Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
NOA_1/NOA81
Anna de NOAILLES
Les Vivants et les Morts
1913
II
LES CLIMATS
LA NUIT FLOTTE…
La nuit flotte, amollie, austère, taciturne, 6+6 a
Impérieuse ; elle est funèbre comme une urne 6+6 a
Qui se clôt sur un vague et sensible trésor. 6+6 a
Un oiseau, intrigué, dans un arbre qui dort, 6+6 a
5 Paraît interroger l'ombre vertigineuse. 6+6 b
La lune au sec éclat semble une île pierreuse : 6+6 b
Cythère aride et froide où tout désir est mort. 6+6 a
Une vague rumeur émane du silence. 6+6 a
Un train passe au lointain, et son essoufflement 6+6 b
10 Semble la palpitante et paisible cadence 6+6 a
Du coteau qui respire et songe doucement… 6+6 b
Un parfum délicat, abondant, faible et dense, 6+6 a
Mouvant et sponta comme des bras ouverts, 6+6 b
Révèle la secrète et nocturne existence 6+6 a
15 Du monde végétal au souffle humide et vert. 6+6 b
Et je suis là. Je n'ai ni souhait, ni rancune ; 6+6 a
Mon cœur s'en est allé de moi, puisque ce soir 6+6 b
Je n'ai plus le pouvoir de mes grands désespoirs, 6+6 b
Et que, paisiblement, je regarde la lune. 6+6 a
20 Je suis la maison vide où tout est flottement. 6+6 a
Mon cœur est comme un mort qu'on a mis dans la tombe ; 6+6 b
J'ai longuement suivi ce bel enterrement, 6+6 a
Avec des cris, des deuils, du sang, des tremblements, 6+6 a
Et des égorgements d'agneaux et de colombes. 6+6 b
25 Mais le temps a séché l'eau des pleurs et le sel. 6+6 a
D'un œil indifférent, sans regret, sans appel, 6+6 a
Éclairé par la calme et triste intelligence, 6+6 a
Je regarde la voûte immense, où les mortels 6+6 b
Ont suspendu les vœux de leur vaine espérance. 6+6 a
30 Et je ne vois qu'abîme, épouvante, silence ; 6+6 a
Car, ô nuit ! vous gardez le deuil continuel 6+6 b
De ce que rien d'humain ne peut être éternel… 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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