 a
Muses, tremblez de l'étrange aventure 4+6 a
70 Qu'il faut apprendre à la race future ; 4+6 a
Et vous, lecteur, en qui le ciel a mis 4+6 b
Les sages goûts d'une tendresse pure, 4+6 a
Remerciez et Dunois et Denys, 4+6 b
Qu'un grand péché n'ait pas été commis. 4+6 a
75 Il vous souvient que je vous ai promis 4+6 a
De vous conter les galantes merveilles 4+6 a
De ce Pégase aux deux longues oreilles, 4+6 a
Qui combattit, sous Jeanne et sous Dunois, 4+6 a
Les ennemis des filles et des rois. 4+6 a
80 Vous l'avez vu sur ses ailes dorées 4+6 a
Porter Dunois aux lombardes contrées : 4+6 a
Il en revint ; mais il revint jaloux. 4+6 a
Vous savez bien qu'en portant la Pucelle, 4+6 b
Au fond du cœur il sentit l'étincelle 4+6 b
85 De ce beau feu, plus vif encor que doux, 4+6 a
Âme, ressort, et principe des mondes, 4+6 c
Qui dans les airs, dans les bois, dans les ondes, 4+6 c
Produit les corps et les anime tous. 4+6 a
Ce feu sacré, dont il nous reste encore 4+6 a
90 Quelques rayons dans ce monde épuisé, 4+6 b
Fut pris aux ciel pour animer Pandore. 4+6 a
Depuis ce temps le flambeau s'est usé : 4+6 b
Tout est flétri ; la force languissante 4+6 a
De la nature, en nos malheureux jours, 4+6 b
95 Ne produit plus que d'imparfaits amours. 4+6 b
S'il est encor une flamme agissante, 4+6 a
Un germe heureux des principes divins, 4+6 a
Ne cherchez pas chez Vénus Uranie, 4+6 b
Ne cherchez pas chez les faibles humains ; 4+6 a
100 Adressez-vous aux héros d'Arcadie. 4+6 b
Beaux Céladons, que des objets vainqueurs 4+6 a
Ont enchaînés par des liens de fleurs ; 4+6 a
Tendres amants en cuirasse, en soutane, 4+6 a
Prélats, abbés, colonels, conseillers, 4+6 b
105 Gens du bel air, et même cordeliers, 4+6 b
En fait d'amour, défiez-vous d'un âne. 4+6 a
Chez les Latins le fameux âne d'or, 4+6 a
Si renommé par sa métamorphose, 4+6 b
De celui-ci n'approchait pas encor : 4+6 a
110 Il n'était qu'homme, et c'est bien peu de chose. 4+6 b
L'abbé Trithème, esprit sage et discret, 4+6 a
Et plus savant que le pédant Larchet, 4+6 a
Modeste auteur de cette noble histoire, 4+6 a
Fut effrayé plus qu'on ne saurait croire, 4+6 a
115 Quand il fallut, aux siècles à venir, 4+6 b
De ces excès transmettre la mémoire. 4+6 a
De ses trois doigts il eut peine à tenir 4+6 b
Sur son papier sa plume épouvantée ; 4+6 a
Elle tomba : mais son âme agitée 4+6 a
120 Se rassura, faisant réflexion 4+6 a
Sur la malice et le pouvoir du diable. 4+6 b
Du genre humain cet ennemi coupable 4+6 b
Est tentateur de sa profession ; 4+6 a
Il prend les gens en sa possession ; 4+6 a
125 De tout péché ce père formidable, 4+6 b
Rival de Dieu, séduisit autrefois 4+6 a
Ma chère mère, un soir au coin d'un bois, 4+6 a
Dans son jardin. Ce serpent hypocrite 4+6 a
Lui fit manger une pomme maudite : 4+6 a
130 Même on prétend qu'il fit encore pis. 4+6 a
On la chassa de son beau paradis. 4+6 a
Depuis ce jour Satan dans nos familles 4+6 a
A gouverné nos femmes et nos filles. 4+6 a
Le bon Trithème en avait dans son temps 4+6 a
135 Vu de ses yeux des exemples touchants. 4+6 a
Voici comment ce grand homme raconte 4+6 a
Du saint baudet l'insolence et la honte. 4+6 a
La grosse Jeanne, au visage vermeil, 4+6 a
Qu'ont rafraîchi les pavots du sommeil, 4+6 a
140 Entre ses draps doucement recueillie, 4+6 a
Se rappelait les destins de sa vie. 4+6 a
De tant d'exploits son jeune cœur flatté 4+6 a
A saint Denys n'en donna pas la gloire ; 4+6 b
Elle conçut un grain de vanité. 4+6 a
145 Denys, fâché, comme on peut bien le croire, 4+6 b
Pour la punir, laissa quelques moments 4+6 a
Sa protégée au pouvoir de ses sens. 4+6 a
Denys voulut que sa Jeanne qu'il aime 4+6 a
Connût enfin ce qu'on est par soi-même, 4+6 a
150 Et qu'une femme, en toute occasion, 4+6 a
Pour se conduire à besoin d'un patron. 4+6 a
Elle fut prête à devenir la proie 4+6 b
D'un piège affreux que tendit le démon : 4+6 a
On va bien loin sitôt qu'on se fourvoie. 4+6 b
155 Le tentateur, qui ne néglige rien, 4+6 a
Prenait son temps ; il le prend toujours bien. 4+6 a
Il est partout : il entra par adresse 4+6 a
Au corps de l'âne, il forma son esprit, 4+6 b
Valeur des sons à sa langue il apprit, 4+6 b
160 De sa voix rauque adoucit la rudesse, 4+6 a
Et l'instruisit aux finesses de l'art 4+6 a
Approfondi par Ovide et Bernard. 4+6 a
L'âne éclairé surmonta toute honte ; 4+6 a
De l'écurie adroitement il monte 4+6 a
165 Au pied du lit où, dans un doux repos, 4+6 a
Jeanne en son cœur repassait ses travaux ; 4+6 a
Puis doucement s'accroupissant près d'elle, 4+6 b
Il la loua d'effacer les héros, 4+6 a
D'être invincible, et surtout d'être belle. 4+6 b
170 Ainsi jadis le serpent séducteur, 4+6 a
Quand il voulut subjuguer notre mère, 4+6 b
Lui fit d'abord un compliment flatteur : 4+6 a
L'art de louer commença l'art de plaire. 4+6 b
« Où suis-je ? ô ciel ! s'écria Jeanne d'Arc : 4+6 a
175 Qu'ai-je entendu ? par Saint Luc ! par saint Marc ! 4+6 a
Est-ce mon âne ? ô merveille ! ô prodige ! 4+6 a
Mon âne parle, et même il parle bien ! » 4+6 b
L'âne à genoux, composant son maintien, 4+6 b
Lui dit : « O d'Arc ! ce n'est point un prestige ; 4+6 a
180 Voyez en moi l'âne de Canaan : 4+6 a
Je fus nourri chez le vieux Balaam ; 4+6 a
Chez les païens Balaam était prêtre, 4+6 a
Moi j'étais Juif ; et sans moi mon cher maître 4+6 a
Aurait maudit tout ce bon peuple élu, 4+6 a
185 Dont un grand mal fût sans doute advenu. 4+6 a
Adonaï récompensa mon zèle ; 4+6 a
Au vieil Énoc bientôt on me donna : 4+6 b
Énoc avait une vie immortelle ; 4+6 a
J'en eus autant ; et le maître ordonna 4+6 b
190 Que le ciseau de la Parque cruelle 4+6 a
Respecterait le fil de mes beaux ans. 4+6 a
Je jouis donc d'un éternel printemps. 4+6 a
De notre pré le maître débonnaire 4+6 a
Me permit tout, hors un cas seulement : 4+6 b
195 Il m'ordonna de vivre chastement. 4+6 b
C'est pour un âne une terrible affaire. 4+6 a
Jeune et sans frein dans ce charmant séjour, 4+6 c
Maître de tout, j'avais droit de tout faire, 4+6 a
Le jour, la nuit, tout, excepté l'amour. 4+6 c
200 J'obéis mieux que ce premier sot homme, 4+6 a
Qui perdit tout pour manger une pomme. 4+6 a
Je fus vainqueur de mon tempérament ; 4+6 a
La chair se tut ; je n'eus point de faiblesses ; 4+6 b
Je vécus vierge : or savez-vous comment ? 4+6 a
205 Dans le pays il n'était point d'ânesses. 4+6 b
Je vis couler, content de mon état, 4+6 a
Plus de mille ans dans ce doux célibat. 4+6 a
« Lorsque Bacchus vint du fond de la Grèce 4+6 a
Porter le thyrse, et la gloire, et l'ivresse, 4+6 a
210 Dans les pays par le Gange arrosés, 4+6 a
A ce héros je servis de trompette : 4+6 b
Les Indiens par nous civilisés 4+6 a
Chantent encor ma gloire et leur défaite. 4+6 b
Silène et moi nous sommes plus connus 4+6 a
215 Que tous les grands qui suivirent Bacchus. 4+6 a
C'est mon nom seul, ma vertu signalée, 4+6 a
Qui fit depuis tout l'honneur d'Apulée. 4+6 a
« Enfin là-haut, dans ces plaines d'azur, 4+6 a
Lorsque saint George, à vos Français si dur, 4+6 a
220 Ce fier saint George, aimant toujours la guerre, 4+6 a
Voulut avoir un coursier d'Angleterre ; 4+6 a
Quand saint Martin, fameux par son manteau, 4+6 a
Obtint encore un cheval assez beau ; 4+6 a
Monsieur Denys, qui fait comme eux figure, 4+6 a
225 Voulut, comme eux, avoir une monture : 4+6 a
Il me choisit, près de lui m'appela ; 4+6 a
Il me fit don de deux brillantes ailes ; 4+6 b
Je pris mon vol aux voûtes éternelles ; 4+6 b
Du grand saint Roch le chien me festoya ; 4+6 a
230 J'eus pour ami le porc de saint Antoine, 4+6 c
Céleste porc, emblème de tout moine ; 4+6 c
D'étrilles d'or mon maître m'étrilla ; 4+6 a
Je fus nourri de nectar, d'ambroisie : 4+6 a
Mais, ô ma Jeanne ! une si belle, vie 4+6 a
235 N'approche pas du plaisir que je sens 4+6 a
Au doux aspect de vos charmes puissants. 4+6 a
Le chien, le porc, et George, et Denys même, 4+6 a
Ne valent pas votre beauté suprême. 4+6 a
Croyez surtout que de tous les emplois 4+6 a
240 Où m'éleva mon étoile bénigne, 4+6 b
Le plus heureux, le plus selon mon choix, 4+6 a
Et dont je suis peut-être le plus digne, 4+6 b
Est de servir sous vos augustes lois. 4+6 a
Quand j'ai quitté le ciel et l'empyrée, 4+6 a
245 J'ai vu par vous ma fortune honorée. 4+6 a
Non, je n'ai pas abandonné les cieux, 4+6 a
J'y suis encor ; le ciel est dans vos yeux. » 4+6 a
A ce discours, peut-être téméraire, 4+6 a
Jeanne sentit une juste colère. 4+6 a
250 Aimer un âne, et lui donner sa fleur ! 4+6 a
Souffrirait-elle un pareil déshonneur, 4+6 a
Après avoir sauvé son innocence 4+6 a
Des muletiers et des héros de France, 4+6 a
Après avoir, par la grâce d'en haut, 4+6 a
255 Dans le combat mis Chandos en défaut ? 4+6 a
Mais que cet âne, ô ciel ! a de mérite ! 4+6 a
Ne vaut-il pas la chèvre favorite 4+6 a
D'un Calabrois, qui la pare de fleurs ? 4+6 a
« Non, disait-elle, écartons ces horreurs. 4+6 a
260 Tous ces pensers formaient une tempête 4+6 a
Au cœur de Jeanne, et confondaient sa tête, 4+6 a
Ainsi qu'on voit sur les profondes mers 4+6 a
Les fiers tyrans des ondes et des airs, 4+6 a
L'un accourant des cavernes australes, 4+6 a
265 L'autre sifflant des glaces boréales, 4+6 a
Battre un vaisseau cinglant sur l'Océan 4+6 a
Vers Sumatra, Bengale, ou Ceïlan : 4+6 a
Tantôt la nef aux cieux semble portée, 4+6 a
Près des rochers tantôt elle est jetée, 4+6 a
270 Tantôt l'abîme est prêt à l'engloutir, 4+6 a
Et des enfers elle paraît sortir. 4+6 a
L'enfant malin qui tient sous son empire 4+6 a
Le genre humain, les ânes, et les dieux, 4+6 b
Son arc en main, planait au haut des cieux, 4+6 b
275 Et voyait Jeanne avec un doux sourire. 4+6 a
De Jeanne d'Arc le grand cœur en secret 4+6 a
Était flatté de l'étonnant effet 4+6 a
Que produisait sa beauté singulière 4+6 a
Sur le sens lourd d'une âme si grossière. 4+6 a
280 Vers son amant elle avança la main, 4+6 a
Sans y songer ; puis la tira soudain. 4+6 a
Elle rougit, s'effraye, et se condamne ; 4+6 a
Puis se rassure, et puis lui dit : « Bel âne, 4+6 a
Vous concevez un chimérique espoir ; 4+6 a
285 Respectez plus ma gloire et mon devoir ; 4+6 a
Trop de distance est entre nos espèces ; 4+6 a
Non, je ne puis approuver vos tendresses ; 4+6 a
Gardez-vous bien de me pousser à bout. » 4+6 a
L'âne reprit : « L'amour égale tout. 4+6 a
290 Songez au cygne à qui Léda fit fête, 4+6 a
Sans cesser d'être une personne honnête. 4+6 a
Connaissez-vous la fille de Minos, 4+6 a
Pour un taureau négligeant des héros, 4+6 a
Et soupirant pour son beau quadrupède ? 4+6 a
295 Sachez qu'un aigle enleva Ganymède, 4+6 a
Et que Philyre avait favorisé 4+6 a
Le dieu des mers en cheval déguisé. » 4+6 a
Il poursuivait son discours ; et le diable, 4+6 a
Premier auteur des écrits de la fable, 4+6 a
300 Lui fournissait ces exemples frappants, 4+6 a
Et mettait l'âne au rang de nos savants. 4+6 a
Tandis qu'il parle avec tant d'élégance, 4+6 a
Le grand Dunois, qui près de là couchait, 4+6 b
Prêtait l'oreille, était tout stupéfait 4+6 b
305 Des traits hardis d'une telle éloquence. 4+6 a
Il voulut voir le héros qui parlait, 4+6 a
Et quel rival l'Amour lui suscitait. 4+6 a
Il entre, il voit (ô prodige ! ô merveille !) 4+6 b
Le possédé porteur de longue oreille, 4+6 b
310 Et ne crut pas encor ce qu'il voyait. 4+6 a
Jadis Vénus fut ainsi confondue, 4+6 a
Lorsqu'en un rets formé de fils d'airain, 4+6 b
Aux yeux des dieux le malheureux Vulcain 4+6 b
Sous le dieu Mars la montra toute nue. 4+6 a
315 Jeanne, après tout, n'a point été vaincue ; 4+6 a
Le bon Denys ne l'abandonnait pas ; 4+6 a
Près de l'abîme il affermit ses pas ; 4+6 a
Il la soutint dans ce péril extrême. 4+6 a
Jeanne s'indigne et rentre en elle-même : 4+6 a
320 Comme un soldat dans son poste endormi, 4+6 a
Qui se réveille aux premières alarmes, 4+6 b
Frotte ses yeux, saute en pied, prend les armes, 4+6 b
S'habille en hâte, et fond sur l'ennemi. 4+6 a
De Débora la lance redoutable 4+6 a
325 Était chez Jeanne auprès de son chevet, 4+6 b
Et de malheur souvent la préservait. 4+6 b
Elle la prend ; la puissance du diable 4+6 a
Ne tint jamais contre ce fer divin. 4+6 a
Jeanne et Dunois fondent sur le malin. 4+6 a
330 Le malin court, et sa voix effrayante 4+6 a
Fait retentir Blois, Orléans, et Nante ; 4+6 a
Et les baudets dans le Poitou nourris 4+6 a
Du même ton répondaient à ses cris. 4+6 a
Satan fuyait ; mais dans sa course prompte 4+6 a
335 Il veut venger les Anglais et sa honte ; 4+6 a
Dans Orléans il vole comme un trait 4+6 a
Droit au logis du président Louvet. 4+6 a
Il s'y tapit dans le corps de madame : 4+6 a
Il était sûr de gouverner cette âme ; 4+6 a
340 C'était son bien ; le perfide est instruit 4+6 a
Du mal secret qui tient la présidente, 4+6 b
Il sait qu'elle aime, et que Talbot l'enchante. 4+6 b
Le vieux serpent en secret la conduit 4+6 a
Il la dirige, il l'enflamme, il espère 4+6 a
345 Qu'elle pourra prêter son ministère 4+6 a
Pour introduire aux remparts d'Orléans 4+6 a
Le beau Talbot et ses fiers combattants : 4+6 a
En travaillant pour les Anglais qu'il aime, 4+6 a
Il sait assez qu'il combat pour lui-même. 4+6 a
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