Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
PRU_2/PRU68
René-François SULLY PRUDHOMME
Les Solitudes
1867
LA LYRE ET LES DOIGTS
Une muse, immobile | et la tête penchée, 6+6 a
Ne chantait plus ; la lyre | en soupirait d'ennui, 6+6 b
Et, se plaignant aux doigts | de n'être plus touchée, 6+6 a
Disait : « quelle torpeur | vous enchaîne aujourd'hui ? 6+6 b
5 « je ne puis rien sans vous, | réveillez-vous, doigts roses ; 6+6 a
L'air est si lourd, j'ai peine | à vous parler tout bas, 6+6 b
Car mes fibres sans vous, | comme des lèvres closes, 6+6 a
Amoncellent des voix | qui ne s'élèvent pas. 6+6 b
« abattez-vous sur moi, | comme au vol du zéphire 6+6 a
10 On voit dans les rayons | tourbillonner les fleurs ; 6+6 b
Arrachez-moi mon cri | comme au lin qu'on déchire, 6+6 a
Ou sur moi, lentement, | glissez comme des pleurs. 6+6 b
« sinon, si par mépris | vous me laissez oisive, 6+6 a
Rendez ma double branche | au front carré des bœufs ; 6+6 b
15 De quel autre baiser | voulez-vous que je vive 6+6 a
Que du baiser des doigts | qui m'ont faite pour eux ? » 6+6 b
— « lyre, que pouvons-nous ? | Sommes-nous l'harmonie ? 6+6 a
Est-ce nous le délire ? | Est-ce nous la langueur ? 6+6 b
Et ne sentons-nous pas, | esclaves du génie, 6+6 a
20 Tous nos frissons liés | par le sommeil du cœur ? 6+6 b
« il est le dieu, la main | subit sa fantaisie : 6+6 a
Parfois il nous trahit | sans nous avoir lassés, 6+6 b
Et parfois, sans pitié, | sa longue frénésie 6+6 a
Nous agite sanglants | dans les sept fils cassés ! 6+6 b
25 « implore-le toujours, | quelques chants que tu veuilles, 6+6 a
Car nous les lui devons, | les chants que tu nous dois : 6+6 b
Sans les brises d'été | plus de murmure aux feuilles, 6+6 a
Sans les souffles du cœur | plus d'éloquence aux doigts ! » 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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