Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
MAU_1/MAU17
Guy de MAUPASSANT
DES VERS
1868-1880
FIN D’AMOUR
Le gai soleil chauffaitles plaines réveillées. 6+6 a
Des caresses flottaientsous les calmes feuillées. 6+6 a
Offrant à tout désirson calice embaumé, 6+6 a
scintillait encorla goutte de rosée, 6+6 b
5 Chaque fleur, par de beauxinsectes courtisée, 6+6 b
Laissait boire le sucen sa gorge enfermé. 6+6 a
De larges papillonsse reposant sur elles 6+6 a
Les épuisaient avecun battement des ailes, 6+6 a
Et l’on se demandaitlequel était vivant, 6+6 a
10 Car la bête avait l’aird’une fleur animée. 6+6 b
Des appels de tendresseéclataient dans le vent. 6+6 a
Tout, sous la tiède aurore,avait sa bien-aimée ; 6+6 b
Et dans la brune rose se lèvent les jours 6+6 a
On entendait chanterdes couples d’alouettes, 6+6 b
15 Des étalons hennirleurs fringantes amours, 6+6 a
Tandis qu’offrant leurs cœursavec des pirouettes 6+6 b
Des petits lapins grissautaient au coin d’un bois. 6+6 a
Une joie amoureuse,épandue et puissante, 6+6 b
Semant par l’horizonsa fièvre grandissante, 6+6 b
20 Pour troubler tous les cœursprenait toutes les voix, 6+6 a
Et sous l’abri de laramure hospitalière 6−6 a
Des arbres, habitéspar des peuples menus, 6+6 b
Par ces êtres pareilsà des grains de poussière, 6+6 a
Des foules d’animauxde nos yeux inconnus, 6+6 b
25 Pour qui les fins bourgeonssont d’immenses royaumes, 6+6 a
Mêlaient au jour levantleurs tendresses d’atomes. 6+6 a
Deux jeunes gens suivaientun tranquille chemin 6+6 a
Noyé dans les moissonsqui couvraient la campagne, 6+6 b
Ils ne s’étreignaient pointdu bras ou de la main ; 6+6 a
30 L’homme ne levait pasles yeux sur sa compagne. 6+6 b
Elle dit, s’asseyantau revers d’un talus : 6+6 a
« Allez, j’avais bien vuque vous ne m’aimiez plus. » 6+6 a
Il fit un geste pourrépondre : « Est-ce ma faute ? » 6−6 a
Puis il s’assit près d’elle.Ils songeaient, côte à côte. 6+6 a
35 Elle reprit : « Un an !rien qu’un an ! et voilà 6+6 a
Comment tout cet amouréternel s’envola ! 6+6 a
Mon âme vibre encorde tes douces paroles ! 6+6 a
J’ai le cœur tout brûlantde tes caresses folles ! 6+6 a
Qui donc t’a pu changerdu jour au lendemain ? 6+6 a
40 Tu m’embrassais hier,mon Amour ; et ta main, 6+6 a
Aujourd’hui, semble fuirsitôt qu’elle me touche. 6+6 a
Pourquoi donc n’as-tu plusde baisers sur la bouche ? 6+6 a
Pourquoi ? réponds ! » Il dit :« Est-ce que je le sais ? » 6+6 a
Elle mit son regarddans le sien pour y lire : 6+6 b
45 « Tu ne te souviens pluscomme tu m’embrassais, 6+6 a
Et comme chaque étreinteétait un long délire ? » 6+6 b
Il se leva, roulantentre ses doigts distraits 6+6 a
La mince cigarette,et, d’une voix lassée : 6+6 b
« Non, c’est fini, dit-il,à quoi bon les regrets ? 6+6 a
50 On ne rappelle pasune chose passée, 6+6 b
Et nous n’y pouvons rien,mon amie ! »
A pas lents 6+6 a
Ils partirent, le frontpenché, les bras ballants. 6+6 a
Elle avait des sanglotsqui lui gonflaient la gorge, 6+6 a
Et des larmes venaientluire au bord de ses yeux. 6+6 b
55 Ils firent s’envolerau milieu d’un champ d’orge 6+6 a
Deux pigeons qui, s’aimant,fuirent d’un vol joyeux. 6+6 b
Autour d’eux, sous leurs pieds,dans l’azur sur leur tête, 6+6 a
L’Amour était partoutcomme une grande fête. 6+6 a
Longtemps le couple ailédans le ciel bleu tourna. 6+6 a
60 Un gars qui s’en allaitau travail entonna 6+6 a
Une chanson qui fitaccourir, rouge et tendre, 6+6 a
La servante de fermeembusquée à l’attendre. 6+6 a
Ils marchaient sans parler.Il semblait irrité 6+6 a
Et la guettait parfoisd’un regard de côté ; 6+6 a
65 Ils gagnèrent un bois.Sur l’herbe d’une sente, 6+6 a
A travers la verdureencor claire et récente, 6+6 a
Des flaques de soleiltombaient devant leurs pas ; 6+6 a
Ils avançaient dessuset ne les voyaient pas. 6+6 a
Mais elle s’affaissa,haletante et sans force, 6+6 a
70 Au pied d’un arbre dontelle étreignit l’écorce, 6+6 a
Ne pouvant retenirses sanglots et ses cris. 6+6 a
Il attendit d’abord,immobile et surpris, 6+6 a
Espérant que bientôtelle serait calmée, 6+6 a
Et sa lèvre lançaitdes filets de fumée 6+6 a
75 Qu’il regardait monter,se perdre dans l’air pur. 6+6 a
Puis il frappa du pied,et soudain, le front dur : 6+6 a
« Finissez, je ne veuxni larmes ni querelle. » 6+6 a
« Laissez-moi souffrir seule,allez-vous-en, » dit-elle. 6+6 a
Et relevant sur luises yeux noyés de pleurs : 6+6 a
80 « Oh ! comme j’avais l’âmeéperdue et ravie ! 6+6 b
Et maintenant elle estsi pleine de douleurs !… 6+6 a
Quand on aime, pourquoin’est-ce pas pour la vie ? 6+6 b
Pourquoi cesser d’aimer ?Moi, je t’aimeEt jamais 6+6 a
Tu ne m’aimeras plusainsi que tu m’aimais ! » 6+6 a
85 Il dit : « Je n’y peux rien.La vie est ainsi faite. 6+6 a
Chaque joie, ici-bas,est toujours incomplète. 6+6 a
Le bonheur n’a qu’un temps.Je ne t’ai point promis 6+6 a
Que cela dureraitjusqu’au bord de la tombe. 6+6 b
Un amour nt, vieillitcomme le reste, et tombe. 6+6 b
90 Et puis, si tu le veux,nous deviendrons amis 6+6 a
Et nous aurons, aprèscette dure secousse, 6+6 a
L’affection des vieuxamants, sereine et douce. » 6+6 a
Et pour la releveril la prit par le bras. 6+6 a
Mais elle sanglota :« Non, tu ne comprends pas. » 6+6 a
95 Et, se tordant les mainsdans une douleur folle, 6+6 a
Elle criait : « Mon Dieu !mon Dieu ! » Lui, sans parole, 6+6 a
La regardait. Il dit :« Tu ne veux pas finir, 6+6 a
Je m’en vais » et partitpour ne plus revenir. 6+6 a
Elle se sentit seuleet releva la tête. 6+6 a
100 Des légions d’oiseauxfaisaient une tempête 6+6 a
De cris joyeux. Parfoisun rossignol lointain 6+6 a
Jetait un trille aigudans l’air frais du matin, 6+6 a
Et son souple gosiersemblait rouler des perles. 6+6 a
Dans tout le gai feuillageéclataient des chansons : 6+6 b
105 Le hautbois des linotset le sifflet des merles, 6+6 a
Et le petit refrainalerte des pinsons. 6+6 b
Quelques hardis pierrots,sur l’herbe de la sente, 6+6 a
S’aimaient, le bec ouvertet l’aile frémissante. 6+6 a
Elle sentait partout,sous le bois reverdi, 6+6 a
110 Courir et palpiterun souffle ardent et tendre ; 6+6 b
Alors, levant les yeuxvers le ciel, elle dit : 6+6 a
« Amour ! l’homme est trop baspour jamais te comprendre ! » 6+6 b
mètre profil métrique : 6−6
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