LE BAISER DE L'ALSACIENNE |
Dit par M. Delaunay de la Comédie Française |
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Le soleil de Juillet illuminait l' Alsace. |
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Les appels du clairon éclataient dans l'espace… |
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Tout le jour, défilaient, en chantant, pleins d 'entrain, |
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Des régiments français s'en allant vers le Rhin… |
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Sur la place publique, auprès de la fontaine, |
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De son regard rêveur une jeune Alsacienne |
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Depuis un long moment suivait avec amour |
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Les zouaves préparant leur campement d'un jour : |
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Quand l'un d'eux, un sergent à la mine éveillée, |
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Se dirigea vers la fontaine ensoleillée : |
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— Dites, la belle enfant, fit-il, portant la main |
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A son turban tout gris des poudres du chemin, |
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D'un peu d 'eau, s'il vous plait, me ferez-vous la grâce ? |
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A cette question la blonde enfant d'Alsace |
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Sourit et lui tendit son vase : |
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Sourit et lui tendit son vase : « Assurément, |
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Dit-elle, j'en aurais pour tout le régiment. |
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Buvez sans crainte l'eau de la source française, |
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Buvez, petit sergent, buvez tout à votre aise ! » |
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Mais quoiqu'elle insistât le sergent ne but pas, |
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Et les yeux dans ses yeux, il ajouta plus bas : |
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« Non, vous d'abord, buvez… Ma soif n'est pas pressée… |
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Buvez ! Je voudrais tant savoir votre pensée ! » |
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Riant de son caprice, elle but lentement |
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Et de nouveau lui dit : — Buvez donc maintenant… |
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Il étancha sa soif, il but avec ivresse |
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Et puis la regardant soudain avec tendresse : |
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« Je ne sais rien, dit-il, de ce que vous pensez ; |
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Mais si vous permettez, voilà ce que je sais. |
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Je voudrais bien, avant d' affronter la bataille, |
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Pouvoir dans mes dix doigts enlacer votre taille, |
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Et vous prendre un baiser, un seul, là, mais bien doux ! |
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Dites , la belle enfant, dites, permettez-vous ! » |
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Elle se défendit : C 'est un peu trop d'audace, |
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Dit-elle en souriant, pour un sergent qui passe ! |
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Nos garçons ne vont pas si vite par ici… |
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Bah ! c'est qu'on est pressée, dit-il, riant aussi… |
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Et puis… , voilà je suis parisien ! |
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Et puis… , voilà je suis parisien !L' Alsacienne |
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Mais vous êtes français, dit-elle, c'est assez ! |
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Je sens que tout en moi frémit quand vous passez… |
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Faites votre devoir, marchez à la victoire… |
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Et moi, je vous promets, et vous pouvez m'en croire, |
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Si loin que le combat puisse entrainer vos pas, |
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Qu 'au retour mon baiser ne vous manquera pas. » |
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Le sergent s'éloigna rêveur. Cette fillette |
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A la parole grave avait troublé sa tête… |
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Il n 'avait qu'un désir, lui parler, la revoir… |
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Sous sa fenêtre, il vint encor rêver le soir ; |
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Quand le clairon sonna le départ à l'aurore, |
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En repliant sa tente, il rêvait d'elle encore… |
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Mais comme il s'éloignait, suivant le régiment, |
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Soudain elle apparut, souriant doucement |
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Et de vergiss-mein-nicht lui jetant une gerbe, |
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Elle semblait lui dire en un geste superbe : |
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« Va ! sergent ! souviens-toi ! moi je me souviendrai ! |
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Mérite mon baiser, je te l'apporterai ! » |
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Wissembourg ! Wissembourg ! L'Allemagne insolent |
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Pourra nous reprocher cette tache sanglante ! |
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Lorsqu'à vingt allemands tout le jour un français |
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Tient tête, sans faiblir, c'est encor le succès. |
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Furent-ils des vainqueurs ces soldats qui dans l'ombre, |
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Foudroyaient à coup sûr, confiants dans leur nombre ! |
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Non ! le vainqueur du jour, ce fut ce beau martyr, |
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Douai, qui ne pouvant plus vaincre, sut mourir… |
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Ce furent ces héros, luttant cent contre mille, |
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Qui sans espoir, sachant tout effort inutile, |
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S' en allèrent, le rire aux dents, sous le drapeau, |
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Dans les rangs allemands se creuser un tombeau ! |
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Wissembourg ! Wissembourg ! Laisse donc l'Allemagne |
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Célébrer ce début de l'horrible campagne : |
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Les tombes des héros fleuriront, quelque-jour, |
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Et les vaincus auront la victoire à leur tour ! |
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C'est fini. La journée, hélas ! est consommée, |
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Les cadavres sanglants de tout un corps d'armée |
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Dans des ruisseaux de sang sommeillent pour jamais |
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Et Wissembourg n'est plus qu'un cercueil désormais. |
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La ferme où tout riait la veille est morne et sombre, |
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Et ses vieux murs troués par des boulets sans nombre, |
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Ouverts comme une porte immense jusqu'au toit, |
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Semblent dire la mort : Entre comme chez toi ! |
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Le vieux moulin s'est tû. Son aile pend meurtrie, |
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Et du ruisseau qui court à travers la prairie, |
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Le sang a coloré l'eau si pure jadis. |
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Sur sa rive, parmi les doux myosotis |
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Sous le grand saule où le soleil couchant se joue, |
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La poitrine sanglante et la mort à la joue |
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Le sergent agonise. Il a fait son devoir |
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Et payé son tribut à l'affreux désespoir. |
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Au moment d 'expirer, il ouvre sa tunique : |
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Sa main y cherche encor une chère relique, |
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Les fleurs de l'Alsacienne. Hélas ! il espérait |
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Dans ce doux souvenir. Sans rien dire, en secret, |
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Avant de s'élancer dans la mêlée horrible, |
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Il pensait en son cœur : Non ! ce n'est pas possible ! |
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Je ne peux pas mourir ! Je garde cet espoir, |
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Elle me l'a promis et je dois la revoir ! |
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Pourtant il va mourir ! Sur ses lèvres glacées, |
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C'est vainement qu'il tient les chères fleurs pressées. |
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L'Alsacienne, échappant à son rêve éperdu, |
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Ne vient pas lui donner le baiser attendu… |
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Tout à coup un appel a frappé son oreille… |
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Aux portes de la mort le mourant se réveille |
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Quelqu'un vient… Une voix soupire en le nommant : |
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« O Dieu ! permettez-moi de tenir mon serment ! » |
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C'est elle… Elle le cherche… Elle approche… Elle arrive, |
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Un noir pressentiment lui fait suivre la rive |
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Où les vergiss-mein-nicht ouvrent leurs doux yeux bleus. |
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Soudain elle le voit, il est là, sous ses yeux, |
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Sanglant, expirant, mort… Un suprême sourire |
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Sur sa lèvre glacée erre et semble lui dire : |
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« J'attendais ton baiser… Oh ! pourquoi m'oublier ! » |
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L' Alsacienne en pleurant vient de s'agenouiller, |
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Elle lave le sang qui coule des blessures, |
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Mais en vain sa douleur se répand en murmures, |
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En vain sa douce voix s'épuise à répéter : |
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« C'est moi ! c'est mon baiser que je viens t'apporter ! » |
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Le petit sergent dort dans la paix éternelle. |
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Alors, d'un long baiser l'alsacienne fidèle |
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Ferme ses yeux éteints, et puis, se redressant, |
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Frémissante, la lèvre encor rouge de sang : |
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« Prussiens ! souvenez-vous comme moi, cria-t-elle, |
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Vous venez de sceller l'union immortelle. |
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De cet hymen sanglant la haine doit germer, |
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Et je vous hais autant que j'aurais dû l'aimer ! » |
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Sur la place publique, auprès de la fontaine |
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On voit depuis ce jour revenir l'Alsacienne, |
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Ses cheveux blonds noués d'un large ruban noir… |
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Sur son front est écrit : Je suis le désespoir ! |
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Là-bas, les paysans qui savent son épreuve, |
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La saluant bien bas, murmurent : C 'est la veuve ! |
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Les prussiens ont tué son sergent, et depuis, |
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Vouée à sa vengeance, elle attend près du puits |
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Des régiments français la prochaine arrivée… |
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Ah ! sonne, heure bénie ! heure ardemment rêvée ! |
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Soleil de la revanche, éclate au fond des cieux ! |
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Debout, français ! frappons sans pitié, furieux, |
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Et qu'aux veuves en deuil rendant enfin justice, |
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Chaque puits Alsacien de sang prussien s 'emplisse ! |
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