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| = césure
PAR_1/PAR47
Évariste de PARNY
Œuvres complètes
tome I
1775-1806
POÉSIES ÉROTIQUES
LIVRE QUATRIÈME
ÉLÉGIE VI
J'ai cherché dans l'absence | un remède à mes maux ; 6+6 a
J'ai fui les lieux charmans | qu'embellit l'infidèle. 6+6 b
Caché dans ces forêts | dont l'ombre est éternelle, 6+6 b
J'ai trouvé le silence, | et jamais le repos. 6+6 a
5 Par les sombres détour | d'une route inconnue 6+6 a
J'arrive sur ces monts | qui divisent la nue : 6+6 a
De quel étonnement | tous mes sens sont frappés ! 6+6 a
Quel calme ! quels objets ! | quelle immense étendue ! 6+6 b
La mer paraît sans borne | à mes regards trompés, 6+6 a
10 Et dans l'azur des cieux | est au loin confondue. 6+6 b
Le zéphyr en ce lieu | tempère les chaleurs ; 6+6 a
De l'aquilon parfois | on y sent les rigueurs ; 6+6 a
Et tandis que l'hiver | habile ses montagnes, 6+6 a
Plus bas l'été brûlant | dessèche les campagnes. 6+6 a
15 Le volcan dans sa course | a dévoré ses champs ; 6+6 a
La pierre calcinée | atteste son passage : 6+6 b
L'arbre y croit avec peine ; | et l'oiseau par ses chants 6+6 a
N'a jamais égayé | ce lieu triste et sauvage. 6+6 b
Tout se tait, tout est mort. | Mourez, honteux soupirs ; 6+6 a
20 Mourez, importuns souvenirs 8 a
Qui me retracez l'infidèle, 8 b
Mourez, tumultueux désirs, 8 a
Ou soyez volages comme elle. 8 b
Ces bois ne peuvent me cacher ; 8 a
25 Ici même, avec tous ses charmes, 8 b
L'ingrate encor me vient chercher ; 8 a
Et son nom fait couler des larmes 8 b
Que le temps aurait dû sécher. 8 a
O dieux ! ô rendez-moi | ma raison égarée ; 6+6 b
30 Arrachée de mon cœur | cette image adorée ; 6+6 b
Éteignez cet amour | qu'elle vient rallumer, 6+6 a
Et qui remplit encor | mon âme tout entière. 6+6 c
Ah ! l'on devrait cesser d'aimer 8 a
Au moment qu'on cesse dé plaire. 8 c
35 Tandis qu'avec mes pleurs | la plainte et les regrets 6+6 a
Coulent de mon âme attendrie, 8 b
J'avance, et de nouveaux objets 8 a
Interrompent ma rêverie. 8 b
Je vois naître à mes pieds | ces ruisseaux différens, 6+6 a
40 Qui, changés tout-à-coup | en rapides torrens, 6+6 a
Traversent à grand bruit | les ravines profondes, 6+6 a
Roulent avec leurs flots | le ravage et l'horreur, 6+6 b
Fondent sur le rivage, | et vont avec fureur 6+6 b
Dans l'océan troublé | précipiter leurs ondes. 6+6 a
45 Je vois des rocs noircis, | dont le front orgueilleux 6+6 a
S'élève et va frapper les cieux. 8 a
Le temps a gravé sur leurs cimes 8 a
L'empreinte de la vétusté. 8 b
Mon œil rapidement porté 8 b
50 De torrens en torrens, | d'abîmes en abîmes, 6+6 a
S'arrête épouvanté. 6 a
O nature ! qu'ici | je ressens ton empire ! 6+6 b
J'aime de ce désert | la sauvage âpreté ; 6+6 a
De tes travaux hardis | j'aime la majesté ; 6+6 a
55 Oui, ton horreur me plaît, | je frissonne, et j'admire. 6+6 b
Dans ce séjour tranquille, | aux regards des humains 6+6 a
Que ne puis-je cacher | le reste de ma vie ! 6+6 b
Que ne puis-je du moins | y laisser mes chagrins ! 6+6 a
Je venais oublier | l'ingrate qui m'oublie, 6+6 b
60 Et ma bouche indiscrète | a prononcé son nom ; 6+6 a
Je l'ai redit cent fois, | et l'écho solitaire 6+6 b
De ma voix douloureuse | a prolongé le son ; 6+6 a
Ma main l'a gravé sur la pierre ; 8 b
Au mien il est entrelacé. 8 a
65 Un jour le voyageur, | sous la mousse légère, 6+6 b
De ces noms connus à Cythère 8 b
Verra quelque reste effacé. 8 a
Soudain il s'écrira : | Son amour fut extrême ; 6+6 a
Il chanta sa maîtresse | au fond de ces déserts. 6+6 b
70 Pleurons sur ses malheurs, | et relisons les vers 6+6 b
Qu'il soupira dans ce lieu même. 8 a
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