Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
REG_1/REG29
Henri de RÉGNIER
La Cité des eaux
1902
SALUT A VERSAILLES
LA LOUANGE DES EAUX, DES ARBRES ET DES DIEUX
Plus même un cygne errantaux herbes qu'il remue 6+6 a
Dans l'eau silencieuseet déserte aujourd'hui, 6+6 b
De l'ombre de son aileen marquant l'heure aiguë 6+6 a
Ne trouble les bassins rôde son ennui. 6+6 b
5 La source souterraine le flot pur abonde 6+6 a
Confond son frais cristalà leur tiède torpeur, 6+6 b
Et son onde secrèteau lieu que vagabonde 6+6 a
Se disperse, s'ajouteet se mêle à la leur ; 6+6 b
Plutôt que d'arroserles roses riveraines, 6+6 a
10 De sourdre en les roseauxet, du soir au matin, 6+6 b
De chanter et de rireaux gorges des fontaines, 6+6 a
Elle entre au lourd sommeildes antiques bassins. 6+6 b
Je sais bien que, parfois,pour un faste suprême, 6+6 a
Le parc silencieuxpeut ranimer ses eaux 6+6 b
15 Et d'un fluide, clairet mouvant diadème, 6+6 a
Couronner sa tristesseet sacrer son repos ; 6+6 b
Alors s'épanouit,monte, bifurque et fuse 6+6 a
Le jet qui joue au cielun clair bouquet vivant 6+6 b
Et, bruine, pluie éparseet poussière confuse, 6+6 a
20 S'irise aux feux du prismeet se disperse au vent. 6+6 b
Ce qui fut neige, éclairs,cristal et pierreries 6+6 a
Retombe et flotte encorsur le bassin troublé 6+6 b
Et bave et rôde autourdes bêtes accroupies, 6+6 a
Béantes de l'effort leur col s'est enflé. 6+6 b
25 Car l'eau, pour qu'elle darde,étincelle et jaillisse, 6+6 a
A passé par leur gorgeen hoquets lumineux, 6+6 b
Lavant le bronze rauqueet mouillant le plomb lisse 6+6 a
rampe un ventre mouprès d'un dos épineux. 6+6 b
Je sais que pour dompterla horde fabuleuse 6+6 a
30 Qui aboie en silenceet qui hurle sans voix 6+6 b
Et jette à leurs pieds nussa colère écumeuse, 6+6 a
Il est toujours des dieuxdebout et l'arc aux doigts. 6+6 b
J'en ai vu qui dressaientsous la pluie irisée 6+6 a
Le sceptre, le trident,la massue et la faux 6+6 b
35 Et, divins moissonneursde la gerbe brisée, 6+6 a
Cassaient d'un geste durla tige des jets d'eaux ; 6+6 b
D'autres, le pied au socleou serrés dans la gne 6+6 a
Qui porte leur statureou qui leur monte au flanc, 6+6 b
Et l'un d'eux dont la courseéternellement vaine 6+6 a
40 Précipitait encorson immobile élan. 6+6 b
Aucun n'a plus besoin,pour réduire au silence 6+6 a
Les Dauphins de la vasqueet les Dragons du bord, 6+6 b
De lever le tridentou de brandir la lance 6+6 a
Sur le mufle d'airainou sur la gueule d'or. 6+6 b
45 Tout s'est tu. Le soleilaux jointures des dalles 6+6 a
Chauffe la mousse droiteet, tournant autour d'eux, 6+6 b
Allonge doublementles ombres inégales 6+6 a
Des buis pyramidauxet des ifs anguleux ; 6+6 b
Mais toi, las des jardinssomnolents et superbes 6+6 a
50 le bronze verdità l'abri du cyprès, 6+6 b
Laisse l'allée arideet marche dans les herbes 6+6 a
Loin du parc mort tailléau milieu des forêts ; 6+6 b
Si ta bouche désireune eau qui désaltère 6+6 a
Et non l'onde croupieaux feuilles des bassins, 6+6 b
55 Couche-toi sur le ventreet pose contre terre 6+6 a
Ton oreille attentiveaux appels souterrains ; 6+6 b
Car toute la forêtchante de sources vives 6+6 a
Dont le murmure éparscircule au sol vivant, 6+6 b
Et leur sombre frcheur,nourricière et furtive, 6+6 a
60 En elle s'insinueet partout se répand. 6+6 b
Ce sont elles qui fontdu tissu des racines 6+6 a
Surgir le hêtre droitet le chêne aux durs nœuds, 6+6 b
Et c'est vers leur attraitque se penche et s'incline 6+6 a
Le bouleau jaune et blancparmi les saules bleus. 6+6 b
65 Ce sont elles qui font,sur les mousses des sentes, 6+6 a
Errer les mêmes dieuxà longs traits enivrés 6+6 b
D'avoir rebu la vieaux eaux adolescentes 6+6 a
se sont rajeunisleurs corps régénérés. 6+6 b
Salut, ô vous, amisdes sources forestières ! 6+6 a
70 Nul ne vous a sculptédes visages d'airain, 6+6 b
Ni des torses de bronzeou des hanches de pierre ; 6+6 a
Aucun marbre immortelne vous a faits divins. 6+6 b
Le chêne vous ébaucheen son tronc énergique. 6+6 a
Vous êtes à la foispartout la forêt 6+6 b
75 Pousse des profondeursde la terre magique 6+6 a
Son aspect surhumain le vôtre appart. 6+6 b
Elle vous a prêtéses formes et ses forces ; 6+6 a
Votre souffle est en elleet le sien vous émeut, 6+6 b
Et par vos muscles sourdsqui bombent les écorces, 6+6 a
80 Chaque arbre porte en luila stature d'un dieu. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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