Métrique en Ligne
a voyelle stable
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e "e" féminin
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e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
VOL_2/VOL34
VOLTAIRE
(François-Marie Arouet)
La Pucelle d'Orléans
1752
CHANT XIII
Argument
Sortie du château de Cutendre. Combat de la Pucelle et de Jean Chandos : étrange loi du combat à laquelle la Pucelle est soumise. Vision du père Bonifoux. Miracle qui sauve l'honneur de Jeanne.
C'était le tempsde la saison brillante, 4+6 a
Quand le soleilaux bornes de son cours 4+6 b
Prend sur les nuitspour ajouter aux jours, 4+6 b
Et se plaisant,dans sa démarche lente, 4+6 a
5 A contemplernos fortunés climats, 4+6 a
Vers le tropiquearrête encor ses pas. 4+6 a
O grand saint Jean !c'était alors ta fête ; 4+6 a
Premier des Jeans,orateur des déserts, 4+6 b
Toi qui criaisjadis à pleine tête : 4+6 a
10 « Que du salutles chemins soient ouverts ; 4+6 b
Grand précurseur,je t'aime, je te sers. 4+6 b
Un autre Jeaneut la bonne fortune 4+6 a
De voyagerau pays de la lune 4+6 a
Avec Astolphe,et rendit la raison, 4+6 a
15 Si l'on en croitun auteur véridique, 4+6 b
Au paladinamoureux d'Angélique : 4+6 b
Rends-moi la mienne,ô Jean, second du nom ! 4+6 a
Tu protégeasce chantre aimable et rare 4+6 a
Qui réjouitles seigneurs de Ferrare 4+6 a
20 Par le tissude ses contes plaisants ; 4+6 a
Tu pardonnasaux vives apostrophes 4+6 b
Qu'il t'adressadans ses comiques strophes : 4+6 b
Étends sur moites secours bienfaisants ; 4+6 a
J'en ai besoin,car tu sais que les gens 4+6 a
25 Sont bien plus sotset bien moins indulgents 4+6 a
Qu'on ne l'étaitau siècle du génie, 4+6 a
Quand l'Ariosteillustrait l'Italie. 4+6 a
Protège-moicontre ces durs esprits, 4+6 a
Frondeurs pesantsde mes légers écrits. 4+6 a
30 Si quelquefoisl'innocent badinage 4+6 a
Vient en riantégayer mon ouvrage, 4+6 a
Quand il le fautje suis très-sérieux ; 4+6 a
Mais je voudraisn'être point ennuyeux. 4+6 a
Conduis ma plume,et surtout daigne faire 4+6 a
35 Mes complimentsà Denys ton confrère. 4+6 a
 En accourant,la fière Jeanne d'Arc 4+6 a
D'une lucarneapeut dans le parc 4+6 a
Cent palefrois,une brillante troupe 4+6 a
De chevaliersportant dames en croupe, 4+6 a
40 Et d'écuyersqui tenaient dans leurs mains 4+6 a
Tout l'attiraildes combats inhumains, 4+6 a
Cent boucliers des nuits la courrière 4+6 a
Réfléchissaitsa tremblante lumière ; 4+6 a
Cent casques d'ord'aigrettes ombragés, 4+6 a
45 Et les longs boisd'un fer pointu chargés, 4+6 a
Et des rubansdont les touffes dorées 4+6 a
Pendaient au boutdes lances acérées. 4+6 a
Voyant cela,Jeanne crut fermement 4+6 a
Que les Anglaisavaient surpris Cutendre : 4+6 b
50 Mais Jeanne d'Arcse trompa lourdement. 4+6 a
En fait de guerreon peut bien se méprendre, 4+6 b
Ainsi qu'ailleurs :mal voir et mal entendre 4+6 b
De l'héroïneétait souvent le cas, 4+6 a
Et saint Denysne l'en corrigea pas. 4+6 a
55  Ce n'étaient pointdes enfants d'Angleterre, 4+6 a
Qui de Cutendreavaient surpris la terre ; 4+6 a
C'est ce Dunoisde Milan revenu, 4+6 a
Ce grand Dunoisà Jeanne si connu ; 4+6 a
C'est La Trimouilleavec sa Dorothée. 4+6 a
60 Elle était d'aiseet d'amour transportée ; 4+6 a
Elle en avaitsujet assurément : 4+6 a
Elle voyageavec son cher amant, 4+6 a
Ce cher amant,ce tendre La Trimouille, 4+6 a
Que l'honneur guideet que l'amour chatouille. 4+6 a
65 Elle le suittoujours avec honneur, 4+6 a
Et ne craint plusmonsieur l'inquisiteur. 4+6 a
 En nombre paircette troupe dorée 4+6 a
Dans le château,la nuit, était entrée. 4+6 a
Jeanne y vola :le bon roi, qui la vit, 4+6 a
70 Crut qu'elle allaitcombattre, et la suivit ; 4+6 a
Et dans l'erreurqui trompait son courage, 4+6 a
Il laisse encorAgnès avec son page. 4+6 a
 O page heureux,et plus heureux cent fois 4+6 a
Que le plus grand,le plus chrétien des rois 4+6 a
75 Que de bon cœuralors tu rendis grâce 4+6 a
Au bent saintdont tu tenais la place ! 4+6 a
Il te fallutrhabiller promptement ; 4+6 a
Tu rajustasta trousse diaprée ; 4+6 b
Agnès t'aidaitd'une main timorée, 4+6 b
80 Qui s'égaraitet se trompait souvent. 4+6 a
Que de baiserssur sa bouche de rose 4+6 a
Elle reçuten rhabillant Monrose ! 4+6 a
Que son bel œil,le voyant rajusté, 4+6 a
Semblait encorchercher la volupté ! 4+6 a
85 Monrose au parcdescendit sans rien dire. 4+6 a
Le confesseurtout saintement soupire, 4+6 a
Voyant passerce beau jeune gaon, 4+6 a
Qui lui donnaitde la distraction. 4+6 a
 La douce Agnèscomposa son visage, 4+6 a
90 Ses yeux, son air,son maintien, son langage. 4+6 a
Auprès du roiBonifoux se rendit, 4+6 a
Le consola,le rassura, lui dit 4+6 a
Que dans la nicheun envoyé céleste 4+6 a
Était d'en hautvenu pour annoncer 4+6 b
95 Que des Anglaisla puissance funeste 4+6 a
Touchait au terme,et que tout doit passer ; 4+6 b
Que le roi Charleobtiendrait la victoire. 4+6 a
Charles le crut,car il aimait à croire. 4+6 a
La fière Jeanneappuya ce discours. 4+6 a
100 « Du ciel, dit-elle,acceptons le secours ; 4+6 a
Venez, grand prince,et rejoignons l'armée, 4+6 a
De votre absenceà bon droit alarmée. » 4+6 a
 Sans balancer,La Trimouille et Dunois 4+6 a
De cet avisfurent à haute voix. 4+6 a
105 Par ce hérosla belle Dorothée 4+6 a
Honnêtementau roi fut présentée. 4+6 a
Agnès la baise,et le noble escadron 4+6 a
Sortit enfindu logis du baron. 4+6 a
 Le juste cielaime souvent à rire 4+6 a
110 Des passionsdu sublunaire empire. 4+6 a
Il regardaitcheminer dans les champs 4+6 a
Cet escadronde héros et d'amants. 4+6 a
Le roi de Franceallait près de sa belle, 4+6 a
Qui, s'effoantd'être toujours fidèle, 4+6 a
115 Sur son chevalla main lui présentait, 4+6 a
Serrait la sienne,exhalait sa tendresse, 4+6 b
Et cependant,ô comble de faiblesse ! 4+6 b
De temps en tempsle beau page lorgnait. 4+6 a
Le confesseurpsalmodiant suivait, 4+6 a
120 Des voyageursrécitait la prière, 4+6 b
S'interrompaiten voyant tant d'attraits, 4+6 a
Et regardaitavec des yeux distraits 4+6 a
Le roi, le page,Agnès, et son bréviaire. 4+6 b
Tout brillant d'or,et le cœur plein d'amour, 4+6 a
125 Ce La Trimouille,ornement de la cour, 4+6 a
Caracolaitauprès de Dorothée 4+6 a
Ivre de joie,et d'amour transportée, 4+6 a
Qui le nommaitson cher libérateur, 4+6 a
Son cher amant,l'idole de son cœur. 4+6 a
130 Il lui disait :« Je veux, après la guerre, 4+6 a
Vivre à mon aiseavec vous dans ma terre 4+6 a
O cher objet,dont je suis toujours fou ! 4+6 a
Quand serons-noustous les deux en Poitou ? » 4+6 a
 Jeanne auprès d'eux,ce fier soutien du trône, 4+6 a
135 Portant corsetet jupon d'amazone, 4+6 a
Le chef ornéd'un petit chapeau vert, 4+6 a
Enrichi d'oret de plumes couvert, 4+6 a
Sur son fier âneétalait ses gros charmes, 4+6 a
Parlait au roi,courait, allait le pas, 4+6 b
140 Se rengorgeaitet soupirait tout bas 4+6 b
Pour le Dunoiscompagnon de ses armes : 4+6 a
Car elle avaittoujours le cœur ému, 4+6 a
Se souvenantde l'avoir vu tout nu. 4+6 a
 Bonneau, portantbarbe de patriarche, 4+6 a
145 Suant, soufflant,Bonneau fermait la marche. 4+6 a
O d'un grand roiserviteur précieux ! 4+6 a
Il pense à tout ;il a soin de conduire 4+6 b
Deux gros muletstout chargés de vin vieux, 4+6 a
Longs saucissons,pâtés délicieux, 4+6 a
150 Jambons, poulets,ou cuits ou prêts à cuire. 4+6 b
 On avançait,alors que Jean Chandos, 4+6 a
Cherchant partoutson Agnès et son page, 4+6 b
Au coin d'un bois,près d'un certain passage, 4+6 b
Le fer en mainrencontra nos héros. 4+6 a
155 Chandos avaitune suite assez belle 4+6 a
De fiers Bretons,pareille en nombre à celle 4+6 a
Qui suit les pasdu monarque amoureux ; 4+6 a
Mais elle étaitd'espèce différente, 4+6 b
On n'y voyaitni tetons ni beaux yeux. 4+6 a
160 « Oh ! oh ! dit-ild'une voix menaçante, 4+6 b
Galants Français,objet de mon courroux, 4+6 a
Vous aurez donctrois filles avec vous, 4+6 a
Et moi, Chandos,je n'en aurai pas une ? 4+6 a
Çà, combattons :je veux que la fortune 4+6 a
165 Décide iciqui sait le mieux de nous 4+6 a
Mettre à plaisirses ennemis dessous, 4+6 a
Frapper d'estocet pointer de sa lance. 4+6 a
Que de vous tousle plus ferme s'avance, 4+6 a
Qu'on entre en lice ;et celui qui vaincra 4+6 a
170 L'une des troisà son aise tiendra. » 4+6 a
 Le roi, piquéde cette offre cynique, 4+6 a
Veut l'en punir,s'avance, prend sa pique. 4+6 a
Dunois lui dit :« Ah ! laissez-moi, seigneur, 4+6 a
Venger mon princeet des dames l'honneur. » 4+6 a
175 Il dit et court :La Trimouille l'arrête ; 4+6 a
Chacun prétendà l'honneur de la fête. 4+6 a
L'ami Bonneau,toujours de bon accord, 4+6 a
Leur proposade s'en remettre au sort. 4+6 a
Car c'est ainsique les guerriers antiques 4+6 a
180 En ont usédans les temps héroïques : 4+6 a
Même aujourd'huidans quelques républiques 4+6 a
Plus d'un emploi,plus d'un rang glorieux, 4+6 a
Se tire au dés,et tout en va bien mieux. 4+6 a
Si j'osais mêmeen cette noble histoire 4+6 a
185 Citer des gensque tout mortel doit croire, 4+6 a
Je vous diraisque monsieur saint Mathias 4+6 a
Obtint ainsila place de Judas. 4+6 a
Le gros Bonneautient le cornet, soupire, 4+6 a
Craint pour son roi,prend les dés, roule, tire. 4+6 a
190 Denys, du hautdu céleste rempart, 4+6 a
Voyait le toutd'un paternel regard ; 4+6 a
Et, contemplantla Pucelle et son âne, 4+6 b
Il conduisaitce qu'on nomme hasard. 4+6 a
Il fut heureux,le sort échut à Jeanne. 4+6 b
195 Jeanne, c'étaitpour vous faire oublier 4+6 a
L'infâme jeude ce grand cordelier, 4+6 a
Qui ci-devantavait raflé vos charmes. 4+6 a
 Jeanne à l'instantcourt au roi, court aux armes, 4+6 a
Modestementva derrière un buisson 4+6 a
200 Se délacer,détacher son jupon, 4+6 a
Et revêtirson armure sacrée, 4+6 a
Qu'un écuyertient déjà préparée ; 4+6 a
Puis sur son âneelle monte en courroux, 4+6 a
Branlant sa lance,et serrant les genoux : 4+6 a
205 Elle invoquaitles onze mille belles, 4+6 a
Du pucelagehéroïnes fidèles. 4+6 a
Pour Jean Chandos,cet indigne chrétien, 4+6 a
Dans les combatsn'invoquait jamais rien. 4+6 a
 Jean contre Jeanneavec fureur avance : 4+6 a
210 Des deux côtéségale est la vaillance ; 4+6 a
Âne et cheval,bardés, coiffés de fer, 4+6 a
Sous l'éperonpartent comme un éclair, 4+6 a
Vont se heurter,et de leur tête dure 4+6 a
Front contre frontfracassent leur armure ; 4+6 a
215 La flamme en sort,et le sang du coursier 4+6 a
Teint les éclatsdu voltigeant acier. 4+6 a
Du choc affreuxles échos retentissent ; 4+6 a
Des deux coursiersles huit pieds rejaillissent ; 4+6 a
Et les guerriers,du coup désarçonnés, 4+6 a
220 Tombent chacunsur la croupe étonnés : 4+6 a
Ainsi qu'on voitdeux boules suspendues 4+6 a
Aux bouts égauxde deux cordes tendues, 4+6 a
Dans une courbeau même instant partir, 4+6 a
Hâter leur cours,se heurter, s'aplatir, 4+6 a
225 Et remontersous le choc qui les presse, 4+6 a
Multipliantleur poids par leur vitesse. 4+6 a
Chaque particrut morts les deux coursiers, 4+6 a
Et tressaillitpour les deux chevaliers. 4+6 a
 Or des Françaisla championne auguste 4+6 a
230 N'avait la chairsi ferme, si robuste, 4+6 a
Les os si durs,les membres si dispos, 4+6 a
Si musculeuxque le fier Jean Chandos. 4+6 a
Son équilibreayant dans cette rixe 4+6 a
Abandonnésa ligne et son point fixe, 4+6 a
235 Son quadrupèdeun haut-le-corps lui fit, 4+6 a
Qui dans le préJeanne d'Arc étendit, 4+6 a
Sur son beau dos,sur sa cuisse gentille, 4+6 a
Et comme il fautque tombe toute fille. 4+6 a
 Chandos pensaitqu'en ce grand désarroi 4+6 a
240 Il avait misou Dunois ou le roi ; 4+6 a
Il veut soudaincontempler sa conquête : 4+6 a
Le casque ôté,Chandos voit une tête 4+6 a
languissaientdeux grands yeux noirs et longs. 4+6 a
De la cuirasseil défait les cordons ; 4+6 a
245 Il voit (ô ciel !ô plaisir ! ô merveille !) 4+6 a
Deux gros tetonsde figure pareille, 4+6 a
Unis, polis,séparés, demi-ronds, 4+6 b
Et surmontésde deux petits boutons, 4+6 b
Qu'en sa naissancea la rose merveille. 4+6 a
250 On tient qu'alors,en élevant la voix, 4+6 a
Il bénit Dieupour la première fois. 4+6 a
« Elle est à moi,la Pucelle de France ! 4+6 a
S'écria-t-il ;contentons ma vengeance. 4+6 a
J'ai, grâce au ciel,doublement mérité 4+6 a
255 De mettre à bascette fière beauté. 4+6 a
Que saint Denysme regarde et m'accuse ; 4+6 a
Mars et l'Amoursont mes droits, et j'en use. » 4+6 a
 Son écuyerdisait : « Poussez, milord ; 4+6 a
Du trône anglaisaffermissez le sort. 4+6 a
260 Frère Lourdisen vain nous décourage ; 4+6 a
Il jure en vainque ce saint pucelage 4+6 a
Est des Troyensle grand palladium, 4+6 a
Le boucliersacré du Latium ; 4+6 a
De la victoireil est, dit-il, le gage ; 4+6 a
265 C'est l'oriflamme ;il faut vous en saisir. 4+6 b
— Oui, dit Chandos,et j'aurai pour partage 4+6 a
Les plus grands biens,la gloire et le plaisir. » 4+6 b
 Jeanne pâméeécoutait ce langage 4+6 a
Avec horreur,et faisait mille vœux 4+6 a
270 A saint Denys,ne pouvant faire mieux. 4+6 a
Le grand Dunois,d'un courage héroïque, 4+6 a
Veut empêcherle triomphe impudique : 4+6 a
Mais comment faire ?Il faut dans tout état 4+6 a
Qu'on se soumetteà la loi du combat. 4+6 a
275 Les fers en l'airet la tête penchée, 4+6 a
L'oreille basseet du choc écorchée, 4+6 a
Languissammentle céleste baudet 4+6 a
D'un œil confusJean Chandos regardait. 4+6 a
Il nourrissaitdès longtemps dans son âme 4+6 a
280 Pour la Pucelleune discrète flamme, 4+6 a
Des sentimentsnobles et délicats 4+6 a
Très-peu connusdes ânes d'ici-bas. 4+6 a
 Le confesseurdu bon monarque Charle 4+6 a
Tremble en sa chairalors que Chandos parle. 4+6 a
285 Il craint surtoutque son cher pénitent, 4+6 a
Pour soutenirla gloire de la France, 4+6 b
Qu'on avilitavec tant d'impudence, 4+6 b
A son Agnèsn'en veuille faire autant ; 4+6 a
Et que la choseencor soit imitée 4+6 a
290 Par La Trimouilleet par sa Dorothée. 4+6 a
Au pied d'un chêneil entre en oraison, 4+6 a
Et fait tout bassa méditation 4+6 a
Sur les effets,la cause, la nature 4+6 a
Du doux péchéqu'aucuns nomment luxure. 4+6 a
295  En méditantavec attention, 4+6 a
Le bent moineeut une vision 4+6 a
Assez semblableau prophétique songe 4+6 a
De ce Jacob,heureux par un mensonge, 4+6 a
Pate-peludont l'esprit lucratif 4+6 a
300 Avait venduses lentilles en Juif. 4+6 a
Ce vieux Jacob(ô sublime mystère !) 4+6 a
Devers l'Euphrateune nuit apeut 4+6 b
Mille béliersqui grimpèrent en rut 4+6 b
Sur des brebisqui les laissèrent faire. 4+6 a
305 Le moine vitde plus plaisants objets ; 4+6 a
Il vit courirà la même aventure, 4+6 b
Tous les hérosde la race future. 4+6 b
Il observaitles différents attraits 4+6 a
De ces beautésqui, dans leur douce guerre, 4+6 a
310 Donnent des fersaux mtres de la terre. 4+6 a
Chacune étaitauprès de son héros, 4+6 a
Et l'enchnaitdes chnes de Paphos. 4+6 a
Tels, au retourde Flore et de Zéphyre, 4+6 a
Quand le printempsreprend son doux empire, 4+6 a
315 Tous ces oiseaux,peints de mille couleurs, 4+6 a
Par leurs amoursagitent les feuillages : 4+6 b
Les papillonsse baisent sur les fleurs, 4+6 a
Et les lionscourent sous les ombrages 4+6 b
A leurs moitiésqui ne sont plus sauvages. 4+6 b
320  C'est-là qu'il vitle beau François premier. 4+6 a
Ce brave roi,ce loyal chevalier, 4+6 a
Avec Étampeheureusement oublie 4+6 a
Les autres fersqu'il reçut à Pavie. 4+6 a
Là Charles-Quintjoint le myrte au laurier, 4+6 a
325 Sert à la foisla Flamande et la Maure. 4+6 b
Quels rois, ô ciel !l'un à ce beau métier 4+6 a
Gagne la goutte,et l'autre pis encore. 4+6 b
Près de Dianeon voir danser les Ris, 4+6 a
Aux mouvementsque l'Amour lui fait faire 4+6 b
330 Quand dans ses brastendrement elle serre, 4+6 b
En se pâmant,le second des Henris. 4+6 a
De Charles neufle successeur volage, 4+6 c
Quitte en riantsa Chloris pour un page, 4+6 c
Sans s'alarmerdes troubles de Paris. 4+6 a
335  Mais quels combatsle jacobin vit rendre 4+6 a
Par Borgiale sixième Alexandre ! 4+6 a
En cent tableauxil est représenté : 4+6 a
Là sans tiare,et d'amour transporté : 4+6 a
Tournant le dos,troussant sa soutanelle, 4+6 b
340 Avec Vanozeil se fait sa femelle ; 4+6 b
Un peu plus bason voit Sa Sainteté 4+6 a
Pour ses plaisirsconvoitant sa famille, 4+6 a
Qui s'attendritpour Lucrèce sa fille. 4+6 a
O Léon dix !ô sublime Paul trois ! 4+6 a
345 A ce beau jeuvous passiez tous les rois ; 4+6 a
Mais vous cédezà mon grand Béarnois, 4+6 a
A ce vainqueurde la Ligue rebelle, 4+6 b
A mon hérosplus connu mille fois 4+6 a
Par les plaisirsque gta Gabrielle, 4+6 b
350 Que par vingt ansde travaux et d'exploits. 4+6 a
 Bientôt on voitle plus beau des spectacles, 4+6 a
Ce siècle heureux,ce siècle des miracles, 4+6 a
Ce grand Louis,cette superbe cour 4+6 a
tous les artssont instruits par l'Amour. 4+6 a
355 L'Amour bâtitle superbe Versailles ; 4+6 a
L'Amour, aux yeuxdes peuples éblouis, 4+6 b
D'un lit de fleursfait un trône à Louis : 4+6 b
Malgré les crisdu fier dieu des batailles, 4+6 a
L'Amour amèneau plus beau des humains 4+6 a
360 De cette courles rivales charmantes, 4+6 b
Toutes en feu,toutes impatientes : 4+6 b
De Mazarinla nièce aux yeux divins, 4+6 a
La généreuseet tendre la Vallière, 4+6 a
La Montespanplus ardente et plus fière. 4+6 a
365 L'une se livreau moment de jouir, 4+6 a
Et l'autre attendle moment du plaisir. 4+6 a
 Voici le tempsde l'aimable Régence, 4+6 a
Temps fortuné,marqué par la licence, 4+6 a
la Folie,agitant son grelot, 4+6 a
370 D'un pied légerparcourt toute la France, 4+6 b
nul mortelne daigne être dévot, 4+6 a
l'on fait toutexcepté pénitence. 4+6 b
 Le bon Régent,de son Palais-Royal, 4+6 a
Des voluptésdonne à tous le signal. 4+6 a
375 Vous répondezà ce signal aimable, 4+6 a
Jeune Daphné,bel astre de la cour ; 4+6 b
Vous répondezdu sein du Luxembourg, 4+6 b
Vous que Bacchuset le dieu de la table 4+6 a
Mènent au lit,escortés par l'Amour. 4+6 b
380 Mais je m'arrête,et de ce dernier âge 4+6 a
Je n'ose en verstracer la vive image : 4+6 a
Trop de périlsuit ce charme flatteur. 4+6 a
Le temps présentest l'Arche du Seigneur : 4+6 a
Qui la touchaitd'une main trop hardie, 4+6 a
385 Puni du ciel,tombait en léthargie. 4+6 a
Je me tairai ;mais si j'osais pourtant, 4+6 a
O des beautésaujourd'hui la plus belle ! 4+6 b
O tendre objet,noble, simple, touchant, 4+6 a
Et plus qu'Agnèsgénéreuse et fidèle ! 4+6 b
390 Si j'osais mettreà vos genoux charnus 4+6 a
Ce grain d'encensque l'on doit à Vénus ; 4+6 a
Si de l'Amourje déployais les armes ; 4+6 a
Si je chantaisce tendre et doux lien ; 4+6 b
Si je disais…Non, je ne dirai rien : 4+6 b
395 Je serais tropau-dessous de vos charmes. 4+6 a
 Dans son extaseenfin le moine noir 4+6 a
Vit à plaisirce que je n'ose voir. 4+6 a
D'un œil avide,et toujours très-modeste, 4+6 a
Il contemplaitle spectacle céleste 4+6 a
400 De ces beautés,de ces nobles amants, 4+6 a
De ces plaisirsdéfendus et charmants. 4+6 a
« Hélas ! dit-il,si les grands de la terre 4+6 a
Font deux à deuxcette éternelle guerre ; 4+6 a
Si l'universdoit en passer par là, 4+6 a
405 Dois-je gémirque Jean Chandos se mette 4+6 b
A deux genouxauprès de sa brunette ? 4+6 b
Du seigneur Dieula volonté soit faite : 4+6 b
Amen, amen.» Il dit, et se pâma, 4+6 a
Croyant jouirde tout ce qu'il voit là. 4+6 a
410  Mais saint Denysétait loin de permettre 4+6 a
Qu'aux yeux du cielJean Chandos allât mettre 4+6 a
Et la Pucelleet la France aux abois. 4+6 a
Ami lecteur,vous avez quelquefois 4+6 a
Ouï conterqu'on nouait l'aiguillette. 4+6 a
415 C'est une étrangeet terrible recette, 4+6 a
Et dont un saintne doit jamais user 4+6 a
Que quand d'une autreil ne peut s'aviser. 4+6 a
D'un pauvre amantle feu se tourne en glace ; 4+6 a
Vif et perclussans rien faire il se lasse ; 4+6 a
420 Dans ses effortsétonné de languir, 4+6 a
Et consumésur le bord du plaisir. 4+6 a
Telle une fleur,des feux du jour séchée, 4+6 a
La tête basseet la tige penchée, 4+6 a
Demande en vainles humides vapeurs 4+6 a
425 Qui lui rendaientla vie et les couleurs. 4+6 a
Voilà commentle bon Denys arrête 4+6 a
Le fier Anglaisdans ses droits de conquête. 4+6 a
 Jeanne, échappantà son vainqueur confus, 4+6 a
Reprend ses sensquand il les a perdus ; 4+6 a
430 Puis d'une voiximposante et terrible, 4+6 a
Elle lui dit :« Tu n'es pas invincible : 4+6 a
Tu vois qu'ici,dans le plus grand combat, 4+6 a
Dieu t'abandonne,et ton cheval s'abat ; 4+6 a
Dans l'autre un jourje vengerai la France, 4+6 a
435 Denys le veut,et j'en ai l'assurance ; 4+6 a
Et je te donneavec tes combattants 4+6 a
Un rendez-voussous les murs d'Orléans. » 4+6 a
Le grand Chandoslui repartit : « Ma belle, 4+6 a
Vous m'y verrez ;pucelle ou non pucelle, 4+6 a
440 J'aurai pour moisaint George le très-fort, 4+6 a
Et je prometsde réparer mon tort. » 4+6 a
mètre profil métrique : 4+6
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