Métrique en Ligne
VIV_2/VIV49
Renée VIVIEN
Cendres et Poussières
1902
LA PLEUREUSE
Elle vend aux passants ses larmes mercenaires, 6+6 a
Comme d’autres l’encens et l’odeur des baisers. 6+6 b
L’amour ne brûle plus dans ses yeux apaisés 6+6 b
Et sa robe a le pli rigide des suaires. 6+6 a
5 Son deuil impartial, à l’heure des sommeils, 6+6 a
Gémit sur les Anciens aux paupières blêmies 6+6 b
Et sur le blanc repos des vierges endormies, 6+6 b
Avec la même angoisse et des gestes pareils. 6+6 a
Le vent des nuits d’hiver se lamente comme elle, 6+6 a
10 Pleurant sur les pervers et les purs tour à tour, 6+6 b
Car elle les confond dans un unique amour 6+6 b
Et verse à leur néant la douleur fraternelle. 6+6 a
Les jours n’apportent plus, dans leurs reflets mouvants, 6+6 a
Qu’un instant de parfum, de beauté, d’allégresse, 6+6 b
15 À son âme qu’un râle inexorable oppresse, 6+6 b
Lasse de la souffrance ardente des vivants. 6+6 a
Vers le soir, quand décroît l’odeur des ancolies 6+6 a
Et quand la luciole illumine les prés, 6+6 b
Elle s’étend parmi les morts qu’elle a pleurés, 6+6 b
20 Parmi les rois sanglants et les vierges pâlies. 6+6 a
Sous les pieux cyprès, tels des flambeaux éteints, 6+6 a
Elle vient partager leur couche désirable. 6+6 b
Et l’ombre sans regrets des sépulcres l’accable 6+6 b
De sanglots oubliés et de désirs atteints. 6+6 a
25 Elle y vient prolonger son rêve solitaire. 6+6 a
Ivre de vénustés et de vagues chaleurs, 6+6 b
Elle sent, le visage enfiévré par les fleurs, 6+6 b
D’anciennes voluptés sommeiller dans la terre. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite périodique
schéma : 7(abba)
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