Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
PON_1/PON85
Raoul PONCHON
La muse au cabaret
1920
PROPOS DE TABLE
LA TANTE DE NOTRE ONCLE
À Maurice Donnay.
« Au sortir du spectacle, je rencontrai une vieille
tante à moi… — « J’espère, me dit-elle, que tu diras
du bien de cette pièce… » Ce fut pour moi un trait
de lumière. Je connaissais ma tante. Du moment
qu’elle s’était plu à la « Jeanne d’Arc » de Barbier,
j’étais sûr que le Marais et le Sentier y afflueraient,
… etc. »
Francisque Sarcey.
(La Dépêche de Toulouse.)
21 octobre 1894.
…Or, j’avais une tante… oh ! mais, pas une tante… 6+6 a
Vous savez bien… non, non… Une femme épatante, 6+6 a
Dont vous avez ici, devant vous, le neveu. 6+6 b
Elle était très austère et n’allait que fort peu 6+6 b
5 Au théâtre, que moi je goûte sans partage — 6+6 a
Jusques au jour qu’elle y fréquenta davantage. 6−6 a
Mais, passons…
Un beau soir donc, venait de finir 6+6 b
Une pièce dont j’ai perdu le souvenir, 6+6 b
Laquelle avait été fraîchement accueillie 6+6 a
10 — Si j’étais plus méchant, je vous dirais « cueillie » — 6+6 a
Elle fut déclarée horriblement pompier. 6+6 b
Et rasante… ah ! j’y suis… elle était de Barbier ! 6+6 b
Moi, je n’en pouvais plus d’avoir vu cette ordure, 6+6 a
Sans ombre de bon sens ni de littérature ; 6+6 a
15 Mais voilà qu’au moment que j’allais m’en aller, 6+6 b
Songeant aux adjectifs dont je dois l’accabler, 6+6 b
Ma tante Jézabel devant moi s’est montrée 6+6 a
Comme au jour de sa mort pompeusement parée 6+6 a
Non… ça, c’est du Racine. Excusez-moi, mon Dieu. 6+6 b
20 Ma tante me dit donc comme ça : « Mon neveu. 6+6 b
J’espère que vous n’aurez pas la hardiesse 4+4+4 a
D’excommunier cette incomparable pièce. 6−6 a
Elle est patriotique et morale. » — Allons, bon ! 6+6 b
Je te ferai sur elle un soigné feuilleton, 6+6 b
25 Lui dis-je. Il est certain pour moi que si la pièce 6+6 a
Te plaît, elle en mettra bien d’autres en liesse. 6+6 a
Et les événements me donnèrent raison. 6+6 b
À partir de ce jour, j’eus le même horizon 6+6 b
Que ma tante, et son opinion fut la mienne, 4+8 a
30 Étant celle, après tout, de la sombre moyenne 6+6 a
Du public. Oui, messieurs, à partir de ce jour, 6+6 b
Je ne parlais jamais d’un succès ou d’un four 6+6 b
Sans avoir consulté ma vénérable tante. 6+6 a
Je me montrais ravi, quand elle était contente. 6+6 a
35 Et tous les feuilletons dont j’ai tiré profit, 6+6 b
Autant dire que c’est la « povre » qui les fit. 6+6 b
Sans elle, un jour, j’avais prôné « la Bûcheronne » 6+6 a
Eh bien, il s’en fallait que la pièce fût bonne. 6+6 a
Elle n’était que chiffe, elle n’était que vent. 6+6 b
40 Ma tante me le fit savoir, le jour suivant. 6+6 b
Croyais-je sottement que tel drame était triste ? 6+6 a
Ma tante me disait : « Va donc, vieux pessimiste ! » 6+6 a
Et me prouvait, par A plus B, que j’avais tort. 6+6 b
J’allais donc le revoir, et je m’en tords encor. 6+6 b
45 S’était-elle, en revanche, amplement ennuyée 6+6 a
Où j’avais pouffé, moi, à gorge déployée, 6+6 a
Je revenais tôt sur mon premier jugement, 6−6 b
Et m’ennuyais alors rétrospectivement. 6+6 b
Or, voilà très longtemps que cette tante est morte. 6+6 a
50 Et cependant, j’écris toujours, en quelque sorte. 6+6 a
Mais je ne sais plus bien ce que je dis… oh ! non. 6+6 b
Et chaque fois c’est la même chose, cré nom ! 6−6 b
Je demeure anxieux devant la page blanche, 6+6 a
Quand je dois perpétrer mon lundi du dimanche. 6+6 a
55 Et le cœur tout rempli d’un singulier émoi, 6+6 b
Je dis : « Du haut du Ciel, ma tante, inspire-moi ! » 6+6 b
mètre profil métrique : 6=6
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