Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
NOA_1/NOA98
Anna de NOAILLES
Les Vivants et les Morts
1913
III
LES ÉLÉVATIONS
MON DIEU, JE SAIS QU'IL FAUT…
Mon Dieu, je sais qu'il faut accepter la détresse, 6+6 a
Qu'il faut, dans la douleur, descendre jusqu'en bas, 6+6 b
Mais, dans ce labyrinthe où votre main nous presse, 6+6 a
Puisque vous êtes bon, ne se pourrait-il pas 6+6 b
5 Que nous entrevoyions du moins la claire issue 6+6 c
Que déjà votre main prépare doucement, 6+6 d
Et qu'un peu de lumière, au lointain aperçue, 6+6 c
Nous aide à supporter ce ténébreux moment ? 6+6 d
Pourquoi nos maux sont-ils si compacts et si denses 6+6 a
10 Qu'on semble enseveli dans un obscur caveau ? 6+6 b
D'où vient cette funèbre et perfide abondance 6+6 a
Qui submerge le cœur et trouble le cerveau ? 6+6 b
Pourtant, les lendemains sont quelquefois si tendres, 6+6 a
On revoit les regards que l'on n'espérait plus. 6+6 b
15 Mais le bonheur fait mal quand il faut trop l'attendre, 6+6 a
Être sauvés enfin, ce n'est plus être élus. 6+6 b
Consolez-nous parfois dans cette forteresse 6+6 a
Dont vous tenez les clefs et fermez le vitrail ; 6+6 b
Laissez-nous pressentir les futures caresses 6+6 a
20 Et leur fraîche beau d'eau bleue et de corail ! 6+6 b
C'est trop d'être pri de la douce espérance, 6+6 a
D'être comme un forçat serré le long du mur, 6+6 b
Qui ne peut pas prévoir sa juste délivrance, 6+6 a
Car la fenêtre est haute et les verrous sont durs. 6+6 b
25 Pourquoi ce faste affreux de l'angoisse où nous sommes, 6+6 a
Pourquoi ce deuil royal et ces chagrins pompeux, 6+6 b
Puisqu'il vous plaît parfois d'avoir pitié des hommes 6+6 a
Et de remettre encor le bonheur auprès d'eux ? 6+6 b
Faut-il donc au Destin ces heures pantelantes, 6+6 a
30 L'émeut-on par un corps qui tremble et qui gémit ? 6+6 b
Nos pleurs sont-ils un peu de cette huile brûlante 6+6 a
Que Psyché répandit sur l'Amour endormi ? 6+6 b
S'il se peut, écartez ces moments de la vie 6+6 a
Où nous sommes broyés sous un joug trop étroit, 6+6 b
35 Et, pareils aux mineurs dans la noire asphyxie, 6+6 a
Nous tentons d'écarter le roc avec nos doigts. 6+6 b
— Déjà, loin du plaisir, du monde, des parades, 6+6 a
Mon cœur ardent n'est plus, dans son éclat voilé, 6+6 b
Qu'un feu de bohémiens sur la pauvre esplanade, 6+6 a
40 Où l'enfant nu console un cheval dételé. 6+6 b
— Mais s'il faut que ces jours de supplice reviennent, 6+6 a
S'il faut vivre sans eau, sans soleil et sans air, 6+6 b
Que du moins votre main s'empare de la mienne 6+6 a
Et m'aide à traverser l'effroyable désert… 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
logo du CRISCO logo de l'université