Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
PRU_2/PRU86
René-François SULLY PRUDHOMME
Les Solitudes
1867
LE MISSEL
Dans un missel datant | du roi François premier, 6+6 a
Dont la rouille des ans | a jauni le papier 6+6 a
Et dont les doigts dévots | ont usé l'armoirie, 6+6 b
Livre mignon, vêtu | d'argent sur parchemin, 6+6 c
5 L'un de ces fins travaux | d'ancienne orfèvrerie 6+6 b
Où se sentent l'audace | et la peur de la main, 6+6 c
J'ai trouvé cette fleur flétrie. 8 b
On voit qu'elle est très vieille | au vélin traversé 6+6 a
Par sa profonde empreinte | où la sève a percé. 6+6 a
10 Il se pourrait qu'elle eût | trois cents ans ; mais n'importe, 6+6 b
Elle n'a rien perdu | qu'un peu de vermillon, 6+6 c
Fard qu'elle eût vu tomber | même avant d'être morte, 6+6 b
Qui ne brille qu'un jour, | et que le papillon, 6+6 c
En passant, d'un coup d'aile emporte ; 8 b
15 Elle n'a pas perdu | de son cœur un pistil, 6+6 a
Ni du frêle tissu | de sa corolle un fil ; 6+6 a
La page ondule encore | où sécha la rosée 6+6 b
De son dernier matin, | mêlée à d'autres pleurs ; 6+6 c
La mort en la cueillant | l'a seulement baisée, 6+6 b
20 Et, soigneuse, n'a fait | qu'éteindre ses couleurs, 6+6 c
Mais ne l'a pas décomposée. 8 b
Une mélancolique | et subtile senteur, 6+6 a
Pareille au souvenir | qui monte avec lenteur, 6+6 a
L'arome du secret | dans les cassettes closes, 6+6 b
25 Révèle l'âge ancien | de ce mystique herbier ; 6+6 c
Il semble que les jours | se parfument des choses, 6+6 b
Et qu'un passé d'amour | ait l'odeur d'un sentier 6+6 c
Où le vent balaya des roses. 8 b
Et peut-être, dans l'air | sombre et léger du soir, 6+6 a
30 Un cœur, comme une flamme, | autour du vieux fermoir, 6+6 a
S'efforce, en palpitant, | de se frayer passage ; 6+6 b
Et chaque soir peut-être | il attend l' angelus, 6+6 c
Dans l'espoir qu'une main | viendra tourner la page 6+6 b
Et qu'il pourra savoir | si rien ne reste plus 6+6 c
35 De la fleur qui fut son hommage. 8 b
Eh bien ! Rassure-toi, | chevalier qui partais 6+6 a
Pour combattre à Pavie | et ne revins jamais ; 6+6 a
Ou page qui, tout bas, | aimant comme on adore, 6+6 b
Fis un aveu d'amour | d'un ave maria : 6+6 c
40 Cette fleur qui mourut | sous des yeux que j'ignore, 6+6 b
Depuis les trois cents ans | qu'elle repose là, 6+6 c
Où tu l'as mise elle est encore. 8 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
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