Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
NOU_1/NOU31
Germain NOUVEAU
Poésies d'Humilis
et Vers Inédits
1872-1881
VERS INÉDITS
Rêve claustral
Je vous connais comme elle, | ô murs, travail des nonnes, 6+6 a
Préaux fleuris d’amours | furtifs, silencieux 6+6 b
Parloirs, où, par la nuit, | l’âme des lunes bonnes 6+6 a
Se distille, rosée | errante de leurs yeux ; 6+6 b
5 Cour grise où tourne le | soulier lacé des grandes, 6−6 a
Couvrant sous de longs cils | des yeux endoloris, 6+6 b
S’imaginant, le soir | des mystiques offrandes, 6+6 a
Causer dans les rideaux | avec de purs esprits. 6+6 b
Je vous ai vus, ô lents | tours noirs où les plus braves 6+6 a
10 Rentrent avec l’effroi | du parler patelin ; 6+6 b
Et je vous aime aussi, | novices, pour les graves 6+6 a
Désirs tapis aux plis | de vos jupes de lin. 6+6 b
Dortoirs religieux, | vous me bercez comme elle : 6+6 a
Là, le sommeil est le | seul des péchés permis, 6−6 b
15 Et l’on entend monter, | bouffonne et solennelle, 6+6 a
Leur jeune haleine aux dents | des anges endormis. 6+6 b
Je vous adore, froid | parfum des sacristies, 6+6 a
Chœur d’agate où le jour, | sous un rideau sanglant, 6+6 b
Voit éclore, parmi | la danse des hosties, 6+6 a
20 Le rêve violet | d’un doux évêque blanc ; 6+6 b
Chapelle de soupirs, | grilles, ombre jalouse 6+6 a
D’où la pensionnaire | aux essors fabuleux 6+6 b
Reluque, avec le cœur | d’une petite épouse. 6+6 a
Un séraphin charmant, | pâle au fond des cieux bleus ; 6+6 b
25 Prises de voile, où la | vierge, en des frissons vagues, 6−6 a
Sur l’autel, dont la marche | a sacré ses genoux, 6+6 b
Écoute sa toison, | qui va fleurir en bagues, 6+6 a
Choir sous les ciseaux saints, | terrifiants et doux. 6+6 b
Celle qu’avec le nard | pudique d’un roi mage 6+6 a
30 J’encense dans mon cœur | se meurt là ; j’ai pu voir 6+6 b
Ses yeux, lampes d’amour | où brûle mon image. 6+6 a
Et je m’en suis allé, | bien ivre… un certain soir !… 6+6 b
O toi qui vis dans ces | solitudes de femme, 6−6 a
Et qui n’as dû garder | de ton été premier 6+6 b
35 Qu’à peine assez de corps | pour contenir une âme, 6+6 a
Colombe en route pour | l’éternel colombier ; 6−6 b
Cieux choisis d’où l’on voit | pleuvoir encor des mannes 6+6 a
Et descendre sur les | fronts des langues de feu, 6−6 b
Ma bouche — en vous rêvant — | faite aux argots profanes, 6+6 a
40 Bégaie une oraison : | je me trompe avec Dieu. 6+6 b
Vergers mûrs où la sainte | a le respect des mouches, 6+6 a
Cours grises, encensoirs | berceurs, avents jeunés, 6+6 b
Vers vous — comme à vos pieds, | chères saintes nitouches 6+6 a
Je m’agenouille avec | la larme des damnés. 6+6 b
Pièce parue à la Revue du Monde Nouveau,
mètre profil métrique : 6−6
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