Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
VIG_2/VIG37
Alfred de VIGNY
HÉLÉNA
1826
CHANT TROISIÈME
L'URNE
Cette urne que je tiens contient-elle sa cendre ?
O vous ! à ma douleur objet terrible et tendre,
Éternel entretien de haine et de pitié !
(CORNEILLE)
« Aux armes, fils d'Ottman, car de sa voix roulante 6+6 a
« Le tambour vous rappelle à la tâche sanglante. 6+6 a
« Le canon gronde encor sur le fort de Phylé. 6+6 b
« Le cœur des Giaours à ce bruit a tremblé, 6+6 b
5 « Sous leurs tombeaux détruits ils ont caché leur tête ; 6+6 a
« Mais le sabre courbé va sortir, et s'apprête 6+6 a
« A confondre bientôt leurs crânes révoltés 6+6 b
« Aux cendres des aïeux qui les ont exaltés. 6+6 b
« Poursuivons des vils Grecs le misérable reste, 6+6 a
10 « Abandonnez ces vins que Mahomet déteste, 6+6 a
« Et ces femmes en pleurs qui meurent dans les cris, 6+6 b
« Indignes des guerriers qu'attendent les houris ! » 6+6 b
Ainsi criait l'Émir, et dans sa main sanglante 6+6 a
S'agitait de Damas la lame étincelante ; 6+6 a
15 Son cheval bondissant écumait sous le mords, 6+6 b
Et ses fers indignés glissaient au sang des morts, 6+6 b
Quand le maître animait sa hennissante bouche, 6+6 a
Et d'un large étrier pressait le flanc farouche. 6+6 a
Éveillés à ses cris, ses soldats basanés 6+6 b
20 S'avancent d'un pas ivre et les yeux étonnés. 6+6 b
────────
Quand le tigre indolent sorti de sa mollesse, 6+6 a
De ses flancs tachetés déployant la souplesse, 6+6 a
A saisi dans ses bonds le chevreuil innocent, 6+6 b
Long-temps après sa mort il lèche encor son sang, 6+6 b
25 Il disperse sa chair d'un ongle plein de joie, 6+6 a
Roule en broyant les os et s'endort sur sa proie. 6+6 a
Non moins lâche et cruel, le Musulman trompeur 6+6 b
Se venge sur les morts d'avoir senti la peur ; 6+6 b
Il demande la paix, il l'obtient par la feinte ; 6+6 a
30 Puis, la tête ennemie, offerte à lui sans crainte, 6+6 a
Tombe, et lui sert de coupe à ce même festin 6+6 b
Qu'avait, pour le traité, préparé le matin. 6+6 b
En de telles horreurs Athène était plone, 6+6 a
Et tant de cris sortaient d'une foule égorgée, 6+6 a
35 Que, si j'osais conter d'une imprudente voix 6+6 b
Ces attentats, un jour le repentir des rois, 6+6 b
Le guerrier briserait son impuissante ée 6+6 a
Dans son élan vengeur par le devoir trome, 6+6 a
La mère, des chrétiens accusant la lenteur, 6+6 b
40 Regardant vers le seuil, sur un sein protecteur 6+6 b
Presserait son enfant ; et la vierge innocente 6+6 a
Cacherait dans ses mains sa tête rougissante. 6+6 a
Au bruit de la timbale et des clairons d'airain 6+6 b
Les coursiers se cabrant font résonner le frein ; 6+6 b
45 Leurs fronts jettent l'écume et leurs pieds la poussière, 6+6 a
Du sultan de Stamboul élevant la bannière 6+6 a
Le Pacha vient, on part. Les Spahis en marchant 6+6 b
Règlent leur pas sonore aux mots sacrés du chant ; 6+6 b
Allah prépare leur défaite ; 8 a
50 Priez, chantez : Dieu seul est Dieu, 8 b
Et Mahomet est son Prophète. 8 a
Le Koran gouverne ce lieu : 8 b
Que le Giaour tombe et meure. 8 c
Dans la flamboyante demeure 8 c
55 Par Monkir il sera jeté, 8 d
La terre brûlera l'impie, 8 e
Car sa tombe sera sans pluie 8 e
Sous les dards plombés de l'été. 8 d
Le Croyant superbe s'avance ; 8 a
60 Il est brave ; il sait que son sort 8 b
Avec lui marche, écrit d'avance 8 a
Sur l'invisible collier d'or ; 8 b
Son front sous le dernier génie, 8 c
Dont le vol a de l'harmonie, 8 c
65 Se courbe sans être irrité. 8 d
La prévoyance est inhabile 8 e
A reculer l'heure immobile 8 e
Que marque la fatalité. 8 d
Si la mort frappe le fidèle 8 a
70 Quittant son paradis vermeil 8 b
Et déployant l'or de son aile, 8 a
La Péri viendra du soleil. 8 b
Ses chants le berceront de joie, 8 c
Ses doigts ont travaillé la soie 8 c
75 Où le brave doit reposer ; 8 d
L'entourant d'une écharpe verte, 8 e
Sa bouche de rose entr'ouverte 8 e
L'accueillera par un baiser. 8 d
Qui puisera les eaux sacrées 8 a
80 Dans la fontaine de Cafour , 8 b
Où les houris désaltérées 8 a
Chancellent et tombent d'amour ? 8 b
Leurs yeux doux, qu'un cil noir protège, 8 c
Vous regardent : leurs bras de neige 8 c
85 Applaudiront au combattant ; 8 d
Et dans des coupes d'émeraude 8 e
Une liqueur vermeille et chaude 8 e
Coule de leurs doigts et l'attend. 8 d
Allah prépare leur défaite, 8 a
90 Il a pris le glaive de feu ; 8 b
Priez, chantez : Dieu seul est Dieu, 8 b
Et Mahomet est son Prophète. 8 a
────────
Si de grands bœufs errans sur les bords d'un marais 6+6 a
Combattent le loup noir sorti de ses forêts, 6+6 a
95 Longtemps en cercle étroit leur foule ramassée 6+6 b
Présente à ses assauts une corne abaissée, 6+6 b
Et, reculant ainsi jusque dans les roseaux, 6+6 a
Cherche un abri fangeux sous les dormantes eaux. 6+6 a
Le loup rôde en hurlant autour du marécage : 6+6 b
100 Il arrache les joncs, seule proie à sa rage, 6+6 b
Car, au lieu du poil jaune et des flancs impuissans, 6+6 a
Il voit nager des fronts armés et mugissans. 6+6 a
Mais que les aboiements d'une meute lointaine 6+6 b
Rendent sûrs ses dangers et sa fuite incertaine, 6+6 b
105 Il s'éloigne à regret ; son œil menace et luit 6+6 a
Sur l'ennemi sau que lui rendra la nuit : 6+6 a
Tandis que, rassu dans sa retraite humide, 6+6 b
Le troupeau laboureur, devenu moins timide, 6+6 b
Sortant des eaux ses pieds fourchus et limoneux, 6+6 a
110 Contemple le combat des limiers généreux. 6+6 a
Tels les Athéniens, du haut de leurs murailles, 6+6 b
Écoutaient, regardaient les poudreuses batailles. 6+6 b
« Quels pas ont soule ce nuage lointain ? 6+6 a
« Ces sables volent-ils sous le vent du matin ? 6+6 a
115 « Se disaient-ils : quittant l'Afrique dévoe, 6+6 b
« Le Semoun flamboyant souffle-t-il du Pye ? 6+6 b
« Il accourt vers Athène, et renverse en courant 6+6 a
« L'Ottoman qui résiste, et le laisse mourant. 6+6 a
« Ce sont des Grecs ; voyez, voyez notre bannière ! 6+6 b
120 « Elle est resplendissante à travers la poussière. » 6+6 b
Mora la soutenait, et ses exploits errans 6+6 a
Bien loin derrière lui laissaient les premiers rangs. 6+6 a
Tenant sa main, paraît la belle et jeune fille. 6+6 b
Pâle ; un crucifix d'or au-dessus d'elle brille. 6+6 b
125 Elle osait l'élever d'un bras ferme et pieux, 6+6 a
Sans craindre d'appeler la mort avec les yeux, 6+6 a
Marchait, et d'un œil sûr comme sachant leurs crimes, 6+6 b
Au Grec avec sa croix désignait ses victimes. 6+6 b
Lui, suspendait ses pas, et sa froide fureur 6+6 a
130 Frappait, en souriant de dédain et d'horreur. 6+6 a
Alors on entendit, du haut des édifices, 6+6 b
Des femmes applaudir ces sanglans sacrifices ; 6+6 b
Elles criaient : « O Grèce ! ô Grèce ! lève-toi ! 6+6 a
« L'ange exterminateur vient, guidé par la foi ! » 6+6 a
135 Et, la joie et les pleurs se mêlant aux prières, 6+6 b
De leurs murs démolis précipitaient les pierres, 6+6 b
Et l'huile bouillonnante, et le plomb ruisselant 6+6 a
Jetés avec fracas en fleuve étincelant, 6+6 a
Répandaient aux turbans que choisissaient leurs haines, 6+6 b
140 Des maux avant-coureurs des éternelles peines ; 6+6 b
Tandis que, soulevant les pierres des tombeaux, 6+6 a
Leurs pères, leurs enfans, leurs époux en lambeaux, 6+6 a
Sortaient, pour le combat, de leurs retraites sombres, 6+6 b
Et de leurs grands aïeux représentaient les ombres. 6+6 b
────────
145 Les Turcs tombent alors vaincus ; les deux amans 6+6 a
D'un pied triomphateur foulaient ces corps fumans. 6+6 a
Comme on voit d'un volcan le feu long-temps esclave 6+6 b
Tonner, couler, descendre en une ardente lave, 6+6 b
Et, confondant les rocs et les toits arrachés, 6+6 a
150 Aux cadavres brûlants des chênes desséchés, 6+6 a
Renouveler le Styx pour les tremblantes plaines, 6+6 b
Tels marchaient après eux les rapides Hellènes. 6+6 b
Leurs bras rassasiés, désœuvrés de martyrs, 6+6 a
Arrachaient en passant quelques derniers soupirs ; 6+6 a
155 Mais leurs yeux et leurs pas tendaient vers la fue 6+6 b
Qui roulait en flots noirs sur l'église enflammée. 6+6 b
Là tombaient des chrétiens au pied de leur autel ; 6+6 a
On entendait le cri sans voir le coup mortel, 6+6 a
Car l'incendie en vain éclairait tant de crimes ; 6+6 b
160 Les portes dérobaient et bourreaux et victimes. 6+6 b
On les frappe à grand bruit. Calme comme un vainqueur, 6+6 a
Mora pressait alors Héléna sur son cœur. 6+6 a
« Viens, disait-il, viens voir la maison paternelle, 6+6 b
« Puisque ses murs quittés te font si criminelle ; 6+6 b
165 « C'est là ta seule peine. Allons, viens avec moi, 6+6 a
« Le vainqueur amoureux va supplier pour toi ; 6+6 a
« J'y vais trouver ensemble et ta main et ta grâce : 6+6 b
« Qu'as-tu fait que la gloire et notre amour n'efface ? » 6+6 b
Mais elle s'avançait : « Ne parlez pas ainsi, 6+6 a
170 « Vous allez m'affaiblir ; Dieu m'a conduite ici ! » 6+6 a
Et le délire alors semblait troubler sa vue 6+6 b
Vers le temple brûlant toujours, toujours tendue. 6+6 b
« C'est Dieu qui me fait voir quel doit être mon sort ! 6+6 a
« Silence ! taisons-nous ; j'entends venir ma mort ! 6+6 a
175 On entendait, au fond de l'église en tumulte, 6+6 b
Des hurlemens, des cris de femmes, et l'insulte, 6+6 b
Et le bruit de la poudre et du fer. Cependant 6+6 a
Un nuage de feu sortait du toit ardent. 6+6 a
« Mon ami, disait-elle, ô soutenez mon âme ! 6+6 b
180 « Rendez-moi forte : hélas ! je ne suis qu'une femme ; 6+6 b
« Quand je vous vois, je sens que j'aime encor le jour ; 6+6 a
« Il ne me reste plus à vaincre que l'amour ; 6+6 a
« Pour l'autre sacrifice, il est fait. » Et ses larmes 6+6 b
Qu'elle voulait cacher, l'ornaient de nouveaux charmes. 6+6 b
185 Lui, la priait de vivre, et ne comprenait pas 6+6 a
Quels chagrins l'appelaient à vouloir le trépas. 6+6 a
Elle était sur son cœur ; sa tête était penchée. 6+6 b
On croyait-qu'à ses cris elle serait touchée ; 6+6 b
Mais la porte du temple est ouverte, et l'on voit 6+6 a
190 Tous ceux que menaçait le poids brûlant du toit : 6+6 a
Tous les Turcs étaient là ; mais, chacun d'eux s'arrête, 6+6 b
Croise ses bras, jetant son fer, lève la tête, 6+6 b
Et sur la mort qui tombe ose fixer les yeux. 6+6 a
Un seul cri de terreur s'élève jusqu'aux Cieux ; 6+6 a
195 Le dôme embrasé craque, et dans l'air se balance. 6+6 b
« Je les reconnais tous ! » dit-elle. Elle s'élance. 6+6 b
Et sur le seuil fumant monte. « Je meurs ici ! 6+6 a
« — Sans ton époux, dit-il. — Mes époux ? les voici ! 6+6 a
« Je meurs vengée ! Adieu, tombez, murs que j'implore ; 6+6 b
200 « Les Cieux me sont ouverts, mon âme est vierge encore ! » 6+6 b
Et le clocher, les murs, les marbres renversés, 6+6 a
Les vitraux en éclats, les lambris dispersés, 6+6 a
Et les portes de fer, et les châsses antiques, 6+6 b
Et les lampes dont l'or surchargeait les portiques, 6+6 b
205 Tombent ; et dans sa chute ardente, leur grand poids 6+6 a
De cette foule écrase et la vie et la voix. 6+6 a
Long-temps les flots épais d'une rouge poussière 6+6 b
Du soleil et du ciel étouffent la lumière ; 6+6 b
On espère qu'enfin ses voiles dissipés 6+6 a
210 Montreront quelques Grecs au désastre échappés ; 6+6 a
Mais la flamme bientôt, pure et belle, s'élance 6+6 b
Et sur les morts cachés brille et monte en silence. 6+6 b
────────
Cependant, vers le soir, les combats apaisés 6+6 a
Livrèrent toute Athène aux vainqueurs reposés. 6+6 a
215 Après l'effroi d'un jour que la flamme et les armes 6+6 b
Avaient rempli de sang et de bruit et d'alarmes, 6+6 b
Sur les murs dévastés, sur les toits endormis, 6+6 a
Le lune promenait l'or de ses feux amis. 6+6 a
Athène sommeillait ; mais des clartés errantes, 6+6 b
220 Puis, dans l'ombre, des cris soudains, des voix mourantes 6+6 b
De quelques fugitifs venaient glacer les cœurs ; 6+6 a
Ils craignaient les vaincus non moins que les vainqueurs. 6+6 a
Ils étaient Juifs. Surtout en haut de la colline 6+6 b
Que du vieux Parthenon couronne la ruine, 6+6 b
225 Dans ses piliers moussus, ses anguleux débris, 6+6 a
Ils avaient cru trouver de plus secrets abris. 6+6 a
Comme l'humble araignée et sa frêle tenture 6+6 b
Des lambris d'un palais dérobent la sculpture, 6+6 b
Une Mosquée, au coin du temple chancelant, 6+6 a
230 Suspendait sa coupole et cachait son front blanc : 6+6 a
C'est là qu'une famille, encor d'effroi troublée, 6+6 b
En cercles ténébreux s'était toute assemblée ; 6+6 b
Autour d'un candélabre aux autels dérobé, 6+6 a
Ils comptaient l'amas d'or entre leurs mains tombé. 6+6 a
235 Les sabres de Damas que le soldat admire, 6+6 b
Et les habits moelleux tissus à Cachemire, 6+6 b
Les calices chrétiens, les colliers, les croissans, 6+6 a
Ces boucles, de l'oreille ornemens innocens : 6+6 a
Car aux fils de Judas toute chose est permise, 6+6 b
240 Comme dans leurs trésors toute chose est admise. 6+6 b
D'avance épouvantés d'images de trépas, 6+6 a
Tous ces Juifs ont frémi ; l'on entendait des pas, 6+6 a
Le pas d'un homme seul sous la voûte sonore : 6+6 b
Il marchait, s'arrêtait, et puis marchait encore. 6+6 b
245 Et l'écho des degrés, en bruits sourds et confus, 6+6 a
Leur renvoya ces mots vingt fois interrompus : 6+6 a
────────
« Le sang du fer vengeur s'essuiera dans la terre 6+6 a
« Je veux qu'il creuse ta fosse solitaire ; 6+6 a
« Dans l'urne inattendue où ne luit aucun nom, 6+6 b
250 « Ta cendre va dormir au pied du Parthenon. 6+6 b
« Dans ce vase de mort, teint d'une antique rouille, 6+6 a
« On ne versa jamais plus lugubre dépouille, 6+6 a
« Tant de malheurs dedans, et tant de pleurs dehors, 6+6 b
« N'ont jamais affli ses funéraires bords. 6+6 b
255 « Et certes cette gloire au moins nous est bien due, 6+6 a
« D'avoir de tout malheur dépassé l'étendue. 6+6 a
« — Ni l'homme d'aujourd'hui, ni la postéri 6+6 b
« N'oseront te sonder jusqu'à la vérité, 6+6 b
« Jeune cendre ; et des maux de ce jour de misères 6+6 a
260 « La moitié suffirait aux désespoirs vulgaires. 6+6 a
« Quand un passant viendra chercher, en se courbant, 6+6 b
« Quelques vieux noms de morts dérobés au turban, 6+6 b
« Il trouvera cette urne, et, déterrant sa proie, 6+6 a
« Rassasiera de nous sa curieuse joie ; 6+6 a
265 « Il tournera long-temps ce bronze, et, pour jamais, 6+6 b
« Dispersera dans l'air la beauté que j'aimais. 6+6 b
« Et si son cœur tressaille à l'aspect de sa cendre, 6+6 a
« Si dans des maux passés il consent à descendre, 6+6 a
« Que pourra sa pitié ? Ce que toujours on vit, 6+6 b
270 « Plaindre non l'être mort, mais l'être qui survit ; 6+6 b
« Moi-même j'ai bien cru que la mort d'une amante 6+6 a
« Était le plus grand mal dont l'enfer nous tourmente. 6+6 a
« Ah ! que ne puis-je en paix savourer ce malheur ! 6+6 b
« Il serait peu de chose auprès de ma douleur. 6+6 b
275 « Dans son temps virginal que ne l'ai-je perdue ? 6+6 a
« A se la rappeler ma tristesse assidue 6+6 a
« La pleurerait sans tache, et distillant mon fiel, 6+6 b
« Je n'aurais qu'à gémir et maudire le Ciel ! 6+6 b
« Je dirais : Héléna ! que n'es-tu sur la terre ? 6+6 a
280 « Tu laisses après toi ton ami solitaire, 6+6 a
« Renais ! Que ta beauté, belle de ta vertu, 6+6 b
« Vienne au jour, et le rende à mon cœur abattu. 6+6 b
« Mais de pareils regrets la douceur m'est ravie, 6+6 a
« Il faut pleurer sa mort sans regretter sa vie ; 6+6 a
285 « Et si ces restes froids cédaient à mon amour, 6+6 b
« J'hésiterais peut-être à lui rendre le jour. 6+6 b
« Malheur ! je ne puis rien vouloir en assurance, 6+6 a
« Et dédaigne le bien qui fut mon espérance ! 6+6 a
« Héléna ! nous n'aurions qu'un amour sans honneur : 6+6 b
290 « Va, j'aime mieux ta cendre encor qu'un tel bonheur. 6+6 b
« Descends, descends en paix ; attends ici ma gloire, 6+6 a
« En te la rapportant après notre victoire, 6+6 a
« Je la mépriserai pour te pleurer toujours. 6+6 b
« Et, ton urne à la main, je compterai mes jours. » 6+6 b
FIN DU TROISIÈME ET DERNIER CHANT
mètre profils métriques : 8, 6+6
logo du CRISCO logo de l'université