Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
REG_2/REG166
Henri de RÉGNIER
LES JEUX RUSTIQUES ET DIVINS
1897
LA CORBEILLE DES HEURES
L'Accueil
Le flot bleu qui se rue et se cabre à la côte 6+6 a
T’apporta, blanche et nue, en ses écumes d’or 6+6 b
Sur la plage saline où gronde la mer haute. 6+6 a
Tes beaux doigts ont saisi les crinières que tord 6+6 b
5 Le vent marin au col des lames dont la bouche 6+6 c
A bavé hennissante au roc dur qu’elle mord. 6+6 b
Fille du flot profond et de la mer farouche, 6+6 c
Te voici écumeuse et debout et riant 6+6 a
Au monstre paternel qui devant toi se couche. 6+6 c
10 L’aube pour t’accueillir se lève à l’orient ; 6+6 a
La terre en fleurs tressaille et hausse ses corolles 6+6 b
Jusqu’à ta jeune main qui passe en les pliant ; 6+6 a
La branche te caresse et te touche l’épaule, 6+6 b
Le caillou se détourne et roule sous tes pas, 6+6 c
15 Et l’écho t’accompagne et la brise te frôle. 6+6 b
Le Printemps t’a fêtée, ô Divine ! et, là-bas, 6+6 c
L’Été silencieux vers qui tu marches nue 6+6 a
Entr’ouvre sa paupière et lève ses yeux las. 6+6 c
Toute la plaine est d’or de t’avoir reconnue ; 6+6 a
20 La houle des blés mûrs s’enfle et déferle au vent 6+6 b
Et la source est joyeuse où ta beauté s’est vue. 6+6 a
Le flexible lierre et le pampre sanglant, 6+6 b
Les plantes de la mer, du fleuve et de la plaine 6+6 c
S’entrelacent autour de ton thyrse indolent. 6+6 b
25 L’heure semble attentive à ta grâce sereine ; 6+6 c
Pose ton pied charmant sur les mousses, et fais 6+6 a
De ta coupe perler l’onde de la fontaine. 6+6 c
Ton geste gracieux l’épanche au gazon frais. 6+6 a
Reste ainsi. Le soleil en sa gloire fleurie 6+6 b
30 Te sculpte une chair d’or dans un marbre de paix. 6+6 a
Mais regarde, là-bas, venir sur la prairie 6+6 b
Le Crépuscule lent et l’Automne qui tient 6+6 c
Son sceptre rouge où pend une grappe meurtrie. 6+6 b
L’un et l’autre, à leur tour, te prendront par la main ; 6+6 c
35 Ils savent les sentiers de la forêt fatale 6+6 a
Où tes pieds saigneront aux ronces du chemin. 6+6 c
Les fleurs que tu cueillis, pétale par pétale, 6+6 a
S’effeuilleront alors au thyrse dévasté, 6+6 b
Et la pluie et la brume autour de ta chair pâle, 6+6 a
40 Haletante au vent dur qui gerce ta beauté, 6+6 b
Tisseront lentement leurs voiles où frissonne 6+6 c
Le spectre de ta joie et de ta nudité. 6+6 b
Toi qui fus le Printemps que l’Été d’or couronne, 6+6 c
Tu n’es qu’une ombre errante écoutant, à travers 6+6 a
45 Les arbres nus, hennir au Temps qui les talonne 6+6 c
L’âpre déferlement des chevaux de la Mer. 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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