Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
NER_3/NER22
Gérard de NERVAL
ÉLÉGIES NATIONALES ET SATIRES POLITIQUES
1826
ÉLÉGIES NATIONALES
L’Ile d’Elbe
 Non loin des rivages de France, 8 a
 Il est une île au sein des mers : 8 b
 C’est là que veille l’espérance 8 a
 Et le fléau de l’univers ; 8 b
5 Et c’est là, qu’abusantdu droit de la victoire, 6+6 a
On jeta le hérospoudreux et renversé, 6+6 b
Pour l’y laisser vieillircomme un glaive émoussé, 6+6 b
Qui se ronge dans l’ombre,et se rouille sans gloire. 6+6 a
Pourtant à l’exiléla rigueur du destin 6+6 a
10 N’a point encor ravil’aspect de la patrie, 6+6 b
Et souvent à ses yeuxune rive chérie 6+6 b
Se dessine incertaineà l’horizon lointain. 6+6 a
Aussi, lorsque du soirdescend l’heure rêveuse, 6+6 a
Il promène ses pasprès des flots azurés, 6+6 b
15  Et sa pensée aventureuse 8 a
Voltige avec ardeurvers ces bords désirés. 6+6 b
Mais un jour que ses yeux,rayonnans d’espérance, 6+6 a
Avec plus de transportdirigés vers la France, 6+6 a
En cherchaient l’ombre vagueau bout de l’horizon : 6+6 a
20 D’un sifflement lugubreenvironnant sa tête, 6+6 b
Une voix lui criadu ton de la tempête : 6+6 b
 « Napoléon ! Napoléon ! » ! 8 a
Cette exclamation,pour tout autre effrayante, 6+6 a
A retenti trois fois :le héros étonné 6+6 b
25  L’entend ; et, de sa main brûlante, 8 a
Soulève en murmurantson front découronné. 6+6 b
Et la voix ironiquea repris la parole : 6+6 a
Napoléon le grand,qui t’arrête en ce lieu ? 6+6 b
 Qu’as-tu fait de cette auréole, 8 a
30 Qui brillait à ton frontcomme à celui d’un dieu ? 6+6 b
Pourquoi donc par le tempslaisser ronger tes armes ? 6+6 a
Pourquoi laisser coulerton âme dans les larmes, 6+6 a
Toi qui ne pus jamaiscomprendre le repos ?… 6+6 a
N’as-tu donc plus la mainqui lance le tonnerre ? 6+6 b
35 N’as-tu plus le sourcilqui fait trembler la terre ? 6+6 b
N’as-tu plus le regardqui produit les héros ? » ! 6+6 a
« Serait-ce que ton brasse lasse de la guerre, 6+6 a
Ou tes amusemenscessent-ils de te plaire ? 6+6 a
 Car dans tes loisirs autrefois, 8 a
40  Tu jouais avec des couronnes ; 8 b
 Et l’univers vit à ta voix 8 a
 Des rois qui tombaient de leurs trônes, 8 b
 Et des soldats qui passaientrois. 8 a
Depuis… » !
Napoléona changé de visage ; 6+6 b
45 « Qui que tu sois, dit-il,cesse un cruel langage, 6+6 b
Il faut, pour m’outrager,attendre mon trépas, 6+6 a
L’enfer est contre moi,mais ne prévaudra pas. » ! 6+6 a
LA VOIX.
Audacieux mortel,quelle est ton espérance ? 6+6 a
Ta main paralyséeabdiqua la puissance, 6+6 a
Songes-tu maintenant ?
NAPOLÉON
50 Pourquoi dissimuler ?… 6+6 a
Au bruit de mon réveil,l’univers peut trembler ! 6+6 a
LA VOIX.
L’univers,… il riraitde ta vaine menace. 6+6 a
NAPOLÉON
Le succès, je l’espère,absoudra mon audace ; 6+6 a
Et tel événement,en servant mes projets, 6+6 a
55 Peut me placer plus hautque je ne fus jamais. 6+6 a
LA VOIX.
Eh ! si toujours ton cœurà la couronne aspire, 6+6 a
Si c’est par lâchetéque tu quittas l’empire, 6+6 a
Honte à toi !…
NAPOLÉON
Non ; plutôthonte à mes ennemis ! 6+6 a
Car ils n’ont pas tenuce qu ils avaient promis : 6+6 a
60 Par l’abdicationde toute ma puissance, 6+6 a
Je croyais épargnerdes malheurs à la France ; 6+6 a
Mais j’eus tort seulementde compter sur leur foi, 6+6 a
Et le cri de mon peupleest venu jusqu’à moi : 6+6 a
Mon œil a vu d’icisa profonde misère, 6+6 a
65 Ses triomphes livrésà l’envie étrangère, 6+6 a
Ses monumens détruitset ses champs dévastés, 6+6 a
La discorde, la haineagitant ses cités, 6+6 a
La trahison….
LA VOIX.
Pour luique pourrait ta faiblesse ? 6+6 a
Jadis il imposaitla chne qui le blesse, 6+6 a
70 On lui rend maintenantles maux qu’on a soufferts… 6+6 a
Crains donc de le défendre,et laisse lui ses fers ! 6+6 a
NAPOLÉON, (il paraît absorbé, et réfléchit profondément)
Crainte, repos,… enferde toute âme brûlante 6+6 a
 Victime d’une injuste loi, 8 b
Le père des humainstourne sa vue ardente 6+6 a
75  Vers le séjour dont il fut roi ; 8 b
Il voudrait, pénétrantdans l’enceinte sacrée, 6+6 a
Ressaisir son pouvoiren dépit des destins : 6+6 b
 Mais un géant veille à l’entrée, 8 a
 Et la foudre luit dans ses mains. 8 b
80 La foudre, le géant,qui d’une âme timide 6+6 a
 Paralysent les faibles pas, 8 b
 Ne sont rien pour l’homme intrépide 8 a
 Dont l’esclavage est le trépas : 8 b
Le péril qui l’attend,s’il veut briser sa chne, 6+6 a
85 Ne fait, en l’indignant,qu’aiguillonner son cœur ; 6+6 b
Qu’importe que la mortdu vaincu soit la peine, 6+6 a
Si le sceptre et la gloireest le prix du vainqueur. 6+6 b
Bien plus,… de son courage,ou bien de sa vengeance, 6+6 a
Si déjà tout un peupleattend sa délivrance, 6+6 a
90 Un noble sentimentpar l’honneur inspiré 6+6 a
 L’appelle vers ceux qu’on opprime ;… 8 b
 Alors hésiter est un crime, 8 b
 Oser est un devoir sacré ! 8 a
Par l’oubli des traitéson a brisé ma chne, 6+6 a
95 On menace, en ces lieux,mes jours, ma liberté : 6+6 b
C’est du sang qu’il faudrale sort en est jeté. — 6+6 b
Ah ! mon âme en frémit…mais n’est point incertaine. 6+6 a
 L’imprudent qui m’a remplacé, 8 a
Aux Français opprimésa dit, pour qu’on le craigne. 6+6 b
100 « Peuples, prosternez-vous !je suis roi, car je règne ; 6+6 b
 » Votre empereur est renversé. » — ! 8 a
Oui, j’abdiquai l’empire,il en a l’avantage ; 6+6 a
Mais je n’ai point de mêmeabdiqué mon courage, 6+6 a
En siégeant à ma placeil a compté sans moi 6+6 a
105 Car, détrônant l’espoir son Orgueil se fonde, 6+6 b
 A mon tour je vais dire au monde : 8 b
 « Je suis vivant, donc je suis roi ! » ! 8 a
LA VOIX.
Alors ta royautésera bien éphémère, 6+6 a
Car la mort doit répondreà tes prétentions ; 6+6 b
110 Et tu verras tomberton aigle et son tonnerre 6+6 a
 Sous le glaive des nations. — 8 b
Mais, que dis-je ? La mortn’est rien à ton courage ! 6+6 a
Le feu d’un grand desseindévore tout effroi ; 6+6 b
A ta présomptionqu’importe un noir présage ? 6+6 a
115 Tout ton destin t’enchneet tu n’es plus à toi. 6+6 b
NAPOLÉON
Le destin m’appartient,et moi-même à la France ; 6+6 a
C’est pour son bonheur seulque j’emploierai toujours 6+6 b
 Mon glaive, mes vœux, ma vengeance, 8 a
 Et ce qui reste de mes jours. 8 b
120 Va, quoique ta menaceait annoncé l’orage, 6+6 a
Une barque m’attend,et tout est décidé 6+6 b
Mille peuples, en vain,veillent sur mon passage 6+6 a
Six cents Français et moi,— l’équilibre est gardé ! 6+6 b
Mais toi, pour qui, dis-tu,l’avenir se révèle ; 6+6 a
125 Toi, dont la prophétieest pour moi si cruelle, 6+6 a
Quel est ton nom ? Viens-tudes cieux, ou des enfers ? 6+6 b
LA VOIX.
Tu le sauras un jour ;vas le sort t’appelle : 6+6 a
 Je t’attends au-delà des mers ! 8 b
mètre profils métriques : 8, 6+6
logo du CRISCO logo de l'université