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RIM_1/RIM7
Arthur RIMBAUD
POÉSIES I
1869-1870
Les reparties de Nina
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Lui
Ta poitrine sur ma poitrine, 8 a
Hein ? nous irions, 4 b
Ayant de l’air plein la narine, 8 a
Aux frais rayons 4 b
5 Du bon matin bleu qui vous baigne 8 a
Du vin de jour ?… 4 b
Quand tout le bois frissonnant saigne 8 a
Muet d’amour 4 b
De chaque branche, gouttes vertes, 8 a
10 Des bourgeons clairs, 4 b
On sent dans les choses ouvertes 8 a
Frémir des chairs ; 4 b
Tu plongerais dans la luzerne 8 a
Ton long peignoir, 4 b
15 Divine avec ce bleu qui cerne 8 a
Ton grand œil noir, 4 b
Amoureuse de la campagne, 8 a
Semant partout, 4 b
Comme une mousse de champagne, 8 a
20 Ton rire fou ! 4 b
Riant à moi, brutal d’ivresse, 8 a
Qui te prendrais 4 b
Comme cela, − la belle tresse, 8 a
Oh ! − qui boirais 4 b
25 Ton goût de framboise et de fraise, 8 a
O chair de fleur ! 4 b
Riant au vent vif qui te baise 8 a
Comme un voleur ! 4 b
Au rose églantier qui t’embête 8 a
30 Aimablement 4 b
Riant surtout, ô folle tête, 8 a
A ton amant !… 4 b
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Dix-sept ans ! Tu seras heureuse ! 8 a
Oh ! les grands prés, 4 b
35 La grande campagne amoureuse ! 8 a
− Dis, viens plus près !… 4 b
− Ta poitrine sur ma poitrine, 8 a
Mêlant nos voix, 4 b
Lents, nous gagnerions la ravine, 8 a
40 Puis les grands bois !… 4 b
Puis, comme une petite morte, 8 a
Le cœur pâmé, 4 b
Tu me dirais que je te porte, 8 a
L’œil mi-fermé 4 b
45 Je te porterais, palpitante, 8 a
Dans le sentier 4 b
L’oiseau filerait son andante, 8 a
Joli portier 4 b
Je te parlerais dans ta bouche : 8 a
50 J’irais, pressant 4 b
Ton corps, comme une enfant qu’on couche, 8 a
Ivre du sang 4 b
Qui coule, bleu, sous ta peau blanche 8 a
Aux tons rosés, 4 b
55 Te parlant bas la langue franche 8 a
Tiens !… — que tu sais 4 b
Nos grands bois sentiraient la sève, 8 a
Et le soleil 4 b
Sablerait d’or fin leur grand rêve 8 a
60 Sombre et vermeil ! 4 b
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Le soir ?… Nous reprendrons la route 8 a
Blanche qui court, 4 b
Flânant, comme un troupeau qui broute, 8 a
Tout à l’entour 4 b
65 Les bons vergers à l’herbe bleue 8 a
Aux pommiers tors ! 4 b
Comme on les sent toute une lieue, 8 a
Leurs parfums forts ! 4 b
Nous regagnerions le village 8 a
70 Au ciel mi-noir ; 4 b
Et ça sentira le laitage 8 a
Dans l’air du soir ; 4 b
Ça sentira l’étable pleine 8 a
De fumiers chauds, 4 b
75 Pleine d’un rythme lent d’haleine, 8 a
Et de grands dos 4 b
Blanchissant sous quelque lumière ; 8 a
Et, tout là-bas, 4 b
Une vache fienterait fière, 8 a
80 A chaque pas !… 4 b
− Les lunettes de la grand’mère 8 a
Et son nez long 4 b
Dans son missel, le pot de bière 8 a
Cerclé de plomb, 4 b
85 Moussant entre les larges pipes 8 a
Qui, crânement, 4 b
Fument : dix, quinze, immenses lippes 8 a
Qui, tout fumant, 4 b
Happent le jambon aux fourchettes 8 a
90 Tant, tant et plus ; 4 b
Le feu qui claire les couchettes, 8 a
Et les bahuts ; 4 b
Les fesses luisantes et grasses 8 a
D’un gros enfant 4 b
95 Qui fourre, à genoux, dans des tasses, 8 a
Son museau blanc 4 b
Frolé par un mufle qui gronde 8 a
D’un ton gentil, 4 b
Et pourlèche la face ronde 8 a
100 Du cher petit 4 b
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Noire, rogue au bord de sa chaise, 8 a
Affreux profil, 4 b
Une vieille devant la braise 8 a
Qui fait du fil ; 4 b
105 Que de choses nous verrions, chère, 8 a
Dans ces taudis, 4 b
Quand la flamme illumine, claire, 8 a
Les carreaux gris !… 4 b
− Et puis, fraîche et toute nichée 8 a
110 Dans les lilas, 4 b
La maison, la vitre cachée 8 a
Qui rit là-bas 4 b
Tu viendras, tu viendras, je t’aime, 8 a
Ce sera beau ! 4 b
115 Tu viendras, n’est-ce pas ? et même 8 a
Elle
Mais le bureau ? 4 b
mètre profils métriques : 8, 4
forme globale type : suite de strophes
schéma : 29[abab]
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