Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
VER_13/VER621
Paul VERLAINE
ÉLÉGIES
1893
VI
J’ai dit ailleurs l’orgueil de la possession 6+6 a
Et le joyeux émoi d’occuper la Sion 6+6 a
Pas céleste, mais presque, à force d’être bonne 6+6 b
A garder après siège fait, de ta personne 8+4 b
5 Physique, et le butin inépuisable. Mais, 6+6 a
Tout en continuant de piller dru, je vais 6+6 a
Exalter maintenant ta gloire intérieure, 6+6 b
Tes vertus, en un mot, qui ne sont point un leurre 6+6 b
(Ni tes vices non plus) tes efforts surhumains, 6+6 a
Tes préjugés vaincus ? O que non pas !
10 Tes mains 6+6 a
Longues et blanches et négligeant d’être belles, 6+6 b
Leurs poignets s’accommoderaient bien de dentelles 8+4 b
Point trop fins qu’ils sont. (Mais les bras ! que modelés, 6+6 a
Que…) Pourtant, avouons, les doigts vont, fuselés, 6+6 a
15 Agiles, et non sans une grâce perverse 6−6 b
Serait trop dire, ils vont, les doigts, qu’un rythme berce, 6+6 b
Sur le mol clavier de mes contemplations, 6−6 a
Tant et si bien que je craindrais que nous fissions 6−6 a
Des bêtises, puisqu’on nomme ça des bêtises 6−6 b
20 En ce jourd’hui que je veux tout en teintes grises, 6−6 b
Bondé de convenance et sont de chasteté. 6+6 a
Or ces simples mains-là qui n’ont jamais ganté 6+6 a
Que fourrures l’hiver et que mitaines vagues 6+6 b
L’été, s’abstiennent de l’éclat bourgeois des bagues, 6−6 b
25 De même que ton cou dédaigne les colliers 6+6 a
Et que ton pied faisant fi des jolis souliers 6+6 a
Qu’une catin maigre use en courses libertines, 6+6 b
Brave, se cambre au cuir martial des bottines, 6+6 b
Et que le jersey pur et souple rampe au corps 6+6 a
30 Que j’adore, et non plus tels falbalas discords. 6+6 a
Mais quoi ! j’ai dit : « négligeant d’être belles » d’elles. 4+4+4 b
J’ai menti. Je parlais, je crois, de citadelles 6+6 b
Conquises tout à l’heure et de combats livrés. 6+6 a
J’allusionnai lors, et cela de très près, 6+6 a
35 A la défense par ces mains de tel corsage, 6−6 b
De telle jupe ayant trop voulu rester sage 6+6 b
Et je leur en voulais et j’ai menti. Du moins 6+6 a
Je me suis à dessein mal exprimé : Témoins 6+6 a
Sont tes yeux que tes mains sont belles et très belles, 6+6 b
40 Et les miens donc ! Et je les baise comme telles 6−6 b
Cent et cent fois le jour et presque autant la nuit, 6+6 a
Mais trop belles, non pas, car en tout l’excès nuit. 6+6 a
Je voulais simplement dire qu’elles sont belles 6+6 b
Juste au point et que je les baise comme telles 6−6 b
45 Et non pas comme des châsses ou des bons dieux 6−6 a
En bois ou de métal plus ou moins précieux, 6+6 a
Mais bien comme les mains chères d’une maîtresse 6+6 b
Tant aimée et donnant la suprême caresse 6+6 b
Sur mon front essuyé, sur mes mains qu’elles font 6+6 a
50 Littéralement leurs, d’un fluide profond 6+6 a
Et calmant, d’une fièvre ainsi communiquée 6+6 b
Qu’elle va jusqu’à l’âme on dirait fatiguée, 6+6 b
Et l’endormant dans un rêve d’aise et d’ébat. 6−6 a
Quant aux poignets, que j’insultai d’un propos plat, 4+4+4 a
55 Toujours à cause des susdites résistances, 6−6 b
Il convient, mon amour, qu’âprement tu me tances 6+6 b
D’une erreur volontaire, et je confesse ici 6+6 a
Qu’ils sont parfaits, mignons et gras, roses ainsi. 6+6 a
Qu’une rose-thé rose plus que de coutume, 8+4 b
60 A preuve que tantôt encor clans l’amertume 6+6 b
D’un remords pour des mots trop vifs que j’avais dits 6+6 a
Et les ayant baisés, pour voir le paradis, 6+6 a
Le pardon, refleurir sur ta bouche si bonne, 6+6 b
Parmi le bleu lacis des veines où, gai, sonne 6+6 b
65 Ton pouls tumultueux d’un courroux passager, 6+6 a
(Espérais-je !) j’en ai gardé, pour y songer 6+6 a
Longtemps, le souvenir de satin et de soie. 6+6 b
O tes mains, les dispensatrices de ma joie ! 8+4 b
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