Métrique en Ligne
LSR_1/LSR79
Daniel LESUEUR
(Jeanne LOISEAU)
POÉSIES
1986
PAROLES D'AMOUR
LA NATURE ET L'AMOUR
Ainsi donc, ô vallons ! ô lacs purs ! ô retraites 6+6 a
Où rayonne l'amour sur la bruyère en fleur ! 6+6 b
Ils ne vous ont chantés, les orgueilleux poètes, 6+6 a
Qu'au sein de leur douleur. 6 b
5 Ils ne vous ont parlé, par leurs voix immortelles, 6+6 a
Que lorsque en vos abris ils sont revenus seuls, 6+6 b
Et qu'ils n'ont plus trouvé sous vos ombres si belles 6+6 a
Que d'horribles linceuls. 6 b
Leurs vers ont découlé de leur lèvre tremblante 6+6 a
10 Lorsqu'ils ont parcouru votre désert sacré, 6+6 b
Y suivant pas à pas la fuite grave et lente 6+6 a
D'un fantôme adoré. 6 b
Et ce n'était point vous alors que leur tristesse 6+6 a
Se plaisait à parer d'un charme déchirant : 6+6 b
15 C'était leur amour mort et c'était leur jeunesse 6+6 a
Qu'ils cherchaient en pleurant. 6 b
Ils vous ont accusés de rester impassibles 6+6 a
Lorsqu'ils marchaient pensifs en sanglotant tout bas, 6+6 b
Et que dans vos sentiers leurs rêves impossibles 6+6 a
20 S'envolaient sous leurs pas. 6 b
Bien peu leur importaient vos airs gais ou moroses 6+6 a
Quand leur bonheur semblait ne pas devoir finir, 6+6 b
Mais plus tard ils ont dit que l'éclat de vos roses 6+6 a
Blessait leur souvenir. 6 b
25 Ils se sont étonnés que vos grâces divines 6+6 a
Devant leur désespoir resplendissent toujours, 6+6 b
Et que vous n'eussiez point fait prendre à vos ravines 6+6 a
Le deuil de leurs amours. 6 b
Que n'ai-je, ô bois charmants, leur sublime génie, 6+6 a
30 Puisque je suis heureuse et que vous m'enchantez, 6+6 b
Puisque celui dont l'âme à mon âme est unie 6+6 a
S'avance à mes côtés ! 6 b
Puisque je vois briller parmi vos frêles herbes 6+6 a
En paillettes de feu les traits d'or du soleil, 6+6 b
35 Et que sur les sommets de vos arbres superbes 6+6 a
Reluit le jour vermeil ! 6 b
Puisque tout est chansons, que tout est rire et joie 6+6 a
Sous vos ombrages frais, dans les cieux, dans mon cœur ! 6+6 b
Oh ! pourquoi donc faut-il que l'écho ne renvoie 6+6 a
40 Que l'accent du malheur ? 6 b
Pourquoi n'avons-nous pas des mots pleins de délire 6+6 a
Qui fixent à jamais nos bonheurs fugitifs, 6+6 b
Alors qu'un léger mal arrache à notre lyre 6+6 a
Des accords si plaintifs ? 6 b
45 Pour élever vers vous une voix attendrie, 6+6 a
Beaux asiles profonds où mon cœur fut bercé, 6+6 b
Non, je n'attendrai point l'heure où la rêverie 6+6 a
S'en va vers le passé. 6 b
Non, je n'attendrai point de la trouver déserte 6+6 a
50 La place où mon ami se reposa souvent, 6+6 b
Et seule d'écouter dans la forêt inerte 6+6 a
Les longs soupirs du vent. 6 b
Voyez, nous sommes deux, nous savons vous comprendre, 6+6 a
Notre aveugle bonheur ne cache point vos cieux, 6+6 b
55 Votre sereine paix rend notre amour plus tendre 6+6 a
Et plus mystérieux. 6 b
Nous revenons à vous toujours, ô solitude ! 6+6 a
Votre calme imposant plaît à notre fierté ; 6+6 b
Les bois silencieux, dans leur noble attitude, 6+6 a
60 Ont tant de majesté ! 6 b
Notre âme, qui remonte aux sources de la vie, 6+6 a
D'un monde étroit et vain fuyant les trahisons, 6+6 b
S'agrandit tout à coup et s'élance ravie 6+6 a
Vers vos purs horizons. 6 b
65 Nos pas en vos chemins errent à l'aventure, 6+6 a
Vos aspects imprévus nous font longtemps rêver, 6+6 b
Et tout autour de nous la tranquille Nature 6+6 a
Semble nous approuver. 6 b
Qu'il monte donc vers vous, l'encens de nos hommages, 6+6 a
70 Dans nos félicités il doit vous être offert ; 6+6 b
Et puissions-nous encor vous bénir, ô bocages, 6+6 a
Quand nous aurons souffert ! 6 b
Aujourd'hui, l'œil perdu dans vos riants abîmes, 6+6 a
Nous sentons les liens qui nous tiennent unis, 6+6 b
75 Se serrant doucement au souffle de vos cimes, 6+6 a
Devenir infinis ; 6 b
Et, songeant que demain les heures envolées, 6+6 a
Blancs spectres, flotteront en ces muets séjours, 6+6 b
Émus, nous voyons naître en vos vertes allées 6+6 a
80 Les plus beaux de nos jours. 6 b
mètre profils métriques : 6, 6+6
forme globale type : suite périodique
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