Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
VIV_5/VIV167
Renée VIVIEN
À l'heure des mains jointes
1906
PSAPPHA REVIT
La lune se levait autrefois à Lesbos 6+6 a
Sur le verger nocturne où veillaient les amantes. 6+6 b
L’amour rassasié montait des eaux dormantes 6+6 b
Et sanglotait au cœur profond du sarbitos. 6+6 a
5 Psappha ceignait son front d’auguste violettes 6+6 a
Et célébrait l’Érôs qui s’abat comme un vent 6+6 b
Sur les chênes… Atthis l’écoutait en rêvant, 6+6 b
Et la torche avivait l’éclat des bandelettes. 6+6 a
Les rives flamboyaient, blondes sous les pois d’or… 6+6 a
10 Les vierges enseignaient aux belles étrangères 6+6 b
Combien l’ombre est propice aux caresses légères, 6+6 b
Et le ciel et la mer déployaient leur décor. 6+6 a
… Certaines d’entre nous ont conservé les rites 6+6 a
De ce brûlant Lesbos doré comme un autel. 6+6 b
15 Nous savons que l’amour est puissant et cruel, 6+6 b
Et nos amantes ont les pieds blancs des Kharites. 6+6 a
Nos corps sont pour leur corps un fraternel miroir. 6+6 a
Nos compagnes, aux seins de neige printanière, 6+6 b
Savent de quelle étrange et suave manière 6+6 b
20 Psappha pliait naguère Atthis à son vouloir. 6+6 a
Nous adorons avec des candeurs infinies, 6+6 a
En l’émerveillement d’un enfant étonné 6+6 b
A qui l’or éternel des mondes fut donné… 6+6 b
Psappha revit, par la vertu des harmonies. 6−6 a
25 Nous savons effleurer d’un baiser de velours, 6+6 a
Et nous savons étreindre avec des fougues blêmes ; 6+6 b
Nos caresses sont nos mélodieux poèmes… 6−6 b
Notre amour est plus grand que toutes les amours. 6+6 a
Nous redisons ces mots de Psappha, quand nous sommes 6+6 a
30 Rêveuses sous un ciel illuminé d’argent : 6+6 b
« O belles, envers vous mon cœur n’est point changeant… » 6+6 b
Celles que nous aimons ont méprisé les hommes. 6+6 a
Nos lunaires baisers ont de pâles douceurs, 6+6 a
Nos doigts ne froissent point le duvet d’une joue, 6+6 b
35 Et nous pouvons, quand la ceinture se dénoue, 6−6 b
Être tout à la fois des amants et des sœurs. 6+6 a
Le désir est en nous moins fort que la tendresse. 6+6 a
Et cependant l’amour d’une enfant nous dompta 6+6 b
Selon la volonté de l’âpre Aphrodita, 6+6 b
40 Et chacune de nous demeure sa prêtresse. 6+6 a
Psappha revit et règne en nos corps frémissants ; 6+6 a
Comme elle, nous avons écouté la sirène, 6+6 b
Comme elle encore, nous avons l’âme sereine, 6−6 b
Nous qui n’entendons point l’insulte des passants. 6+6 a
45 Ferventes, nous prions : « Que la nuit soit doublée 6+6 a
Pour nous dont le baiser craint l’aurore, pour nous 6+6 b
Dont l’Érôs mortel a délié les genoux, 6+6 b
Qui sommes une chair éblouie et troublée… » 6+6 a
Et nos maîtresses ne sauraient nous décevoir, 6−6 a
50 Puisque c’est l’infini que nous aimons en elles… 6+6 b
Et puisque leurs baisers nous rendent éternelles, 6+6 b
Nous ne redoutons point l’oubli dans l’Hadès noir. 6+6 a
Ainsi, nous les chantons, l’âme sonore et pleine. 6+6 a
Nos jours sans impudeur, sans crainte ni remords, 6+6 b
55 Se déroulent, ainsi que de larges accords, 6+6 b
Et nous aimons, comme on aimait à Mytilène. 6−6 a
mètre profil métrique : 6−6
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