Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
REN_1/REN38
Armand RENAUD
Recueil intime
1881
III
L’ Alcyon
Belle de ta fierté, | dors en paix, ô mon âme. 6+6 a
Toutes les passions | qu’on cache ou qu’on proclame, 6+6 a
L’orgueil, l’ambition, | l’amour, la haine, font, 6+6 b
Pour t’entraîner en bas, | un tourbillon profond. 6+6 b
5 Les remous écumants | et les vagues livides 6+6 a
Mêlent, autour de toi, | les grands bonds aux grands vides. 6+6 a
Dors en paix, ô mon âme, | en haut de ton rocher. 6+6 b
Si de toi quelque flot | tente de s’approcher, 6+6 b
Ne crains rien. N’as-tu pas, | comme l’oiseau, des ailes ? 6+6 a
10 Imite l’alcyon | léger, aux blancheurs frêles, 6+6 a
Qui, dédaigneux du vent, | dominateur des flots, 6+6 b
Sur la pointe d’un cap | repose, les yeux clos, 6+6 b
De l’essor qu’il peut prendre | ayant la conscience. 6+6 a
Dors en paix, ô mon âme. | En toi prends confiance. 6+6 a
15 Ton repos s’est placé | sur de trop fiers sommets 6+6 b
Pour que rien des bas-fonds | y parvienne jamais. 6+6 b
Petitesses, calculs, | lâchetés, vilenies ; 6+6 a
Tout ce qui va rampant | sur les âmes ternies, 6+6 a
A peur, mime de loin, | d’affronter ton mépris. 6+6 b
20 Tout cela, dans les trous | se creusant des abris, 6+6 b
Ne tient qu’à vivre en paix, | sans chercher d’aventure ; 6+6 a
Tout cela ne hait rien, | n’aime que sa pâture, 6+6 a
Ne songe qu’a fermer | ses regards au danger 6+6 b
Des grandes visions | qui pourraient déranger. 6+6 b
25 N’en prends donc pas souci, | car c’est le néant même. 6+6 a
Sans y jeter les yeux, | reste en haut, aspire, aime, 6+6 a
O mon âme ; cela | n’a nul pouvoir sur toi. 6+6 b
Sans doute il est des flots | dignes de plus d’effroi. 6+6 b
A ceux-là, le puissant | tournoîment qui fascine, 6+6 a
30 Le jet qui saute au front, | le choc qui déracine, 6+6 a
Les trompeuses grandeurs, | les sombres voluptés, 6+6 b
Et parfois des rayons | de soleil reflétés 6+6 b
Par leur verdâtre houle. |
Oh ! fuis-les sans faiblesse ! 6+6 a
Comme ce qui salit, | dédaigne ce qui blesse, 6+6 a
35 Et qui n’est pas le pur | et sublime tourment 6+6 b
Du besoin d’idéal | qui te va consumant. 6+6 b
Laisse les flots humains | se ruer sur la roche 6+6 a
Où tu vis en rêvant, | sans peur et sans reproche ; 6+6 a
Car si jamais, l’ayant | par la base creusé, 6+6 b
40 Ils renversaient le faite | où ton vol s’est posé, 6+6 b
S’ils voulaient t’entraîner | à souffrir sur la terre 6+6 a
De quelque vain orgueil, | de quelque espoir vulgaire, 6+6 a
Plutôt que de subir | ces maîtres de trop près, 6+6 b
Je jure par la mort | que tu t’envolerais. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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