Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
NOA_1/NOA59
Anna de NOAILLES
Les Vivants et les Morts
1913
II
LES CLIMATS
LES JOURNÉES ROMAINES
L'éther pris de vertigeet de fureur tournoie, 6+6 a
Un luisant diamantde tant d'azur s'extrait. 6+6 b
Virant, psalmodiant,le vent divise et ploie 6+6 a
 La pointe faible des cyprès. 8 b
5 C'est en vain que les eauxécumeuses et blanches, 6+6 a
Captives tout en pleursdes lourds bassins romains, 6+6 b
S'élèvent bruyamment,s'ébattent et s'épanchent : 6+6 a
 Neptune les tient dans sa main. 8 b
Je contemple la rageimpuissante des ondes ; 6+6 a
10 Dans cette vague éparseen la jaune cité, 6+6 b
C'est vous qu'on voit jaillir,conductrice des mondes, 6+6 a
 Amère et douce Aphrodité ! 8 b
L'odeur de la chaleur,languissante et créole, 6+6 a
Stagne entre les maisonsqui gonflent de soleil ; 6+6 b
15 Comme un coureur ailéle ciel bifurque et vole 6+6 a
 Au bord tranchant des toits vermeils ; 8 b
Et là-bas, sous l'azurqui toujours se dévide, 6+6 a
Un jet d'eau, turbulentet lassé tour à tour, 6+6 b
Semble un flambeau d'argent,une torche liquide 6+6 a
20  Qu'agite le poing de l'Amour. 8 b
Rome ploie, accabléde grappes odorantes, 6+6 a
La surhumaine vieenvahit l'air ancien, 6+6 b
Les chapiteaux brisésfont fleurir leurs acanthes 6+6 a
 Aux thermes de Dioclétien ! 8 b
25 Dans ce cltre pâmé,des bacchantes blêmies 6+6 a
Gisent ; silence, azur,léthargiques dédains ! 6+6 b
Le soleil tombe en feusur la gorge endormie 6+6 a
 De ces Danaés des jardins… 8 b
Ils dorment là, liéspar les roses païennes, 6+6 a
30 Ces corps de marbre blond,las et voluptueux : 6+6 b
O mes sœurs du ciel grec,chères Milésiennes, 6+6 a
 Que de siècles sont sur vos yeux ! 8 b
L'une d'elles voudraitse dégager ; sa hanche 6+6 a
Soulève le sommeilainsi qu'un flot trop lourd, 6+6 b
35 Mais tout le poids des tempset de l'azur la penche : 6+6 a
 Elle rêve là pour toujours. 8 b
De vifs coquelicots,comme un sang gai, s'élancent 6+6 a
Parmi les verts fenouils,à Saint-Paul-hors-les-Murs ; 6+6 b
Un dôme en or suspenddes colliers de Byzance 6+6 a
40  Au cou flamboyant de l'azur. 8 b
Ce matin, dans le ventqui vient puiser les cendres, 6+6 a
Pour les mêler au jourivre d'air et d'éclat, 6+6 b
Je respire ton cœurvoluptueux et tendre, 6+6 a
 Pauvre Cécile Métella ! 8 b
45 Tu n'es pas à l'écartdes saisons immortelles, 6+6 a
Un tourbillon d'azurte recueille sans fin ; 6+6 b
Je n'ai pas plus de partque tes mânes fidèle 6+6 a
 A l'univers vague et divin ! 8 b
Les blancs eucalyptuset le cyprès qui chante, 6+6 a
50 viennent aboutirles longs soupirs des morts, 6+6 b
Racontent, chers défunts,vos détresses penchantes, 6+6 a
 Votre sort pareil à nos sorts. 8 b
Quels familiers discourssur la voie Appienne ! 6+6 a
Tissés dans le soleil,les morts vont jusqu'aux cieux ; 6+6 b
55 Vous renaissez en moi,ombres aériennes, 6+6 a
 Vous entrez dans mes tristes yeux ! 8 b
Là-bas, sur la colline,un jeune cimetière 6+6 a
Étale sa langueurd'Anglais sentimental, 6+6 b
Les délicats tombeaux,dans les lis et le lierre, 6+6 a
60  Font monter un sang de cristal. 8 b
Midi luit : la villades chevaliers de Malte 6+6 a
Choit comme une danseuseaux pieds brûlants et las. 6+6 b
Comme un fauve tigrél'air jaunit et s'exalte ; 6+6 a
 Une nymphe en pierre vit là. 8 b
65 Elle a les bras cassés,mais sa force éternelle 6+6 a
Empourpre de plaisirses genoux triomphants ; 6+6 b
Le néflier embaume,un jet d'eau est, près d'elle, 6+6 a
 Secoué d'un rire d'enfant. 8 b
Les dieux n'ont pas quittéla campagne romaine, 6+6 a
70 Euterpe aux blonds pipeaux,Érato qui sourit, 6+6 b
Dansent dans le jardinMattei, se promène 6+6 a
 Le saint Philippe de Néri. 8 b
— Mais c'est vous qui, ce soir,partagez mon malaise, 6+6 a
Dans l'église sans voix,au mur pâle et glacé, 6+6 b
75 Déesse catholique,ô ma sainte Thérèse, 6+6 a
 Qui soupirez, les yeux baissés ! 8 b
Malgré vos airs royaux,et la fierté divine 6+6 a
Dont s'enveloppe encorvotre cœur emporté, 6+6 b
L'angoisse de vos traitspermet que l'on devine 6+6 a
80  Votre douce mendicité. 8 b
O visage altérépar l'ardente torture 6+6 a
D'attendre le bonheurqui descend lentement, 6+6 b
Appel mystérieux,hymne de la nature, 6+6 a
 Désir de l'immortel amant ! 8 b
85 Je vous offre aujourd'hui,parmi l'encens des prêtres, 6+6 a
Comme un grain plus brûlantmis dans vos encensoirs, 6+6 b
Le rire que j'entendsau bas de la fenêtre 6+6 a
  je rêve seule, le soir ; 8 b
C'est le rire joyeux,épouvanté, timide 6+6 a
90 De deux enfants heureux,éperdus, inquiets, 6+6 b
Qui joignent leurs regardset leurs lèvres avides, 6+6 a
 — Et dont tout le sanglot riait ! 8 b
Ils riaient, ils étaienteffrayés l'un de l'autre ; 6+6 a
Un jet d'eau s'effritaitdans le lointain bassin ; 6+6 b
95 La lune blanchissait,de sa clarté d'apôtre, 6+6 a
 La terrasse des Capucins. 8 b
Une palme portaitle poids mélancolique 6+6 a
De l'éther sans zéphyr,sans rosée et sans bruit ; 6+6 b
Rien ne venait briserson attente pudique, 6+6 a
100  Que ce rire aigu dans la nuit ! 8 b
Et je n'entendis plusque ce rire nocturne, 6+6 a
Plus fort que les senteursdes terrasses de miel, 6+6 b
Plus vif que le sursautdes sources dans leur urne, 6+6 a
 Plus clair que les astres au ciel. 8 b
105 — Je le prends dans mes mains,chaudes comme la lave, 6+6 a
Je le mêle aux élansde mon éternité, 6+6 b
Ce rire des humains,si farouche et si grave, 6+6 a
 Qui prélude à la volupté ! 8 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
logo du CRISCO logo de l'université