Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
VOL_2/VOL37
VOLTAIRE
(François-Marie Arouet)
La Pucelle d'Orléans
1752
CHANT XVI.
Argument
Comment saint Pierre apaisa saint George et saint Denys, et comment il promit un beau prix à celui des deux qui lui apporterait la meilleure ode. Mort de la belle Rosamore.
Palais des cieux, ouvrez-vous à ma voix. 4+6 a
Êtres brillants aux six ailes légères, 4+6 b
Dieux emplumés, dont les mains tutélaires 4+6 b
Font les destins des peuples et des rois ! 4+6 a
5 Vous qui cachez, en étendant vos ailes, 4+6 d
Des derniers cieux les splendeurs éternelles, 4+6 d
Daignez un peu vous ranger de côté : 4+6 e
Laissez-moi voir, en cette horrible affaire, 4+6 f
Ce qui se passe au fond du sanctuaire ; 4+6 f
10 Et pardonnez ma curiosité. 4+6 e
Cette prière est de l'abbé Trithème, 4+6 g
Non pas de moi ; car mon œil effronté 4+6 e
Ne peut percer jusqu'à la cour suprême ; 4+6 g
Je n'aurais pas tant de témérité. 4+6 e
15 Le dur saint George et Denys notre apôtre 4+6 h
Étaient au ciel enfermés l'un et l'autre ; 4+6 h
Ils voyaient tout ; mais ils ne pouvaient pas 4+6 i
Prêter leurs mains aux terrestres combats ; 4+6 i
Ils cabalaient : c'est tout ce qu'on peut faire 4+6 f
20 Et ce qu'on fait quand on est à la cour. 4+6 j
George et Denys s'adressent tour à tour 4+6 j
Dans l'empyrée au bon monsieur saint Pierre. 4+6 f
Ce grand portier, dont le pape est vicaire, 4+6 f
Dans ses filets enveloppant le sort, 4+6 k
25 Sous ses deux clefs tient la vie et la mort. 4+6 k
Pierre leur dit : « Vous avez pu connaître, 4+6 l
Mes chers amis, quel affront je reçus 4+6 m
Quand je remis une oreille à Malchus. 4+6 m
Je me souviens de l'ordre de mon maître ; 4+6 l
30 Il fit rentrer mon fer dans son fourreau : 4+6 n
Il m'a privé du droit brillant des armes ; 4+6 o
Mais j'imagine un moyen tout nouveau 4+6 n
Pour décider de vos grandes alarmes. 4+6 o
« Vous, saint Denys, prenez dans ce canton 4+6 p
35 Les plus grands saints qu'ait vus naître la France ; 4+6 q
Vous, monsieur George, allez en diligence 4+6 q
Prendre les saints de l'île d'Albion. 4+6 p
Que chaque troupe en ce moment compose 4+6 r
Un hymne en vers, non pas une ode en prose. 4+6 r
40 Houdart a tort ; il faut dans ces hauts lieux 4+6 s
Parler toujours le langage des dieux ; 4+6 s
Qu'on fasse, dis-je, une ode pindarique 4+6 t
Où le poète exalte mes vertus, 4+6 m
Ma primauté, mes droits, mes attributs, 4+6 m
45 Et que le tout soit mis vite en musique : 4+6 t
Chez les mortels, il faut toujours du temps 4+6 u
Pour rimailler des vers assez méchants ; 4+6 u
On va plus vite au séjour de la gloire. 4+6 v
Allez, vous dis-je, exercez vos talents ; 4+6 u
50 La meilleure ode obtiendra la victoire, 4+6 v
Et vous ferez le sort des combattants. » 4+6 u
Ainsi parla, du plus haut de son trône, 4+6 w
Aux deux rivaux l'infaillible Barjone ; 4+6 w
Cela fut dit en deux mots tout au plus, 4+6 m
55 Le laconisme est langue des élus. 4+6 m
En un clin d'œil, les deux rivaux célestes, 4+6 y
Pour terminer leurs querelles funestes, 4+6 y
Vont assembler les saints de leur pays 4+6 z
Qui sur la terre ont été beaux esprits. 4+6 z
60 Le bon patron qu'on révère à Paris 4+6 z
Fit aussitôt seoir à sa table ronde 4+6 a
Saint Fortunat, peu connu dans le monde, 4+6 a
Et qui passait pour l'auteur du Pange ; 4+6 e
Et saint Prosper, d'épithètes chargé, 4+6 e
65 Quoique un peu dur et qu'un peu janséniste. 4+6 b
Il mit aussi Grégoire dans sa liste, 4+6 b
Le grand Grégoire, évêque tourangeau, 4+6 n
Cher au pays qui vit naître Bonneau ; 4+6 n
Et saint Bernard fameux par l'antithèse, 4+6 c
70 Qui dans son temps n'avait pas son pareil ; 4+6 d
Et d'autres saints pour servir de conseil : 4+6 d
Sans prendre avis, il est rare qu'on plaise. 4+6 c
George, en voyant tous ces soins de Denys, 4+6 z
Le regardait d'un dédaigneux souris ; 4+6 z
75 Il avisa dans le sacré pourpris 4+6 z
Un saint Austin, prêcheur de l'Angleterre, 4+6 f
Puis en ces mots il lui dit son avis : 4+6 z
« Bonhomme Austin, je suis né pour la guerre, 4+6 f
Non pour les vers dont je fais peu de cas ; 4+6 i
80 Je sais brandir mon large cimeterre, 4+6 f
Pourfendre un buste, et casser tête et bras ; 4+6 i
Tu sais rimer : travaille, versifie, 4+6 e
Soutiens en vers l'honneur de la patrie. 4+6 e
Un seul Anglais, dans les champs de la mort, 4+6 k
85 De trois Français triomphe sans effort. 4+6 k
Nous avons vu devers la Normandie, 4+6 e
Dans le Haut-Maine, en Guienne, en Picardie, 4+6 e
Ces beaux messieurs aisément mis à bas ; 4+6 i
Si pour frapper nous avons meilleurs bras, 4+6 i
90 Crois, en fait d'hymne, et d'ode et d'œuvre telle, 4+6 f
Quand il s'agit de penser, de rimer, 4+6 e
Que nous avons non moins bonne cervelle. 4+6 f
Travaille, Austin, cours en vers t'escrimer : 4+6 e
Je veux que Londre ait à jamais l'empire 4+6 g
95 Dans les deux arts de bien faire et bien dire. 4+6 g
Denys ameute un tas de rimailleurs 4+6 h
Qui tous ensemble ont très-peu de génie ; 4+6 e
Travaille seul : tu sais tes vieux auteurs ; 4+6 h
Courage ! allons, prends ta harpe bénie, 4+6 e
100 Et moque-toi de ton académie. » 4+6 e
Le bon Austin, de cet emploi chargé, 4+6 e
Le remercie en auteur protégé. 4+6 e
Denys et lui, dans un réduit commode, 4+6 i
Vont se tapir, et chacun fit son ode. 4+6 i
105 Quand tout fut fait, les brûlants séraphins, 4+6 j
Les gros joufflus, têtes de chérubins, 4+6 j
Près de Barjone en deux rangs se perchèrent ; 4+6 k
Au-dessous d'eux les anges se nichèrent ; 4+6 k
Et tous les saints, soigneux de s'arranger, 4+6 e
110 Sur des gradins s'assirent pour juger. 4+6 e
Austin commence : il chantait les prodiges 4+6 l
Qui de l'Égypte endurcirent les cœurs ; 4+6 h
Ce grand Moïse, et ses imitateurs 4+6 h
Qui l'égalaient dans ses divins prestiges : 4+6 l
115 Les flots du Nil, jadis si bienfaisants, 4+6 u
D'un sang affreux dans leur course écumants ; 4+6 u
Du noir limon les venimeux reptiles 4+6 m
Changés en verge, et la verge en serpents ; 4+6 u
Le jour en nuit ; les déserts et les villes, 4+6 m
120 De moucherons, de vermine couverts ; 4+6 n
La rogne aux os, la foudre dans les airs ; 4+6 n
Les premiers-nés d'une race rebelle 4+6 f
Tous égorgés par l'ange du Seigneur ; 4+6 o
L'Égypte en deuil, et le peuple fidèle 4+6 f
125 De ses patrons emportant la vaisselle, 4+6 f
Et par le vol méritant son bonheur ; 4+6 o
Ce peuple errant pendant quarante années ; 4+6 p
Vingt mille Juifs égorgés pour un veau ; 4+6 n
Vingt mille encore envoyés au tombeau 4+6 n
130 Pour avoir eu des amours fortunées ; 4+6 p
Et puis Aod, ce Ravaillac hébreu, 4+6 q
Assassinant son maître au nom de Dieu ; 4+6 q
Et Samuel, qui d'une main divine 4+6 r
Prend sur l'autel un couteau de cuisine, 4+6 r
135 Et bravement met Agag en hachis, 4+6 z
Car cet Agag était incirconcis ; 4+6 z
Puis la beauté qui, sauvant Béthulie, 4+6 e
Si purement de son corps fit folie ; 4+6 e
Le bon Basa qui massacra Nadad ; 4+6 s
140 Et puis Achab mourant comme un impie, 4+6 e
Pour n'avoir pas égorgé Benhadad ; 4+6 s
Le roi Joas meurtri par Jozabad, 4+6 s
Fils d'Atrobad ; et la reine Athalie, 4+6 e
Si méchamment mise à mort par Joad. 4+6 s
145 Longuette fut la triste litanie ; 4+6 e
Ces beaux récits étaient entrelacés 4+6 t
De ces grands traits si chers aux temps passés. 4+6 t
On y voyait le soleil se dissoudre, 4+6 u
La mer fuyant, la lune mise en poudre, 4+6 u
150 Le monde en feu qui toujours tressaillait ; 4+6 v
Dieu qui cent fois en fureur s'éveillait ; 4+6 v
Des flots de sang, des tombeaux, des ruines ; 4+6 w
Et cependant près des eaux argentines 4+6 w
Le lait coulait sous de verts oliviers ; 4+6 t
155 Les monts sautaient tout comme des béliers, 4+6 t
Et les béliers tout comme des collines. 4+6 w
Le bon Austin célébrait le Seigneur, 4+6 o
Qui menaçait le Chaldéen vainqueur, 4+6 o
Et qui laissait son peuple en esclavage ; 4+6 x
160 Mais des lions brisant toujours les dents, 4+6 u
Sous ses deux pieds écrasant les serpents, 4+6 u
Parlant au Nil, et suspendant la rage 4+6 x
Des basilics et des léviathans. 4+6 u
Austin finit. Sa pindarique ivresse 4+6 c
165 Fit élever parmi les bienheureux 4+6 s
un bruit confus, un murmure douteux, 4+6 s
Qui n'était pas en faveur de la pièce. 4+6 c
Denys se lève ; et baissant ses doux yeux, 4+6 s
Puis les levant avec un air modeste, 4+6 y
170 Il salua l'auditoire céleste, 4+6 y
Parut surpris de leurs traits radieux ; 4+6 s
Et finement sa pudeur semblait dire : 4+6 g
« Encouragez celui qui vous admire. » 4+6 g
Il salua trois fois très-humblement 4+6 z
175 Les conseillers, le premier président ; 4+6 z
Puis il chanta d'une voix douce et tendre 4+6 a
Cet hymne adroit que vous allez entendre : 4+6 a
« O Pierre ! O Pierre ! ô toi sur qui Jésus 4+6 m
Daigna fonder son Église immortelle, 4+6 f
180 Portier des cieux, pasteur de tout fidèle, 4+6 f
Maître des rois à tes pieds confondus, 4+6 m
Docteur divin, prêtre saint, tendre père, 4+6 f
Auguste appui de nos rois très-chrétiens, 4+6 j
Étends sur eux ta faveur salutaire ; 4+6 f
185 Leurs droits sont purs, et ces droits sont les tiens. 4+6 j
Le pape à Rome est maître des couronnes, 4+6 b
Aucun n'en doute ; et si ton lieutenant 4+6 z
A qui lui plaît fait ce petit présent, 4+6 z
C'est en ton nom, car c'est toi qui les donnes. 4+6 b
190 Hélas ! hélas ! nos gens de parlement 4+6 z
Ont banni Charle ; ils ont impudemment 4+6 z
Mis sur le trône une race étrangère ; 4+6 f
On ôte au fils l'héritage du père. 4+6 f
Divin portier, oppose tes bienfaits 4+6 c
195 A cette audace, à dix ans de misère ; 4+6 f
Rends-nous les clefs de la cour du palais. » 4+6 c
C'est sur ce ton que saint Denys prélude ; 4+6 d
Puis il s'arrête : il lit avec étude 4+6 d
Du coin de l'œil dans les yeux de Céphas, 4+6 i
200 En affectant un secret embarras. 4+6 i
Céphas content fit voir sur son visage 4+6 x
De l'amour-propre un secret témoignage, 4+6 x
Et rassurant les esprits interdits 4+6 z
Du chantre habile, il dit dans son langage : 4+6 x
205 « Cela va bien ; continuez, Denys. » 4+6 z
L'humble Denys repart avec prudence : 4+6 q
« Mon adversaire a pu charmer les cieux ; 4+6 s
Il a chanté le Dieu de la vengeance, 4+6 q
Je vais bénir le Dieu de la clémence : 4+6 q
210 Haïr est bon, mais aimer vaut bien mieux. » 4+6 s
Denys alors d'une voix assurée 4+6 e
En vers heureux chanta le bon berger 4+6 e
Qui va cherchant sa brebis égarée, 4+6 e
Et sur son dos se plaît à la charger ; 4+6 e
215 Le bon fermier, dont la main libérale 4+6 f
Daigne payer l'ouvrier négligent 4+6 z
Qui vient trop tard, afin que diligent 4+6 z
Il vienne ouvrer dès l'aube matinale ; 4+6 f
Le bon patron qui, n'ayant que cinq pains 4+6 j
220 Et trois poissons, nourrit cinq mille humains ; 4+6 j
Le bon prophète, encor plus doux qu'austère, 4+6 f
Qui donne grâce à la femme adultère, 4+6 f
A Magdeleine, et permet que ses pieds 4+6 t
Soient gentiment par la belle essuyés. 4+6 t
225 Par Magdeleine Agnès est figurée. 4+6 e
Denys a pris ce délicat détour ; 4+6 j
Il réussit : la grand'chambre éthérée 4+6 e
Sentit le trait, et pardonna l'amour. 4+6 j
Du doux Denys l'ode fut bien reçue ; 4+6 g
230 Elle eut le prix, elle eut toutes les voix. 4+6 a
Du saint Anglais l'audace fut déçue ; 4+6 g
Austin rougit, il fuit en tapinois ; 4+6 a
Chacun en rit, le paradis le hue. 4+6 g
Tel fut hué dans les murs de Paris 4+6 z
235 Un pédant sec, à face de Thersite, 4+6 h
Vit délateur, insolent hypocrite, 4+6 h
Qui fut payé de haine et de mépris, 4+6 z
Quand il osa dans ses phrases vulgaires 4+6 b
Flétrir les arts et condamner nos frères. 4+6 b
240 Pierre à Denys donna deux beaux agnus ; 4+6 m
Denys les baise, et soudain l'on ordonne, 4+6 w
Par un arrêt signé de douze élus, 4+6 m
Qu'en ce grand jour les Anglais soient vaincus 4+6 m
Par les Français et par Charle en personne. 4+6 w
245 En ce moment la barroise amazone 4+6 w
Vit dans les airs, dans un nuage épais, 4+6 c
De son grison la figure et les traits ; 4+6 c
Comme un soleil, dont souvent un nuage 4+6 x
Reçoit l'empreinte et réfléchit l'image. 4+6 x
250 Elle cria : « Ce jour est glorieux ; 4+6 s
Tout est pour nous, mon âne est dans les cieux. » 4+6 s
Bedfort, surpris de ce prodige horrible, 4+6 i
Déjà s'arrête et n'est plus invincible. 4+6 i
Il lit au ciel, d'un regard consterné, 4+6 e
255 Que de saint George il est abandonné. 4+6 e
L'Anglais surpris, croyant voir une armée, 4+6 e
Descend soudain de la ville alarmée ; 4+6 e
Tous les bourgeois, devenus valeureux, 4+6 s
Les voyant fuir, descendent après eux. 4+6 s
260 Charles plus loin, entouré de carnage, 4+6 x
Jusqu'à leur camp se fait un beau passage. 4+6 x
Les assiégeants, à leur tour assiégés, 4+6 t
En tête, en queue, assaillis, égorgés, 4+6 t
Tombent en foule au bord de leurs tranchées, 4+6 p
265 D'armes, de morts, et de mourants jonchées. 4+6 p
C'est en ces lieux, c'est dans ce champ mortel 4+6 d
Que tu venais exercer ta vaillance, 4+6 q
O dur Anglais, ô Christophe Arondel ! 4+6 d
Ton maintien sec, ta froide indifférence, 4+6 q
270 Donnaient du prix à ton courage altier. 4+6 e
Sans dire un mot, ce sourcilleux guerrier 4+6 e
Examinait comme on se bat en France : 4+6 q
Et l'on eût dit, à son air d'importance, 4+6 q
Qu'il était là pour se désennuyer. 4+6 e
275 Sa Rosamore, à ses pas attachée, 4+6 e
Est comme lui de fer enharnachée, 4+6 e
Tel qu'un beau page ou qu'un jeune écuyer : 4+6 e
Son casque est d'or, sa cuirasse est d'acier ; 4+6 e
D'un perroquet la plume panachée 4+6 e
280 Au gré des vents ombrage son cimier. 4+6 e
Car dès ce jour où son bras meurtrier 4+6 e
A dans son lit décollé Martinguerre, 4+6 f
Elle se plaît tout à fait à la guerre. 4+6 f
On croirait voir la superbe Pallas 4+6 i
285 Quittant l'aiguille et marchant aux combats, 4+6 i
Où Bradamante, ou bien Jeanne elle-même. 4+6 g
Elle parlait au voyageur qu'elle aime, 4+6 g
Et lui montrait les plus grands sentiments, 4+6 u
Lorsqu'un démon trop funeste aux amants, 4+6 u
290 Pour leur malheur, vers Arondel attire 4+6 g
Le dur Poton et le jeune La Hire, 4+6 g
Et Richement qui n'a pitié de rien. 4+6 j
Poton, voyant le grave et fier maintien 4+6 j
De notre Anglais, tout indigné s'élance 4+6 q
295 Sur le causeur, et d'un grand coup de lance, 4+6 q
Qui par le flanc sort au milieu du dos, 4+6 k
D'un sang trop froid lui fait verser des flots : 4+6 k
Il tombe et meurt ; et la lance cassée 4+6 e
Roule avec lui dans son corps enfoncée. 4+6 e
300 A ce spectacle, à ce moment affreux, 4+6 s
On ne vit point la belle Rosamore 4+6 l
Se renverser sur l'amant qu'elle adore, 4+6 l
Ni s'arracher l'or de ses blonds cheveux, 4+6 s
Ni remplir l'air de ses cris douloureux, 4+6 s
305 Ni s'emporter contre la Providence ; 4+6 q
Point de soupirs ; elle cria : « Vengeance ! » 4+6 q
Et dans l'instant que Poton se baissait 4+6 v
En ramassant son fer qui se cassait, 4+6 v
Ce bras tout nu, ce bras dont la puissance 4+6 q
310 Avait d'un coup séparé dans un lit 4+6 m
Un chef grison du cou d'un vieux bandit, 4+6 m
Tranche à Poton la main trop redoutable, 4+6 n
Cette main droite à ses yeux si coupable. 4+6 n
Les nerfs cachés sous la peau des cinq doigts 4+6 c
315 Les font mouvoir pour la dernière fois ; 4+6 c
Poton depuis ne sut jamais écrire. 4+6 g
Mais dans l'instant le brave et beau La Hire 4+6 g
Porte au guerrier, du grand Poton vainqueur, 4+6 o
Un coup mortel qui lui perce le cœur. 4+6 o
320 Son casque d'or, que sa chute détache, 4+6 o
Découvre un sein de roses et de lis ; 4+6 z
Son front charmant n'a plus rien qui le cache ; 4+6 o
Ses longs cheveux tombent sur ses habits ; 4+6 z
Ses grands yeux bleus dans la mort endormis, 4+6 z
325 Tout laisse voir une femme adorable, 4+6 n
Et montre un corps formé pour les plaisirs. 4+6 p
Le beau La Hire en pousse des soupirs, 4+6 p
Répand des pleurs, et d'un ton lamentable 4+6 n
S'écrie : « O ciel ! je suis un meurtrier, 4+6 e
330 Un housard noir plutôt qu'un chevalier ; 4+6 e
Mon cœur, mon bras, mon épée est infâme : 4+6 q
Est-il permis de tuer une dame ? » 4+6 q
Mais Richemont, toujours mauvais plaisant 4+6 z
Et toujours dur, lui dit : « Mon cher La Hire, 4+6 g
335 Va, tes remords ont sur toi trop d'empire ; 4+6 g
C'est une Anglaise, et le mal n'est pas grand ; 4+6 z
Elle n'est pas pucelle comme Jeanne. » 4+6 s
Tandis qu'il tient un discours si profane, 4+6 s
D'un coup de flèche il se sentit blessé : 4+6 e
340 Et devenu plus fier, plus courroucé, 4+6 e
Il rend cent coups à la troupe bretonne, 4+6 x
Qui comme un flot le presse et l'environne. 4+6 x
La Hire et lui, nobles, bourgeois, soldats, 4+6 i
Portent partout les efforts de leurs bras : 4+6 i
345 On tue, on tombe, on poursuit, on recule, 4+6 t
De corps sanglants un monceau s'accumule ; 4+6 t
Et des mourants l'Anglais fait un rempart. 4+6 u
Dans cette horrible et sanglante mêlée, 4+6 e
Le roi disait à Dunois : « Cher bâtard, 4+6 u
350 Dis-moi, de grâce, où donc est-elle allée ? 4+6 e
— Qui ? » dit Dunois. Le bon roi lui repart : 4+6 u
« Ne sais-tu pas ce qu'elle est devenue ? 4+6 g
— Qui donc ? — Hélas ! elle était disparue 4+6 g
Hier au soir, avant qu'un heureux sort 4+6 k
355 Nous eût conduits au château de Bedfort ; 4+6 k
Et dans la place on est entré sans elle. 4+6 f
— Pour la trouver, marchons, » dit la Pucelle. 4+6 f
« Ciel ! dit le roi, qu'elle me soit fidèle ! 4+6 f
Gardez-la-moi. » Pendant ce beau discours, 4+6 w
360 Il avançait et combattait toujours. 4+6 w
Bientôt la nuit, couvrant notre hémisphère, 4+6 f
L'enveloppa d'un noir et long manteau, 4+6 n
Et mit un terme à ce cours tout nouveau 4+6 n
Des beaux exploits que Charle eût voulu faire. 4+6 f
365 Comme il sortait de cette grande affaire, 4+6 f
Il entendit qu'on avait le matin 4+6 j
Vu cheminer vers la forêt voisine 4+6 r
Quelques tendrons du genre féminin ; 4+6 j
Une surtout, à la taille divine, 4+6 r
370 Aux grands yeux bleus, au minois enfantin, 4+6 j
Au souris tendre, à la peau de satin, 4+6 j
Que sermonnait un bon dominicain. 4+6 j
Des écuyers brillants, à mines fières, 4+6 b
Des chevaliers, sur leurs coursiers fringants, 4+6 u
375 Couverts d'acier, et d'or, et de rubans, 4+6 u
Accompagnaient les belles cavalières. 4+6 b
La troupe errante avait porté ses pas 4+6 i
Vers un palais qu'on ne connaissait pas, 4+6 i
Et que jamais, avant cette aventure, 4+6 x
380 On n'avait vu dans ces lieux écartés ; 4+6 t
Rien n'égalait sa bizarre structure. 4+6 x
Le roi, surpris de tant de nouveautés, 4+6 t
Dit à Bonneau : « Qui m'aime doit me suivre ; 4+6 y
Demain matin je veux au point du jour 4+6 j
385 Revoir l'objet de mon fidèle amour, 4+6 j
Reprendre Agnès, ou bien cesser de vivre. » 4+6 y
Il resta peu dans les bras du sommeil ; 4+6 d
Et quand Phosphore, au visage vermeil, 4+6 d
Eut précédé les roses de l'Aurore, 4+6 l
390 Quand dans le ciel on attelait encore 4+6 l
Les beaux coursiers que conduit le Soleil, 4+6 d
Le roi, Bonneau, Dunois, et la Pucelle, 4+6 f
Allègrement se remirent en selle, 4+6 f
Pour découvrir ce superbe palais. 4+6 c
395 Charles disait : « Voyons d'abord ma belle ; 4+6 f
Nous rejoindrons assez tôt les Anglais ; 4+6 c
Le plus pressé, c'est de vivre avec elle. » 4+6 f
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