Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
REG_1/REG37
Henri de RÉGNIER
La Cité des eaux
1902
FUNÉRAILLES
FUNÉRAILLES
Le bûcher dressé là pour ce nouvel Hercule, 6+6 a
Emplit l'horizon rouge et le ciel empourpré ; 6+6 b
Et la nuit s'illumine et tout entière brûle 6+6 a
A l'ardente splendeur de ce couchant sacré. 6+6 b
5 Au brasier fraternel où se tordent ensemble 6+6 a
Le laurier odorant et le chêne fumeux, 6+6 b
Une foule sans cris se hâte et se rassemble 6+6 a
Afin d'en emporter le reflet en ses yeux ; 6+6 b
Et quelques-uns, penchés sur la flamme féconde, 6+6 a
10 Y viennent allumer leur torche et leur flambeau, 6+6 b
Pour éclairer encor les ténèbres du monde 6+6 a
Quand le bûcher noirci ne sera qu'un tombeau. 6+6 b
Et c'est ainsi qu'ayant emprunté l'étincelle 6+6 a
A l'énorme incendie en sa gloire écroulé 6+6 b
15 Ils s'en repasseront la clarté mutuelle, 6+6 a
Et l'une brillera quand l'autre aura brûlé, 6+6 b
Jusqu'à l'heure où ce feu vacillant et débile 6+6 a
Ne soit plus au regard du passant incertain 6+6 b
Que le dernier rayon de la lampe d'argile 6+6 a
20 Que ménage le pas et que couvre la main. 6+6 b
* * *
Qu'il éblouisse l'ombre ou couve sous la cendre, 6+6 a
Au geste de l'Amour comme aux doigts de Psyché, 6+6 b
Qu'il monte la montagne ou qu'il la redescende, 6+6 a
Qu'il soit lampe, foyer, flambeau, torche ou bûcher, 6+6 b
25 Sa flamme inextinguible, éternelle et divine, 6+6 a
Ira jusques au fond des siècles à venir. 6+6 b
Que le souffle la courbe ou que le vent l'incline, 6+6 a
Car elle est immortelle et ne peut pas finir ; 6+6 b
Puisque l'âme de l'homme en elle se consume 6+6 a
30 Et qu'elle est née en lui de ce jour enchanté 6+6 b
Où, sereine et debout devant son amertume, 6+6 a
Apparut à ses yeux ton image, ô Beauté ! 6+6 b
Ton doigt blanc s'est posé sur son cœur qui palpite 6+6 a
Et qui bat à jamais et qui brûle en son sein, 6+6 b
35 Et depuis lors un Dieu mystérieux l'habite, 6+6 a
Et l'éclair a jailli qui ne s'est plus éteint. 6+6 b
* * *
Et maintenant bûcher, gronde, rougeoie, éclate. 6+6 a
Change la feuille en flamme et la branche en tison 6+6 b
Et dresse les cent nœuds de ton hydre écarlate 6+6 a
40 Dont les langues d'or clair dévorent l'horizon ! 6+6 b
Celui qui rassembla ta masse formidable 6+6 a
A détourné le fleuve à travers la forêt 6+6 b
Et, comme au seuil des temps son frère de la Fable, 6+6 a
Une course éternelle a tendu son jarret. 6+6 b
45 Le lion a rugi sous sa massue ardente ; 6+6 a
Il empoigna le noir sanglier par son crin 6+6 b
Et, du fauve farouche à la bête fumante, 6+6 a
Ses pieds nus ont rejoint la biche aux pieds d'airain ; 6+6 b
Mais, au lieu de percer de sa flèche intrépide 6+6 a
50 L'engeance aux rauques cris du lac aux noires eaux 6+6 b
Et de saisir, fougueux, l'étalon par la bride, 6+6 a
Il a forcé les Sons, il a dompté les Mots. 6+6 b
Ils ont autour de lui dansé comme des Faunes. 6+6 a
Les Nymphes ont souri de sa témérité 6+6 b
55 Et, grave, il a tressé d'immortelles couronnes 6+6 a
Et des guirlandes d'or au front de la Beauté. 6+6 b
Sa main forte a cueilli les pommes à la branche 6+6 a
Du jardin bleu gardé par le Dragon rampant. 6+6 b
La neige de l'hiver fleurit sa barbe blanche, 6+6 a
60 Et sa lyre d'ivoire a des cordes d'argent. 6+6 b
Plutôt que de dormir sous le marbre et sous l'herbe, 6+6 a
O flamme, prends sa chair et consume ses os ; 6+6 b
Donne à cet autre Hercule et qui dompta le Verbe 6+6 a
Le bûcher mérité par ses Mille Travaux ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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