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F = "e" féminin
| = césure
REN_4/REN199
Armand RENAUD
Drames du peuple
1885
PATRIE
A un Poète allemand*
POÈTE de la blonde et rêveuse Allemagne 6+6 a
Où vont les fiancés, à travers la campagne, 6+6 a
Voir se poser la lune au cœur des lys fleuris, 6+6 b
Toi qui, haussant ta lèvre au clairon du prophète 6+6 c
5 Et couronnant ton luth comme pour une fête, 6+6 c
As prédit la ruine et la mort de Paris, 6+6 b
Poète, tu dis vrai ; le temps viendra sans doute 6+6 a
Où la lueur qu'on suit et la voix qu'on écoute. 6+6 a
Le grand Paris ne sera plus ; 8 b
10 Où du sable onduleux, tacheté de broussaille. 6+6 c
Recouvrira sans bruit l'océan qui tressaille 6+6 c
Dans ce vivant flux et reflux. 8 b
Poète, tu dis vrai : sur la Seine déserte, 6+6 a
Le pluvier seul fendra la flottante herbe verte, 6+6 a
15 Pour atteindre l'insecte à l'homme sur%-ivant. 6+6 b
Nos flambeaux feront place à l'ombre sous les astres ; 6+6 c
Et, comme nos splendeurs, s'en iront nos désastres 6+6 c
Dans l'éclat du soleil et la plainte du vent. 6+6 b
Mais en ces jours futurs que l'inconnu dérobe, 6+6 a
20 Si quelque nouveau peuple existe sur le globe, 6+6 a
Le grand peuple des jours meilleurs. 8 b
Le peuple fait d'amour, de lumière, de joie. 6+6 c
Où nul ne sera plus le bourreau ni la proie, 6+6 c
Où tous seront les travailleurs ; 8 b
25 S'il vient jamais, le peuple libre, 8 a
Le peuple beau, pur, fraternel. 8 b
Dont l'harmonieux équilibre 8 a
Rayonnera comme le ciel. 8 b
Et qui, sans combat ni victime, 8 c
30 De gravir le progrès sublime, 8 c
Infiniment, de cime en cime. 8 c
Fera son bonheur éternel ! 8 b
Les savants de ce peuple iront par nos collines, 6+6 a
Fouillant le sable triste où gisent les ruines 6+6 a
35 De la ville, jadis colosse radieux. 6+6 b
Et resteront muets de pieuse surprise 6+6 c
Devant un arc de pierre, un haut portail d'église, 6+6 c
Un fronton par lequel les grands hommes sont dieux. 6+6 b
Or, dans ce siècle-là, ne crois pas, ô poète, 6+6 a
40 Qu'une Europe sera sans Paris, corps sans tête, 6+6 a
Que les Allemands survivront. 8 b
La Béotie est morte en même temps qu'Athènes. 6+6 c
Les rivaux d'à présent, ombres alors lointaines. 6+6 c
Au même linceul dormiront. 8 b
45 Et comme on aimera l'idée et non le glaive, 6+6 a
Paris, pour l'avenir que pressentit son rêve, 6+6 a
Paris, pour ses frissons dont le monde fut plein. 6+6 b
Pour son rugissement contre les tyrannies. 6+6 c
Rayonnera parmi les poussières bénies… 6+6 c
50 — Mais nul ne cherchera la place où fut Berlin. 6+6 b
Poème récité par Mme Favart, à la Comédie Française, en janvier 1871.
mètre profils métriques : 8, 6+6
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