Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
NOA_1/NOA28
Anna de NOAILLES
Les Vivants et les Morts
1913
I
LES PASSIONS
BÉNISSEZ CETTE NUIT…
Bénissez cette nuitalanguie et biblique, 6+6 a
Prêtresse du coteau,palme mélancolique ! 6+6 a
Car voici le bergerdont mon rêve est hanté 6+6 a
— Cher pâtre, accepte enfinla douce volupté. 6+6 a
5 Quelle frayeur déjàte pâlit et t'oppresse ? 6+6 a
Mon amour, montre-toidoux envers la caresse. 6+6 a
Si tu veux, sois absent,étranger, endormi ; 6+6 a
Ferme tes calmes yeux,davantage, à demi ; 6+6 a
Ferme tes yeux, afinque cette neuve aurore, 6+6 a
10 Que les tendres baisersdans l'esprit font éclore, 6+6 a
Se lève lentementsous tes cils abaissés, 6+6 a
Sans que ton innocentorgueil en soit blessé ! 6+6 a
Qu'aimais-tu dans ta vieadolescente et frche ? 6+6 a
La course dans les prés,le mol parfum des pêches, 6+6 a
15 Le transparent sommeilà l'ombre du bouleau, 6+6 a
Le rire des flots bleusdans les vives calanques ? 6+6 b
Mais l'amour est un fruitplus vivant et plus beau, 6+6 a
Tout composé de pulpeet d'âme, rien ne manque 6+6 b
Quitte cet air craintif,ce regard dédaigneux, 6+6 a
20 C'est l'immortel plaisirqui rira dans tes yeux, 6+6 a
Ainsi que l'aloèsbrise sa sombre écorce, 6+6 a
Quand tu seras pareil,perdant ta faible force, 6+6 a
A ces jeunes guerriers,orgueilleux et mourants, 6+6 a
Qui gagnaient la batailleardente en succombant… 6+6 a
25 Hélas ! ta douce maindans mes mains se débat ; 6+6 a
Écoute, rien ne peuts'expliquer ici-bas. 6+6 a
Pourquoi ce ciel d'été,ces calmes rêveries 6+6 a
Du peuplier, deboutsur la frche prairie, 6+6 a
Qui semble étudier,mage silencieux, 6+6 a
30 Les nuages qui sontle mouvement des cieux ? 6+6 a
Pourquoi cet abondantmurmure des fontaines, 6+6 a
Ces sureaux engourdispar leur suave haleine, 6+6 a
Ces carillons légers,s'envolant des couvents, 6+6 a
Comme un pommier mystiqueeffeuillé par le vent ?… 6+6 a
35 Ah ! ces nobles langueursque jamais rien n'exprime, 6+6 a
Ces silences, comblésde promesses sublimes, 6+6 a
Le soir, cette fuméeaux toits bleus des hameaux, 6+6 a
Ces rêves des bergers,jouant du chalumeau 6+6 a
Tandis que les brebis,dans la vallée herbeuse, 6+6 a
40 Ont le robuste éclatd'une plante laineuse, 6+6 a
Ces bonheurs du matinjuvénile, le corps 6+6 a
Rejoint l'éternitéen dépassant la mort, 6+6 a
Ces besoins éperdusde pitié ou de rage, 6+6 a
Ces soleils, embrasantde muets paysages, 6+6 a
45 Tu les posséderascomme un raisin qu'on mord, 6+6 a
Dans le bonheur gisantqui ressemble à la mort ! 6+6 a
Ainsi sois bienveillant,doux envers la caresse ; 6+6 a
Console, et, si tu peux,abolis ma tendresse. 6+6 a
Je meurs d'une suaveet vaste vision : 6+6 a
50 J'aime en toi l'infiniavec précision ; 6+6 a
Pour cacher mon ardeuraux regards des étoiles, 6+6 a
Cher pâtre, étends sur moites deux mains comme un voile. 6+6 a
Vois, je serai, mes braspressés à tes côtés, 6+6 a
Comme un fleuve immortelenserrant la cité. 6+6 a
55 Mais ton front est sévèreet ta voix est confuse ; 6+6 a
Va-t'en, déjà le jourélance ses clartés. 6+6 b
J'entends dans les taillistourner le vol des buses ; 6+6 a
Les marchands, au lointain,jettent leurs cris flûtés. 6+6 b
Voici l'âne, porteurde fruits ; craignons la ruse 6+6 c
60 Du mtre qui le suit.Va-t'en de ce côté 6+6 b
Ah ! faut-il que mon cœuren vain s'élance et s'use, 6+6 c
Et que ce bonheur soiten toi, qui le refuses ! 6+6 c
Je t'aime et je voulaisen t'aimant m'appauvrir. 6+6 a
Ah ! comme le désirsouhaite de mourir !… 6+6 a
mètre profil métrique : 6+6
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