Métrique en Ligne
MIK_1/MIK7
Éphraïm MIKHAËL
Œuvres
1884-1890
POÉSIE
L’Automne
À Rodolphe Darzens.
Le parc bien clos s’emplit de paix et d’ombre lente : 6+6 a
Un vent grave a soufflé sur le naïf orgueil 6+6 b
Du lys et la candeur de la rose insolente ; 6+6 a
Mais les arbres sont beaux comme des rois en deuil. 6+6 b
5 Encore un soir ! Des voix éparses dans l’automne 6+6 a
Parlent de calme espoir et d’oubli ; l’on dirait 6+6 b
Qu’un verbe de pardon mystérieux résonne 6+6 a
Parmi les rameaux d’or de la riche forêt. 6+6 b
Au dehors, par delà mon vespéral domaine, 6+6 a
10 La terre a des parfums puissants et ténébreux ; 6+6 b
Dans les vignes, le vent vibrant de joie humaine 6+6 a
Disperse des clameurs de vendangeurs heureux : 6+6 b
C’est l’altière saison des grappes empourprées 6+6 a
Des splendeurs de jeunesse éclatent dans les champs. 6+6 b
15 Si j’allais me mêler aux foules enivrées 6+6 a
De clairs raisins et si j’allais chanter leurs chants ? 6+6 b
Je suis las à présent de mes rêves stériles 6+6 a
Que j’ai gardés comme un miraculeux trésor. 6−6 b
Je hais comme l’amour mes fiertés puériles 6+6 a
20 Et la rose de deuil comme la rose d’or. 6+6 b
L’Ennui, rhythme dolent de flûte surannée, 6+6 a
L’Orgueil, vulgaire chœur d’inutiles buccins, 6+6 b
Ne vont-ils pas mourir avec la vieille année 6+6 a
Dans le soir bourdonnant de rires et d’essaims ? 6+6 b
25 D’invisibles clairons dans l’Occident de cuivre 6+6 a
M’appellent vers la vigne et les impurs vergers ; 6+6 b
Je veux aussi ma part dans le péché de vivre ; 6+6 a
Seigneur, conduisez-moi parmi les étrangers ! 6+6 b
Pourtant tu sais, ô cœur épris de blond mystère, 6+6 a
30 Qu’au pays triomphal des treilles et des vins 6+6 b
Veille le dur regret de la forêt austère : 6+6 a
Tu pleurerais de honte en leurs sentiers divins. 6+6 b
N’écoute pas le cri lointain qui te réclame, 6+6 a
Les conseils exhalés dans la senteur des nuits. 6+6 b
35 Tu sais que nul baiser libérateur, mon âme, 6+6 a
Ne rompt l’enchantement de tes subtils ennuis. 6+6 b
Laisse les vendangeurs en leurs mauvaises vignes, 6+6 a
Tu ne t’enivres pas des vins de leur pressoir : 6+6 b
Contemple les lueurs candides des grands cygnes 6+6 a
40 Glissant royalement sur les lacs bleus de soir. 6+6 b
Et dans le jardin pur de floraisons charnelles 6+6 a
Regarde croître l’ombre avec sérénité, 6+6 b
Tandis qu’au ciel, des mains blanches et fraternelles 6+6 a
Font dans le crépuscule un geste de clarté. 6+6 b
mètre profil métrique : 6−6
forme globale type : suite périodique
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