Métrique en Ligne
NOR_1/NOR28
corpus Pamela Puntel
Jacques NORMAND
TABLETTES D’UN MOBILE
1870-1871
1871
NUITS DE MAI
O nuits du mois de mai, nuits tranquilles, sereines, 6+6 a
Où la brise en chantant vient caresser les fleurs, 6+6 b
Où la terre sourit, oubliant ses douleurs, 6+6 b
Et dans son sein, gonflé d’espérances prochaines. 6+6 a
5 Reçoit les frais baisers de la rosée en pleurs : 6+6 b
O douces nuits de mai, pleines de rêverie, 6+6 a
Qui sûtes inspirer un poète adoré, 6+6 b
Rafraîchir son beau front brûlé par l’insomnie, 6+6 a
Et verser dans son cœur, harassé de la vie, 6+6 a
10 Un peu de cet espoir qu’il avait renié ; 6+6 b
Nuits chères aux amants, aux oiseaux, au poète, 6+6 a
Vous qui rendez le calme à la vie inquiète, 6+6 a
Le chant aux rossignols et le feuillage aux bois, 6+6 b
Belles nuits de tendresse, où l'âme est toute prête 6+6 a
15 A s'ouvrir à l‘amour pour la première fois ; 6+6 b
Vous, si calmes toujours, que vous étiez cruelles 6+6 a
Quand on a vu briller dans votre obscurité 6+6 b
Le feu, l’horrible feu, par la brise excité, 6+6 b
De son brûlant manteau, pailleté d’étincelles, 6+6 a
20 Enveloppant Paris, Paris épouvanté ! 6+6 b
Sur vos voiles épais, profondeurs transparentes, 6+6 a
Comme un rouge serpent sur un océan noir, 6+6 b
L’incendie élevait ses flammes ondoyantes : 6+6 a
L’incendie… ô fureur ! ô rages impuissantes ! 6+6 a
25 O mesquine vengeance et lâche désespoir ! 6+6 b
N’aviez-vous pas assez, ô scélérats infâmes, 6+6 a
D’avoir tout usurpé, tout souillé, tout proscrit, 6+6 b
La liberté des corps , la liberté des âmes ? — 6+6 a
Non, le sang est trop peu : voici venir les flammes ! 6+6 a
30 Il faut anéantir après avoir détruit. 6+6 b
Allez, haro ! pillez, volez ! Jusqu‘à la gorge 6+6 a
Vautrez-vous dans le vol, la débauche et le vin ! 6+6 b
Tuez la République” : en disant qu‘on l’égorge ! 6+6 a
Partout où vous passez, marquez votre chemin 6+6 b
35 En appliquant aux murs votre sanglante main. 6+6 b
Devant les Allemands, — qui vous payent peut-être, — 6+6 a
Dociles instruments de l’étranger vainqueur, 6+6 b
Chiens qui pour mieux manger léchez la main d’un maître, 6+6 a
Brisez ce monument fait d’airain et d’honneur 6+6 b
40 Où vos pères jadis ont inscrit leur valeur. 6+6 b
Puis, pour couronnement à votre œuvre insensée, 6+6 a
Voyant en quelques jours votre règne finir, 6+6 b
N’ayant su triompher, et ne sachant mourir ; 6+6 b
Après avoir souillé notre gloire passée, 6+6 a
45 Voulant souiller encor notre gloire à venir, 6+6 b
Brûlez Paris : versez la poudre et le pétrole 6+6 a
Sur ces vieux monuments que le temps respecta ; 6+6 b
Bombardez au hasard la grande ville folle ; 6+6 a
Allez ! obéissez, sans dire une parole, 6+6 a
50 Sous l’œil triomphateur des vaincus d'Iéna. 6+6 b
Allez ! semez partout le meurtre et la souffrance ; 6+6 a
Que chacun, sans faiblir, risque son existence ; 6+6 a
On vous a bien payés, vous devez bien agir. 6+6 b
Mais vous, des assassins, n’ayez pas l’impudence 6+6 a
55 De vous croire héros pour avoir pu mourir ! 6+6 b
Lorsque viendra le jour où l’histoire future 6+6 a
Devra juger votre œuvre, elle ne dira pas, 6+6 b
O lâches pétroleurs, que vous fûtes soldats : 6+6 b
Elle vous jettera la honte à la figure 6+6 a
60 Et flétrira vos noms en les disant bien bas. 6+6 b
Honte éternelle à vous, communeux, race esclave 6+6 a
Des ignobles instincts que l’homme doit briser ; 6+6 b
Ce que vous avez fait, pour avoir pu Poser 6+6 b
Il fallait être infâme, et non pas être brave ; 6+6 a
65 Et, si l’on pense à vous, c’est pour vous mépriser ! 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
forme globale type : suite de strophes
logo du CRISCO logo de l'université