Métrique en Ligne
MIC_1/MIC13
Louise MICHEL
ŒUVRES POSTHUMES
1900-1910
AVANT LA COMMUNE
LA POÉSIE
À vous la poésie comme l’onde aux fontaines.
Le livre d’Hermann.
Silence ! entendez-vous dans les gouffres profonds, 6+6 a
Avec leur voix d’airain, sonner les noirs clairons ? 6+6 a
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
La vision me prit dans la grande ombre morne ; 6+6 a
Et par delà les temps, les cieux que rien ne borne, 6+6 a
5 Nous allâmes tous deux. 6 b
On voyait comme en rêve errer d’étranges groupes ; 6+6 c
Formes vagues, portant des astres sur leurs croupes, 6+6 c
Des astres dans leurs yeux. 6 b
Dans l’éther, on sentait planer l’amour immense ; 6+6 a
10 Une effluve suprême, une âme, une puissance, 6+6 a
Emplissait l’infini. 6 b
C’était un souffle errant, semblable au vent des plaines, 6+6 c
Plein d’orages, d’éclairs, de brûlantes haleines, 6+6 c
Redoutable et béni. 6 b
15 Il grondait dans les flots, dans les forêts profondes, 6+6 a
Dans l’abîme des cœurs et les gouffres des ondes, 6+6 a
Appel mystérieux ; 6 b
Il était voix, parfum, amour, intelligence ; 6+6 c
Il attirait les cœurs, invincible puissance, 6+6 c
20 Et les portait aux cieux. 6 b
Oh ! comme il était beau, ce rayon des étoiles ! 6+6 a
Oh ! comme il était doux et léger dans les voiles, 6+6 a
Cet orage divin ! 6 b
Et les lueurs disaient une hymne parfumée, 6+6 c
25 Tandis qu’harmonieux, dans la nue enflammée 6+6 c
Montait le chant sans fin. 6 b
Partout le ciel avait des splendeurs inconnues, 6+6 a
Une aurore nouvelle éblouissait les nues, 6+6 a
Les cieux disaient : planez ! 6 b
30 Envolez-vous ! disaient les aigles aux colombes ; 6+6 c
Venez, disait l’azur ; venez, disaient les tombes, 6+6 c
Et tout disait : aimez ! 6 b
C’était sublime et beau d’une beauté suprême, 6+6 a
Comme si l’on eût vu l’éblouissement même 6+6 a
35 Passer au firmament. 6 b
Et partout on sentait une âme universelle, 6+6 c
Portant esprits, parfums, chants, azur sur son aile, 6+6 c
Être sylphe et géant. 6 b
Ce souffle créateur, c’était la poésie, 6+6 a
40 La poésie, esprit, amour, chant, ambroisie, 6+6 a
Âme, souffle de feu, 6 b
Qu’on sent, à travers l’ombre et les flots gris du sable, 6+6 c
Tantôt douce et charmante et tantôt formidable, 6+6 c
Apparaître en tout lieu ; 6 b
45 La poésie où vit la feuille, où l’oiseau chante, 6+6 a
Qui fuit dans le désert sur la cavale ardente 6+6 a
Vers l’horizon lointain ; 6 b
Mêlée à l’aube, aux soirs, aux tombes sous les herbes, 6+6 c
Aux forêts, à la nuit, aux ruines superbes, 6+6 c
50 Aux lyres, à l’airain. 6 b
C’est elle qui jadis se penchait rayonnante 6+6 a
Sur les mâts de Colomb. Son aile frémissante 6+6 a
Dirige le destin. 6 b
Du nid mystérieux soudain elle se lève 6+6 c
55 Et le siècle sort flamme, lumière ou glaive, 6−6 c
De son manteau divin. 6 b
Ô poésie ardente, ouragan dans les plaines, 6+6 a
Clairon du gouffre que les bouches surhumaines 6+6 a
Cherchent dans l’inconnu, 6 b
60 Je te salue, auguste et suprême puissance 6+6 c
Fanal mystérieux, qui brille, flamme immense, 6+6 c
Quand le temps est venu. 6 b
Je te salue, assise au-dessus des grands astres, 6+6 a
De l’éternité sainte étoilant les pilastres. 6+6 a
65 Esprit éblouissant, 6 b
C’est toi qui, sous le nom de liberté, dans l’ombre, 6+6 c
Guides l’humanité ; c’est toi qu’austère et sombre, 6+6 c
Vois le prophète ardent. 6 b
Et nous tous ici-bas, lévites ou grands prêtres 6+6 a
70 Qui regardons passer dans les branches des hêtres 6+6 a
Les noirs frémissements, 6 b
Soyons grands, soyons fiers, nous qui sommes poètes ; 6+6 c
C’est un sacre versé dans l’ombre sur nos têtes 6+6 c
Un sacre sur nos chants. 6 b
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
75 L’esprit se tut ; partout s'éteignait la lumière, 6+6 a
Et le vent froid des nuits passait sur la bruyère. 6+6 a
mètre profils métriques : 6, 6÷6
forme globale type : suite de strophes
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