Métrique en Ligne
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F = "e" féminin
| = césure
PDE_1/PDE6
corpus Pamela Puntel
Joseph POISLE-DESGRANGES
PENDANT L’ORAGE
POÈMES NATIONAUX ET HISTORIQUES
1871
ÉPÎTRE AU ROI DE PRUSSE
DÉDIÉE A MLLE AGAR DE LA COMÉDIE FRANÇAISE
Ah ! C’en est trop, Guillaume ! Oses-tu dans ta main 6+6 a
Conserver plus longtemps ton poignard inhumain ? 6+6 a
Le Dieu vengeur, qui marque au front les fratricides, 6+6 b
Absout-il les forfaits des tyrans homicides ?… 6+6 b
5 Assez de sang versé !… Le sombre aspect des morts 6+6 a
Aurait dû t’inspirer la crainte et le remords. 6+6 a
Songe qu’en allumant le foyer de la guerre, 6+6 b
Pour consumer l’église et brûler la chaumière, 6+6 b
Tu marches sur un sol où la cendre est de feu ! 6+6 a
10 Ton char n’y peut courir sans rougir son essieu ; 6+6 a
Et le fer qui rougit, en chauffant perd sa force ; 6+6 b
Il est ce qu’au bois dur est la flexible écorce. 6+6 b
Ton char doit donc périr dans son fougueux trajet 6+6 a
Si, régnant pour la guerre, elle t’a pour sujet. 6+6 a
15 Crois-tu qu’un cavalier se tient toujours en selle ? 6+6 b
A la longue il se lasse, à la longue il chancelle. 6+6 b
Ton coursier, qui vécut de l’herbe des tombeaux, 6+6 a
Laisse jaillir le sang du fond de ses naseaux ; 6+6 a
Il écume, il se cabre et mord parfois sa bride, 6+6 b
20 Ne pouvant mordre au vif l’assassin qui le guide ; 6+6 b
Car il sait des secrets qui font pâlir d’horreur ! 6+6 a
Tu vantes tes exploits, tu vantes la valeur 6+6 a
De tes soudards grisés par le vin et les crimes : 6+6 b
Dans nos champs ton cheval a compté les victimes 6+6 b
25 Que la mort moissonna comme des épis blonds… 6+6 a
Les boulets, les obus ont détruit nos maisons. 6+6 a
La flamme a dévoré nos biens, notre récolte ; 6+6 b
Et, refoulant en nous notre juste révolte, 6+6 b
Ton plomb cruel frappa le soldat défenseur : 6+6 a
30 Tu fusillas le frère à côté de la sœur ; 6+6 a
Le fils tomba mourant sur le sein de sa mère, 6+6 b
Et deux enfants gisaient sur les corps de leur père !… 6+6 b
Tu vis cela, Guillaume, et tu fus sans émoi ; 6+6 a
Ah ! qu’on a le cœur dur sous le manteau de roi ! 6+6 a
35 Si l’homme devient bronze en montant sur le trône, 6+6 b
Peuple ! brise à tes pieds la dernière couronne. 6+6 b
Quoi ! nos pauvres enfants mourront tous sans linceul 6+6 a
Et par décret du roi ! La volonté d’un seul 6+6 a
Doit-elle dominer la volonté des autres ? 6+6 b
40 Monarques, vos destins sont différents des nôtres : 6+6 b
Nous périssons pour vous ; mais vous, grands rois, jamais 6+6 a
On ne vous vit péris pour sauver vos sujets ! 6+6 a
C’est assez obéir à votre ordre suprême ; 6+6 b
Le cœur d’un fils vaut mieux qu’un riche diadème ! 6+6 b
45 Rois, gardez vos trésors ; laissez-nous nos enfants, 6+6 a
Ils sont chers au vieillard comme ses chevaux blancs ! 6+6 a
Guillaume, tu souris à ce que j’ai su dire, 6+6 b
Puis tu réponds ces mots : — Celui qu’il faut maudire, 6+6 b
Français, ce n’est pas moi, mais bien votre empereur ; 6+6 a
50 Il a voulu la guerre, et j’en ai tout l’honneur ! 6+6 a
— L’honneur !… Ah ! je t’arrête au milieu de ta gloire : 6+6 b
Car quiconque vivra gardera la mémoire 6+6 b
De tes déloyautés et de ta trahison : 6+6 a
Quand le maître est dehors, tu pilles la maison ! 6+6 a
55 L’empereur est à bas, il t’a rendu ses armes, 6+6 b
Et tu poursuis la lutte avec tes fiers gendarmes ! 6+6 b
Nous demandions la paix, et tu répondis : — Non, 6+6 a
Je veux jusqu’à la mort régner par le canon ! 6+6 a
J’ai du plaisir à voir Lutèce se défendre ; 6+6 b
60 Mais mon bonheur sera de tout réduire en cendre, 6+6 b
Si Paris ne meurt point torturé par la faim ! 6+6 a
Je veux le voir souffrir,… souffrir jusqu’à la fin… 6+6 a
NÉRON ! Oui, permets-moi de te donner, Guillaume, 6+6 b
Ce nom qui t’appartient bien plus que ton royaume ; 6+6 b
65 Car je ne conçois pas, sous l’ère des chrétiens, 6+6 a
Qu’un homme ait des projets, NÉRON, comme les tiens ! 6+6 a
Ah ! tu veux voir brûler la cité la plus belle ! 6+6 b
Ah ! tu veux que l’enfant périsse à la mamelle ! 6+6 b
Que la mère n’ait plus qu’un corps livide et froid, 6+6 a
70 Tandis que tes soldats crîront : — Vive le roi ! 6+6 a
Ah ! tu veux t’égayer au château de Versaille, 6+6 b
Pendant que nos guerriers se tordront sur la paille, 6+6 b
Terrassées par la faim, ce mal cruel, affreux !… 6+6 a
Opprobre de la Prusse et monstre à tous les yeux ! 6+6 a
75 César en raccourci ! césar de bas-empire ! 6+6 b
Je m’étonne, en ce jour où la haine transpire, 6+6 b
Qu’un spartiate prussien, lassé des conquérants, 6+6 a
Qu’un moderne Brutus n’ait point percé tes flancs ! 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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