Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
ROL_2/ROL179
Maurice ROLLINAT
Les Névroses
1883
LES REFUGES
L'Allée de peupliers
À Leconte de Lisle.
C'était l'heure du rêveet de l'effacement : 6+6 a
Tout, dans la nuit, allaitse perdre et se dissoudre ; 6+6 b
Et, d'échos en échos,les rumeurs de la foudre 6+6 b
Trnaient dans l'air livideun sourd prolongement. 6+6 a
5 Pendue au bord des cieuxpleins d'ombres et d'alarmes, 6+6 a
Et si bas qu'un coteausemblait les effleurer, 6+6 b
La pluie, ainsi qu'un œilqui ne peut pas pleurer, 6+6 b
Amassait lentementla source de ses larmes. 6+6 a
Et, comme un souffle errantde brasier refroidi, 6+6 a
10 Dans le val qui prenaitune étrange figure, 6+6 b
Un vent tiède, muetet de mauvais augure, 6+6 b
Bouffait sur l'herbe morteet le buisson roidi. 6+6 a
Ce fut donc par un soirlourd et sans lune bleue, 6+6 a
Qu'au milieu des éclairsbrefs et multipliés, 6+6 b
15 Je m'avançai tout seulentre ces peupliers 6+6 b
Qui bordaient mon cheminpendant près d'une lieue. 6+6 a
Alors, les vieux trembleurs,si droits et si touffus, 6+6 a
À travers les brouillardsque l'obscurité file 6+6 b
Bruissaient doucementet vibraient à la file, 6+6 b
20 Tandis qu'au loin passaientdes grondements confus. 6+6 a
Mais l'orage éclata ;l'autan lâcha ses hordes, 6+6 a
Et les arbres bientôtdevinrent sous leurs doigts 6+6 b
Des harpes de géants,qui toutes à la fois 6+6 b
Résonnèrent avecdes millions de cordes. 6+6 a
25 Comme un frisson humaindans les vrais désespoirs 6+6 a
Irrésistiblementcourt des pieds à la tête, 6+6 b
Ainsi, de bas en haut,le vent de la tempête 6+6 b
Sillonna brusquementles grands peupliers noirs. 6+6 a
Maintenant le tonnerreébranlait la vallée ; 6+6 a
30 La plaine et l'horizontournoyaient ; et dardant 6+6 b
Avec plus de fureurun zigzag plus ardent, 6+6 b
L'éclair, d'un bout à l'autre,illuminait l'allée. 6+6 a
Sur des fonds sulfureuxteintés de vert-de-gris 6+6 a
Les peupliers traçaientd'horribles arabesques ; 6+6 b
35 La foudre accompagnaitleurs plaintes gigantesques, 6+6 b
Et l'aquilon poussaitd'épouvantables cris. 6+6 a
C'était un bruit houleux,galopant, élastique, 6+6 a
L'infini dans le râleet dans le rire amer ; 6+6 b
On entendait roulerl'avalanche et la mer 6+6 b
40 Dans ce clapotementsauvage et fantastique. 6+6 a
Un vol prodigieuxd'aigles estropiés 6+6 a
Fouettant des maëlstromsde leurs ailes bteuses ; 6+6 b
Des montagnes de voixclaires et chuchoteuses ; 6+6 b
Des torrents de drapeaux,de flamme et de papiers ; 6+6 a
45 Un vaste éboulementde sable et de rocailles 6+6 a
Dégringolant à picau fond d'immenses trous ; 6+6 b
Des tas enchevêtrésde serpents en courroux 6+6 b
Sifflant à pleine gueuleet claquant des écailles ; 6+6 a
Des fous et des blessésagonisant la nuit 6+6 a
50 Au fond d'un grand Bicêtreou d'un affreux hospice ; 6+6 b
Deux trains se rencontrantau bord d'un précipice : 6+6 b
Tout cela bigarraitce formidable bruit. 6+6 a
Mais, degrés par degrés,l'orage eut moins de force, 6+6 a
Et cessa. Le chaosdisparut du vallon ; 6+6 b
55 Un déluge rapideabattit l'aquilon, 6+6 b
Et la foudre s'enfuitavec sa lueur torse. 6+6 a
Et toujours, entre tousmes soirs inoubliés, 6+6 a
Cette sinistre nuitme poursuit et me hante, 6+6 b
Cette nuit d'ouragan,rauque et tourbillonnante, 6+6 b
60 gémirent en chœurdeux mille peupliers ! 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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