Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
VHR_1/VHR24
Émile VERHAEREN
LES FLAMANDES
1883
LA VACHE
Dès cinq heures, sitôt que l'aurore fit tache 6+6 a
Sur l'enténèbrement nocturne, piqué d'or, 6+6 b
Un gars traça des croix sur le front de la vache. 6+6 a
Et, le licol tendu, la mena vers la mort. 6+6 b
5 Partout dans les clochers sonnaient les réveillées ; 6+6 a
Les champs riaient, malgré les brouillards étendus 6+6 b
Sur la campagne, ainsi que des laines mouillées, 6+6 a
Et les froids, qui la nuit étaient redescendus. 6+6 b
Des groupes d'ouvriers à leurs tâches revêches. 6+6 a
10 Allaient, bâillant encor, muets, presque dolents, 6+6 b
Sur leur énorme dos luisait l'acier des bêches, 6+6 a
Plaquant le jour brumeux et gris de miroirs blancs. 6+6 b
On entendait gronder des fracas de roulages 6+6 a
Sur les pavés, des bruits de vieux chariots pleins ; 6+6 b
15 Au loin se balançaient des charges de fourrages 6+6 a
Entre les coins de blés et les recoins de lins. 6+6 b
Les poternes s'ouvraient partout, au long des routes, 6+6 a
Avec des grincements de clefs et de verroux. 6+6 b
Et les bêtes de clos à clos s'appelaient toutes, 6+6 a
20 Et la vache passait très lente et beuglait doux. 6+6 b
A droite — on voit blondir l'immensité de plaines : 6+6 a
Des carrés roux, faisant des angles dans les verts, 6+6 b
Des villages par tas, des hameaux par vingtaines, 6+6 a
Avec de grands zigzags de routes à travers. 6+6 b
25 A gauche — les vergers rajeunis, qu'effiloque 6+6 a
Le vent de Juin, soufflant sur les massifs fleuris, 6+6 b
Toute l'explosion de l'estivale époque, 6+6 a
Blanche sous un azur jeune, brouillé de gris. 6+6 b
Enfin par un dernier détour de sente verte, 6+6 a
30 On parvient au village assis sur un plateau : 6+6 b
La boucherie est là, tout en haut, large ouverte, 6+6 a
Dans un encadrement plaqué de champs et d'eau. 6+6 b
La vache brusquement s'arrête au seuil du porche. 6+6 a
Tout est rouge autour d'elle et fumant, sur le sol 6+6 b
35 Un taureau tacheté de rousseurs, qu'on écorche 6+6 a
Et dont coule le sang par un trou fait au col. 6+6 b
Des moutons appendus au mur, tètes fendues, 6+6 a
Des porcs, gisant sur la paille, moignons en l'air, 6−6 b
Un veau noir sur un tas d'entrailles répandues 6+6 a
40 Avec le coutelas profond fouillant la chair. 6+6 b
Et plus loin, au-delà de ces visions rouges, 6+6 a
Ce sont des coins verdis de blés quelle entrevoit, 6+6 b
Où des bœufs laboureurs, que bàtonnent des gouges. 6+6 a
Entaillent le terreau gluant d'un sillon droit. 6+6 b
45 Et voici que se fait la lumière complète, 6+6 a
Le creusement profond des lointains horizons, 6+6 b
Le grand jour triomphal et doré, qui projette 6+6 a
Ses flammes d'incendie au ras des floraisons, 6+6 b
Qui baigne les champs gras d'une sueur fumante, 6+6 a
50 Les pénètre, à plein feu, de ses rayons mordants, 6+6 b
Les brûle de baisers d'amour, comme une amante, 6+6 a
Et leur gonfle le sein de germes fécondants. 6+6 b
La vache voit bleuir le grand ciel qui surplombe 6+6 a
L'embrasement du sol où luit l'Escaut vermeil, 6+6 b
55 Lorsqu'un coup de maillet l'étourdit ; — elle tombe, 6+6 a
Mais son dernier regard s'est empli de soleil. 6+6 b
mètre profil métrique : 6−6
logo du CRISCO logo de l'université