Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
MAL_1/MAL22
Stéphane MALLARMÉ
POÉSIES
(édition DEMAN)
1887
TOAST FUNÈBRE
Ô de notre bonheur, | toi, le fatal emblème ! 6+6 a
Salut de la démence | et libation blême, 6+6 a
Ne crois pas qu'au magique | espoir du corridor 6+6 b
J'offre ma coupe vide | où souffre un monstre d'or ! 6+6 b
5 Ton apparition | ne va pas me suffire : 6+6 a
Car je t'ai mis, moi-même, | en un lieu de porphyre. 6+6 a
Le rite est pour les mains | d'éteindre le flambeau 6+6 b
Contre le fer épais | des portes du tombeau : 6+6 b
Et l'on ignore mal, | élu pour notre fête 6+6 a
10 Très-simple de chanter | l'absence du poëte, 6+6 a
Que ce beau monument | l'enferme tout entier : 6+6 b
Si ce n'est que la gloire | ardente du métier, 6+6 b
Jusqu'à l'heure commune | et vile de la cendre, 6+6 a
Par le carreau qu'allume | un soir fier d'y descendre, 6+6 a
15 Retourne vers les feux | du pur soleil mortel ! 6+6 b
Magnifique, total | et solitaire, tel 6+6 b
Tremble de s'exhaler | le faux orgueil des hommes. 6+6 a
Cette foule hagarde ! | Elle annonce : Nous sommes 6+6 a
La triste opacité | de nos spectres futurs. 6+6 b
20 Mais le blason des deuils | épars sur de vains murs 6+6 b
J'ai méprisé l'horreur | lucide d'une larme, 6+6 a
Quand, sourd même à mon vers | sacré qui ne l'alarme 6+6 a
Quelqu'un de ces passants, | fier, aveugle et muet, 6+6 b
Hôte de son linceul | vague, se transmuait 6+6 b
25 En le vierge héros | de l'attente posthume. 6+6 a
Vaste gouffre apporté | dans l'amas de la brume 6+6 a
Par l'irascible vent | des mots qu'il n'a pas dits, 6+6 b
Le Néant à cet Homme | aboli de jadis : 6+6 b
« Souvenirs d'horizons, | qu'est-ce, ô toi, que la Terre ? » 6+6 a
30 Hurle ce songe ; et, voix | dont la clarté s'altère, 6+6 a
L'espace a pour jouet | le cri : « Je ne sais pas ! » 6+6 b
Le Maître, par un œil | profond, a, sur ses pas, 6+6 b
Apaisé de l'éden | l'inquiète merveille 6+6 a
Dont le frisson final, | dans sa voix seule, éveille 6+6 a
35 Pour la Rose et le Lys | le mystère d'un nom. 6+6 b
Est-il de ce destin | rien qui demeure, non ? 6+6 b
O vous tous, oubliez | une croyance sombre. 6+6 a
Le splendide génie | éternel n'a pas d'ombre. 6+6 a
Moi, de votre désir | soucieux, je veux voir, 6+6 b
40 À qui s'évanouit, | hier, dans le devoir 6+6 b
Idéal que nous font | les jardins de cet astre, 6+6 a
Survivre pour l'honneur | du tranquille désastre 6+6 a
Une agitation | solennelle par l'air 6+6 b
De paroles, pourpre ivre | et grand calice clair, 6+6 b
45 Que, pluie et diamant, | le regard diaphane 6+6 a
Reste là sur ces fleurs | dont nulle ne se fane 6+6 a
Isole parmi l'heure | et le rayon du jour ! 6+6 b
C'est de nos vrais bosquets | déjà tout le séjour, 6+6 b
Où le poëte pur | a pour geste humble et large 6+6 a
50 De l'interdire au rêve, | ennemi de sa charge : 6+6 a
Afin que le matin | de son repos altier, 6+6 b
Quand la mort ancienne | et comme pour Gautier 6+6 b
De n'ouvrir pas les yeux | sacrés et de se taire, 6+6 a
Surgisse, de l'allée | ornement tributaire, 6+6 a
55 Le sépulcre solide | où gît tout ce qui nuit, 6+6 b
Et l'avare silence | et la massive nuit. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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