Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
RIM_2/RIM29
Arthur RIMBAUD
POÉSIES II
1870-1872
L'Orgie parisienne
ou
Paris se repeuple
Ô lâches, la voilà ! dégorgez dans les gares ! 6+6 a
Le soleil expia de ses poumons ardents 6+6 b
Les boulevards qu’un soir comblèrent les Barbares. 6+6 a
Voilà la Cité belle assise à l’occident ! 6+6 b
5 Allez ! on préviendra les reflux d’incendie, 6+6 a
Voilà les quais ! voi les boulevards ! voilà, 6+6 b
Sur les maisons, l’azur léger qui s’irradie, 6+6 a
Et qu’un soir la rougeur des bombes étoila. 6+6 b
Cachez les palais morts dans des niches de planches ! 6+6 a
10 L’ancien jour effa rafrchit vos regards. 6+6 b
Voici le troupeau roux des tordeuses de hanches, 6+6 a
Soyez fous, vous serez drôles, étant hagards ! 6+6 b
Tas de chiennes en rut mangeant des cataplasmes. 6+6 a
Le cri des maisons d’or vous réclame. Volez ! 6+6 b
15 Mangez ! Voici la nuit de joie aux profonds spasmes 6+6 a
Qui descend dans la rue, ô buveurs désolés, 6+6 b
Buvez. Quand la lumière arrive intense et folle 6+6 a
Fouillant à vos côtés les luxes ruisselants, 6+6 b
Vous n’allez pas baver, sans geste, sans parole, 6+6 a
20 Dans vos verres, les yeux perdus aux lointains blancs, 6+6 b
Avalez, pour la Reine aux fesses cascadantes ! 6+6 a
Écoutez l’action des stupides hoquets 6+6 b
Déchirants. Écoutez, sauter aux nuits ardentes 6+6 a
Les idiots râleux, vieillards, pantins, laquais ! 6+6 b
25 O cœurs de saleté, bouches épouvantables, 6+6 a
Fonctionnez plus fort, bouches de puanteurs ! 6+6 b
Un vin pour ces torpeurs ignobles, sur ces tables… 6+6 a
Vos ventres sont fondus de hontes, ô Vainqueurs ! 6+6 b
Ouvrez votre narine aux superbes nausées ! 6+6 a
30 Trempez de poisons forts les cordes de vos cous ! 6+6 b
Sur vos nuques d’enfants baissant ses mains croisées 6+6 a
Le Poète vous dit : ô lâches, soyez fous ! 6+6 b
Parce que vous fouillez le ventre de la Femme 6+6 a
Vous craignez d’elle encore une convulsion 6+6 b
35 Qui crie, asphyxiant votre nichée infâme 6+6 a
Sur sa poitrine, en une horrible pression. 6−6 b
Syphilitiques, fous, rois, pantins, ventriloques, 6+6 a
Qu’est-ce que ça peut faire à la pudeur Paris. 6+6 b
Vos âmes et vos corps, vos poisons et vos loques ? 6+6 a
40 Elle se secouera de vous, hargneux pourris ! 6+6 b
Et quand vous serez bas, geignant sur vos entrailles 6+6 a
Les flancs morts, réclamant votre argent, éperdus, 6+6 b
La rouge courtisane aux seins gros de Batailles, 6+6 a
Loin de votre stupeur tordra ses poings ardus ! 6+6 b
45 Quand tes pieds ont dan si fort dans les colères, 6+6 a
Paris ! quand tu reçus tant de coups de couteau, 6+6 b
Quand tu gis, retenant dans tes prunelles claires, 6+6 a
Un peu de la bon du fauve renouveau, 6+6 b
O cité douloureuse, ô cité quasi morte, 6+6 a
50 La tête et les deux seins jetés vers l’Avenir 6+6 b
Ouvrant sur ta pâleur ses milliards de portes, 6+6 a
Cité que le Passé sombre pourrait bénir : 6+6 b
Corps remagnéti pour les énormes peines, 6+6 a
Tu rebois donc la vie effroyable ! tu sens 6+6 b
55 Sourdre le flux des vers livides en tes veines, 6+6 a
Et sur ton clair amour rôder les doigts glaçants ! 6+6 b
Et ce n’est pas mauvais. Tes vers, tes vers livides 6+6 a
Ne gèneront pas plus ton souffle de Progrès 6+6 b
Que les Stryx n’éteignaient l’œil des Cariatides 6+6 a
60 Où des pleurs d’or astral tombaient des bleus degrés. 6+6 b
Quoique ce soit affreux de te revoir couverte 6+6 a
Ainsi ; quoiqu’on n’ait fait jamais d’une ci 6+6 b
Ulcère plus puant à la Nature verte, 6+6 a
Le Poète te dit : « Splendide est ta Beauté ! » 6+6 b
65 L’orage t’a sacrée suprême poésie ; 6+6 a
L’immense remuement des forces te secourt ; 6+6 b
Ton œuvre bout, la mort gronde, Cité choisie ! 6+6 a
Amasse les strideurs au cœur du clairon lourd. 6+6 b
Le Poète prendra le sanglot des Infâmes, 6+6 a
70 La haine des Forçats, la clameur des maudits ; 6+6 b
Et ses rayons d’amour flagelleront les Femmes. 6+6 a
Ses strophes bondiront , voilà ! voilà ! bandits ! 6+6 b
− Société, tout est rétabli : − les orgies 6+6 a
Pleurent leur ancien râle aux anciens lupanars : 6+6 b
75 Et les gaz en délire aux murailles rougies 6+6 a
Flambent sinistrement vers les azurs blafards ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6−6
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