Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
QUI_1/QUI41
Pierre QUILLARD
La lyre héroïque et dolente
1897
LA GLOIRE DU VERBE
MAYA
LIEDER
Ich, ein tolles Kind, ich singe
Jetzo in der Dunkelheit ;
Klingt das Lied auch nicht ergötzlich,
Hat es mich doch vor Angst befreit.
(Heinrich Heine, Die Heimkehr.)
I
 Des mots doux comme des hautbois 8 a
 Et des harpes surnaturelles, 8 b
 Des sons légers de chanterelles 8 b
 Et dans les bois, des voix, des voix. 8 a
5  Des couples blancs de tourterelles, 8 a
 Des oiseaux bleus couleur du temps ; 8 b
 Des ailes d'or sur les étangs, 8 b
 Dans le ciel des ailes, des ailes. 8 a
 Je ne sais : je vois, j'entends. 8 a
10  Voici venir la très aimée 8 b
 Et sa cheville parfumée 8 b
 Foule des tapis éclatants ; 8 a
 Sa robe candide est lamée 8 a
 De l'or du paradis natal ; 8 b
15  Des feux de myrrhe et de çantal 8 b
 L'entourent de blonde fumée. 8 a
 Plus rien, plus rien ! le deuil brutal, 8 a
 Le silence et l'ombre. Serait-ce 8 b
 Que la perfide enchanteresse 8 b
20  A forgé ce mur de métal 8 a
 Et clos dans la nuit vengeresse, 8 a
 Sans ailes d'or et sans hautbois, 8 b
 Les mots doux comme une caresse, 8 a
 Et les colombes, sœurs des voix ? 8 b
II
25  Ni tes fiertés, ni tes paresses 8 a
 Ni l'espoir menteur des caresses, 8 a
 Ni ta chair de vierge, j'aimais 8 a
 La splendeur de ma propre idée, 8 b
 O mtresse non possédée 8 b
30  Qui ne me trahiras jamais 8 a
 Je garde en mon âme hautaine 8 a
 Le rêve frais de la fontaine 8 a
 Et des nénufars ingénus ; 8 a
 Je laisse aux lèvres sans extase 8 b
35  L'eau noire et, grouillant dans la vase, 8 b
 Tous les reptiles inconnus, 8 a
 Loin de l'hivernale vallée 8 a
 L'aile des fleurs s'est envolée 8 a
 Et le murmure des nids verts 8 a
40  Cherche, avec le vol des pétales, 8 b
 Dans les aubes orientales 8 b
 L'éternel printemps de mes vers. 8 a
 C'est l'heure que j'ensevelisse 8 a
 La blancheur du dernier calice 8 a
45  Avec les souvenirs défunts : 8 a
 O nuptiale Galatée, 8 b
 Rends-moi la corolle empruntée, 8 b
 Rends-moi le songe des parfums, 8 a
 Pour que je tisse avec mes strophes 8 a
50  Un linceul de riches étoffes 8 a
 Embaumé de myrrhe et de nard 8 a
 Et que je jette sur mon rêve 8 b
 De jeunesse et de gloire brève 8 b
 La pourpre antique de Schinnar. 8 a
III
55  Pour moi seul tes cheveux de saule 8 a
 Se déroulent sur ton épaule 8 a
 Comme les feuilles dans le vent, 8 a
 Et, tel que sur la neige vierge 8 b
 Frémit un frisson d'or mouvant, 8 a
60  De l'aube de ta chair émerge 8 b
 Une fleur de soleil levant. 8 a
 Car seul je connais les paroles, 8 a
 Sœurs des feuilles et des corolles, 8 a
 Qui puissent dire ta beauté ; 8 a
65  Je sais les phrases rituelles 8 b
 Par qui, dans le bois enchanté, 8 a
 L'ombre des amantes cruelles 8 b
 Revive pour l'éternité. 8 a
 Rires et larmes infinies ! 8 b
70  Si je chantais tes litanies 8 b
 Et le miel de tes seins rosés 8 a
 Je ferais voler dans les brises, 8 a
 Au delà des jours épuisés, 8 b
 L'abeille des lèvres éprises 8 a
75  Vers la ruche de tes baisers. 8 b
 Mais je tais avec jalousie 8 a
 Les chers mots dont je m'extasie : 8 a
 Les hommes passent et s'en vont ; 8 a
 Le bruit des foules abhorrées 8 b
80  Roule et le miel divin se fond 8 a
 En perles de gouttes dorées 8 b
 Dans l'urne de mon cœur profond. 8 a
IV
Ta voix, ta même voixde colombe blessée 6+6 a
Sonne plaintivementdans ta gorge lassée. 6+6 a
85 J'entends encor l'échodes paroles d'antan 6+6 a
Lorsque les mots ailéss'envolent en chantant. 6+6 a
Mais je ne comprends plusles syllabes ; j'oublie 6+6 a
Ce qui fait leur langueuret leur mélancolie. 6+6 a
Je crois t'ouïr parlerun langage inconnu 6+6 a
90 Sur des airs dont mon cœurs'est en vain souvenu, 6+6 a
Et je peois parmila musique rhythmée 6+6 a
La voix d'une étrangèreou d'une morte aimée. 6+6 a
V
 Reine du magique palais, 8 a
 En ce jeu cruel que tu joues, 8 b
95  Comme tes sœurs, tu te complais 8 a
 Aux larmes roulant sur nos joues. 8 b
 Quand tu presses le vin des cœurs 8 a
 L'étoile de tes yeux rutile, 8 b
 L'étoile de tes yeux vainqueurs 8 a
100  Rit de la lâcheté virile. 8 b
 Tandis que, dans la paix du soir, 8 a
 Les désirs—tels de mauvais anges— 8 b
 Portent aux meules du pressoir 8 a
 Les grappes des rouges vendanges. 8 b
105  Soit ! en tes rêves assassins 8 a
 Grise-toi des pourpres foulées 8 b
 Et noue au-dessous de tes seins 8 a
 Des peaux fauves et tavelées. 8 b
 Sois la bacchante que les dieux 8 a
110  Lâchent sur la terre ; promène 8 b
 L'orgueil de tes flancs radieux 8 a
 Au milieu de la vigne humaine. 8 b
 Va ! que les héros asservis 8 a
 Et les poètes que tu crées 8 b
115  Se courbent hurlants et ravis 8 a
 Devant tes colères sacrées : 8 b
 Tes triomphes sont imparfaits, 8 a
 Ta gloire sanglante est un leurre ; 8 b
 Tu n'as pas su que je t'aimais 8 a
120  Et tu ne sais pas que je pleure. 8 b
VI
 Les moires vertes des feuillées 8 a
 Attendent le Prince Charmant 8 b
 Et sous les gemmes de rosée 8 a
 L'aubépine est une épousée 8 c
125  D' s'exhale amoureusement 8 b
 L'âcre parfum des fleurs mouillées. 8 c
 Des lèvres que nul ne connt 8 a
 Ont bu les gemmes disparues : 8 b
 Pourquoi le Prince viendrait-il, 8 c
130  O forêt ? le parfum subtil 8 c
 Meurt dans les poussières accrues 8 b
 Sur l'aubépine et le genêt. 8 a
 La plainte lente des ramures 8 a
 Geint sinistrement et déjà 8 b
135  Les nains méchants des avenues 8 c
 Font saigner sur les branches nues 8 c
 Que leur caprice ravagea 8 b
 La chair automnale des mûres. 8 a
VII
Plus quam femina virgo
(P. Ovidius Naso, Métamorphoses,Livre XIII.)
Plus claires dans le sombreazur des nuits sans lune 6+6 a
140 Les étoiles doraientles ajoncs et la dune, 6+6 a
Mais je n'ai pas soucide leur ruissellement 6+6 a
Et dans mes yeux fleurisde visions plus belles, 6+6 b
Baignant les cieux futursde leurs splendeurs nouvelles, 6+6 b
Les astres à venirmontent éperdument. 6+6 a
145 Tu glissais à pas lentsdans les ajoncs stellaires 6+6 a
Et sourde à la rumeurhumaine des colères 6+6 a
Tu regardais surgirles astres apaisés ; 6+6 a
Mais dans mon cœur fleuride voluptés plus calmes, 6+6 b
J'évoque au chant lointaindes sources et des palmes 6+6 b
150 Les vierges à veniret les futurs baisers. 6+6 a
VIII
 La fleur énorme de la mer 8 a
 Éclose avec l'aurore sainte 8 b
 Renaissait dans le gouffre amer 8 a
 De tes prunelles d'hyacinthe. 8 b
155  Dans tes cheveux d'or j'adorais, 8 a
 Sous l'or caduc de leur couronne, 8 b
 Les impériales forêts 8 a
 Et leur laticlave d'automne. 8 b
 Les peupliers glauques et blancs 8 a
160  Et la mollesse des prairies 8 b
 Revivaient dans les gestes lents 8 a
 De tes mains douces et fleuries. 8 b
 Mais aujourd'hui que tu n'es plus 8 a
 La prêtresse et l'évocatrice, 8 b
165  Il faut les bois et les reflux 8 a
 Pour que ta grâce refleurisse 8 b
 Et les colchiques du matin 8 a
 Ressuscitent dans ma pensée 8 b
 Ta pâleur morne de satin, 8 a
170  O mensongère Fiancée. 8 b
IX
Tout à l'heure, un essaimde mauves s'envolait, 6+6 a
Majestueux, au rasdes vagues aurorales : 6+6 b
Les oiseaux fendaient l'airde leurs ailes égales 6+6 b
Et nageaient dans l'azurvers l'horizon de lait. 6+6 a
175 Ils allaient : le soleilsemait sur les prairies 6+6 a
Marines des fleurs d'oret de chrysobéril 6+6 b
Et l'on t cru là-basdes papillons d'avril 6+6 b
Sur un champ constelléde rares pierreries. 6+6 a
Ils allaient : maintenantque dans le clair matin 6+6 a
180 La blancheur de leur volsplendide s'est fondue, 6+6 b
Je cherche obstinémentau fond de l'étendue 6+6 b
Le souvenir neigeuxde leur essor lointain. 6+6 a
Nul des flocons perdusdans les brumes d'opale 6+6 a
N'argente plus la plaineimmobile des flots 6+6 b
185 Et la seule clameurdes antiques sanglots 6+6 b
Monte plus tristementvers le lac du ciel pâle. 6+6 a
O Chère, ô pâle cield'amour qui te mirais 6+6 a
Dans la mer somptueuseet calme de mes rêves 6+6 b
Quels abîmes d'azuret d'Océans sans grèves 6+6 b
190 Ont englouti le volde mes désirs secrets ? 6+6 a
Je ne sais : le regarda lassé ma prunelle, 6+6 a
La solitude morneemplit mon cœur, j'entends 6+6 b
Dans le double infinide l'espace et du temps 6+6 b
Monter le râle amerde l'angoisse éternelle. 6+6 a
X
195 Je ne veux pas courberla tête sous tes pas 6+6 a
Ni baisser devant toimes yeux ; je ne suis pas 6+6 a
Un mendiant d'amouret d'aumônes charnelles 6+6 a
Et la honte des pleurssouillerait mes prunelles. 6+6 a
Mais dans la nuit semblableà mon cœur sombre et fier 6+6 a
200 J'irai dire mon malaux vagues de la mer : 6+6 a
Elle me bercerala mer consolatrice 6+6 a
Avec des rhythmes lentset des chants de nourrice. 6+6 a
J'écouterai sa voixet je m'endormirai : 6+6 a
Comme un enfant, tandisqu'en un jardin sacré 6+6 a
205 Surgira, bleu de rêveet parfumé de menthe, 6+6 a
Le magique palais tu seras clémente. 6+6 a
mètre profils métriques : 8, 6+6
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