Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
VER_13/VER618
Paul VERLAINE
ÉLÉGIES
1893
III
D’après ce que j’ai vu, d’après ce que je sais, 6+6 a
D’après ce que je crois, nuls n’ont plus de succès, 6+6 a
Ou n’en eurent, ou n’en auront, si c’est ma veine. 6+6 b
Auprès de toi, sinon ceux simples et sans gêne : 6+6 b
5 Tel un moi qui serait plus jeune, au moins de corps, 6+6 a
Quoique je ne me mette pas au rang des morts 8+4 a
Encore ou bien déjà, n’en déplaise aux quarante 6+6 b
Et trop d’ans qui sont, las ! ma seule sûre rente. 6+6 b
Oui, j’ai cru remarquer, tu m’as insinué, 6+6 a
10 Je fus le témoin, mal, ô mal habitué, 6+6 a
Qu’en effet ton regard qui compte ce mérite 6+6 b
Entre tant, d’être franc au point que s’en irrite 6+6 b
L’espèce de jaloux que parfois je serais 6+6 a
Si je ne me faisais aveugle et sourd exprès, 6+6 a
15 Que ton regard, disais-je, allait de préférence 6+6 b
Aux hommes de carrée et de ronde apparence, 6+6 b
Plutôt qu’aux freluquets à l’air godiche ou sec, 6+6 a
N’ayant pour eux que gros cigares, chers, au bec, 6+6 a
Et qu’insipides fleurs, hors de prix, en façade 6+6 b
20 Au revers de leur bel habit terne et maussade ; 6+6 b
Gent laide et dont, si j’étais femme, l’aspect pur 4+4+4 a
Et simple dresserait entre elle et moi quel mur ! 6+6 a
Ton choix s’ébat ou s’ébattrait, donc, si toi libre, 4+4+4 b
S’ébat ou s’ébattrait, sans beaucoup d’équilibre, 6+6 b
25 Du soldat bon enfant au joyeux ouvrier, 6+6 a
Sinon, et comme au lieu de grives, sans trier, 6+6 a
On prend des merles, d’un poète bien candide, 6+6 b
Amusamment vêtu sans faux-col qui le bride, 6+6 b
Et rieur, à l’artiste ébouriffé qui va, 6+6 a
30 Baguenaudant gaîment sous l’azur qu’il creva. 6+6 a
Certes tu m’en fis part et je le croirais presque, 6+6 b
Dans ta prime jeunesse il t’eût paru grotesque 6+6 b
De n’avoir pas d’amants très bien (et tu les eus !), 6+6 a
Ce qu’ils ont dû souffrir avec toi, doux Jésus ! 6+6 a
35 Aussi ce n’était pas ta botte, ces fantoches, 6+6 b
Et d’abord, comme tu me le fais sans reproches, 6−6 b
A moi qui ne suis guère, après tout, qu’un pur gueux. 6+6 a
Tu trompais ces bons gentlemen à coups fougueux, 8+4 a
Faisant bien en ce cas, mais que non pas dans l’autre, 6+6 b
40 En ce pauvre petit ménage qu’est le nôtre ! 6+6 b
Bref, pour y revenir, tes goûts sont pour le sain, 6+6 a
Fût-il mal habillé, pour l’homme au large sein 6+6 a
Où le cœur bat à l’aise, encor que sous la bure. 6+6 b
Eh bien ! j’ai tes dadas et croirais faire injure 6+6 b
45 A ton charme, si j’y rêvais des oripeaux ; 6+6 a
Tu sais d’ailleurs si j’aime à te voir des chapeaux, 6+6 a
Des robes, des « atours », comme à mes autres femmes 6+6 b
Dans le temps, parce que ça plaisait à ces dames 6+6 b
Et que cela te plaît, le nombre des chiffons. 6+6 a
50 Mais je t’aime bien mieux telle que nous t’avons, 6+6 a
Mes sens et moi, sans trop d’apprêt qui te déguise 6+6 b
Comme un Dieu disparaît dans le trop d’une église, 6+6 b
En matinée, en jupe, en peignoir prêts à choir, 6+6 a
A l’heure ralentie où s’achève le soir, 6+6 a
55 Forte et saine, parisienne et paysanne. 8+4 b
Plus encor paysanne et mieux ainsi, Suzanne 6+6 b
Quasiment à l’instant d’être dispose au bain. 6+6 a
La femme, et juste assez, c’est le vin et le pain. 6+6 a
mètre profil métrique : 6=6
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