Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
NOR_1/NOR4
corpus Pamela Puntel
Jacques NORMAND
TABLETTES D’UN MOBILE
1870-1871
1871
EN SENTINELLE
IL est minuit : le tempsest calme et le ciel clair. 6+6 a
Je suis en factionsur le chemin de fer, 6+6 a
Seul, la main au fusil,l’œil perdu dans l’espace. 6+6 b
J'entends auprès de moi,comme un soupir qui passe, 6+6 b
5 Le vent qui fait vibrerles arbustes chétifs. 6+6 a
La lune, se montrantpar instants fugitifs, 6+6 a
Au travers des flots blancsque forment les nuages 6+6 b
Sur les champs dévastésverse ses clairs mirages. 6+6 b
A droite, noir géantsilencieux, le fort 6+6 a
10 Veille, et Paris, couchésous l’horizon, s‘endort. 6+6 a
Oh ! qu’il est doux alorsde laisser sa pensée 6+6 b
S'envoler au hasardde son aile lassée ! 6+6 b
Dans ces moments trop courts,qu’il est doux de revoir, 6+6 a
A la pâle clartéde la lampe du soir, 6+6 a
15 Près du foyer brillant la flamme pétille, 6+6 b
Cette moitié de vousqu’on nomme la famille ! 6+6 b
Que le nom de l’absentest souvent prononcé ! 6+6 a
Comme on parle de lui !Lorsque le vent glacé 6+6 a
Vient tristement pleurerle long de la fenêtre, 6+6 b
20 On se dit l’un à l’autre :« donc peut-il bien être ? 6+6 b
Dort-il ? Est-il debout ?A-t-il froid ? A-t-il faim ? » 6+6 a
Et chacun, pour cacheraux autres son chagrin, 6+6 a
Se tait, et, soupirant,se dit : « Vit-il encore ? » 6+6 b
Et puis c’est le vieux chiendont le regard implore, 6+6 b
25 Réclame une caresse,et qui rôde, et qui sent 6+6 a
La place qu’occupaitjadis le mtre absent, 6+6 a
, près de lui dormantdes heures tout entières, . 6+6 b
Il rêvait à loisirde ses chasses dernières 6+6 b
Et des nombreux combatsqu’en des temps plus heureux 6+6 a
30 Dans la plaine et les boisils livraient tous les deux. 6+6 a
Tel était le tableauqui me venait à l’âme. 6+6 b
J’oubliais tout : le sang,et le fer, et la flamme, 6+6 b
Et l’ennemi vainqueur,et la guerre, et l’effort 6+6 a
Du pays expirant,et le deuil, et la mort. 6+6 a
35 J’en étais revenu,porté par ma pensée, 6+6 b
Aux tranquilles momentsd'une époque passée, 6+6 b
Moments sans prix jadis,tant pleures aujourd’hui 6+6 a
Tout-à-coup sur ma droiteun vif éclair a lui. 6+6 a
Trois secondes après,retentissant, sauvage, 6+6 b
40 Le son arrive à moi ;puis, traçant son sillage 6+6 b
Avec un bruit semblableau râle prolongé 6+6 a
Du fer rouge dans l‘eausubitement plongé, 6+6 a
L’obus part, tombe, éclate,et puis rien. — Le silence 6+6 b
De nouveau sur les champsplane lugubre, immense ; 6+6 b
45 Rien n’a changé ; la luneau profil chagriné 6+6 a
Semble toujours glisserdans le ciel moutonné, 6+6 a
Argentant par momentsles murs des maisons blanches ; 6+6 b
Le vent en murmurantvient caresser les branches ; 6+6 b
Et peut être à l’instant,frappés dans leur sommeil, 6+6 a
50 Quelques hommes demainn’auront pas de réveil ! 6+6 a
Ce sont des-ennemis :soit ! mais ce sont des hommes. 6+6 b
Quand donc finirons-nous,pauvres fous que nous sommes, 6+6 b
De nous frapper sans cesse,et de chercher toujours 6+6 a
Quelque moyen nouveaupour abréger nos jours ? 6+6 a
55 La guerre ! Chose horrible,abominable, infâme, 6+6 b
Que la raison flétrit,l’humanité condamne ; 6+6 b
Suprême de l'absurdeet de la cruauté ; 6+6 a
Stupide expressiondu crime patenté ; 6+6 a
Chaos noir et sanglant, va, tête baissée, 6+6 b
60 Toute une nationcontre une autre lancée ; 6+6 b
Lourd marteau dont le chocaveugle et destructeur, 6+6 a
En brisant le vaincu,frappe aussi le vainqueur ! 6+6 a
C’est surtout par ces nuitstranquilles et sereines 6+6 b
Que le profond dégtdes passions humaines 6+6 b
65 Met la tristesse au cœuret les larmes aux yeux. 6+6 a
Les regards allanguisse tournent vers les cieux : 6+6 a
Il semble que là-hautplane le grand mystère ; 6+6 b
Qu’il y vit tout un mondeinconnu de la terre ; 6+6 b
Que, tandis qu'ici-basles hommes aveuglés 6+6 a
70 Se heurtent et se tuent,dans les cieux étoilés 6+6 a
Règnent un grand repos,une paix éternelle ; 6+6 b
Qu'un absolu silenceentoure de son aile, 6+6 b
Comme d'un crêpe noir,toute l’immensité. 6+6 a
Et pourtant qui nous ditqu’il n’est pas habité 6+6 a
75 Ce pays inconnuqui s'étend sur nos têtes ? 6+6 b
Qui nous dit qu’il n'est pas,dans toutes ces planètes, 6+6 b
Dans ces astres brillants,des hommes comme nous, 6+6 a
Aussi durs et cruels,aussi sots, aussi fous ? 6+6 a
O toi, dont le rayonnuageux me caresse, 6+6 b
80 Toi dont le long regardcontient une promesse, 6+6 b
Toi qui sembles là-hautme comprendre et me voir. 6+6 a
Étoile, clou d’argentqui tiens le voile noir 6+6 a
Que ne peut souleverl'essor de ma pensée, 6+6 b
Ah ! dis-moi si déjàles hommes t‘ont blessée, 6+6 b
85 S’ils ont foulé ton solde leurs pieds furieux ; 6+6 a
Dis-moi s'ils sont là-haut,chaste étoile des cieux : 6+6 a
Si la pure auréole ton orbite nage 6+6 b
Connt l’odeur du meurtreet le cri du carnage ; 6+6 b
Dis-moi si, quand mes yeuxs’élèvent jusqu'à toi, 6+6 a
90 C’est une terre encorqui brille devant moi. 6+6 a
Oh ! non, non, n’est-ce pas ?Si comme sur la terre 6+6 b
Avait passé sur toile souffle de la guerre. 6+6 b
Mon regard jusqu‘à toine serait pas monté 6+6 a
Et ton rayon si purserait ensanglanté ! 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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