Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LSR_1/LSR6
Daniel LESUEUR
(Jeanne LOISEAU)
POÉSIES
1986
VISIONS DIVINES
LA MORT DES DIEUX
Dans le ciel vaporeux, aux fascinants abîmes, 6+6 a
Au-dessus des brouillards d'argent, de cendre ou d'or, 6+6 b
Sur leurs trônes d'azur siégeaient les dieux sublimes, 6+6 a
Écoutant si vers eux nos chants montaient encor. 6+6 b
5 Ils étaient là, ces fils de notre immortel rêve, 6+6 a
Unis et fraternels dans leur commun séjour, 6+6 b
Car un même désir les enfanta sans trêve, 6+6 a
Car ils furent aimés du même ardent amour. 6+6 b
Ils étaient là, sans haine et sans amère envie : 6+6 a
10 Jupiter, Jéhovah, si prompts en leur courroux ; 6+6 b
Le grand Baal ; Istar, déesse de la vie, 6+6 a
Et le pâle Jésus sous ses longs cheveux roux ; 6+6 b
Bouddha, dont la pitié s'épanche en flots mystiques ; 6+6 a
Vishnou, qui de toute âme est l'éternel amant ; 6+6 b
15 Allah, qu'ont célébré de belliqueux cantiques, 6+6 a
Et le farouche Odin, roi du Nord inclément. 6+6 b
Et sur les fronts hautains de la céleste foule 6+6 a
Régnaient le calme auguste et la sécurité : 6+6 b
Les siècles devant eux passeraient, sombre houle, 6+6 a
20 Mais sans pouvoir jamais ternir leur majesté. 6+6 b
Car l'homme, qui les fit du meilleur de son âme, 6+6 a
Et qui par leur splendeur s'était laissé charmer, 6+6 b
Quand il douterait d'eux ne serait point infâme 6+6 a
Assez pour les maudire et pour les blasphémer ; 6+6 b
25 Mais, les enveloppant d'un respect doux et tendre, 6+6 a
Il bénirait toujours leurs fantômes puissants, 6+6 b
Qui l'ont fait espérer avant qu'il pût comprendre, 6+6 a
En lui donnant pour but les cieux éblouissants ; 6+6 b
Il n'oublierait jamais que, sur sa route amère, 6+6 a
30 Eux seuls ont soutenu, guidé ses premiers pas, 6+6 b
Et qu'ils l'ont doucement calmé par leur chimère, 6+6 a
Comme on calme un enfant en lui chantant tout bas. 6+6 b
Ainsi rêvaient les dieux au fond du ciel immense, 6+6 a
Quand soudain, les troublant dans leur bleu paradis, 6+6 b
35 Monta comme un long cri d'insulte et de démence : 6+6 a
L'homme se disait libre… et les avait maudits ! 6+6 b
Homme, pauvre insen que mène un vain mirage, 6+6 a
Maudis donc ton cerveau, ton cœur et ta raison ! 6+6 b
Les dieux ne sont-ils pas, réponds, ton propre ouvrage ? 6+6 a
40 Qui donc les a dressés, hors toi, sur l'horizon ? 6+6 b
Quand tu brandis contre eux un inutile glaive, 6+6 a
C'est ton illusion que menace ta main ; 6+6 b
Si tu crois saluer une aube qui se lève, 6+6 a
Vois, tes propres flambeaux blanchissent ton chemin. 6+6 b
45 Va donc, poursuis un songe après un autre songe : 6+6 a
Tu ne peux échapper à la loi de ton cœur. 6+6 b
Mais écoute… Dans l'ombre où ton blasphème plonge, 6+6 a
C'est de ta seule voix que rit l'écho moqueur. 6+6 b
C'est toi, c'est ton passé, dont ainsi tu te railles. 6+6 a
50 Soit, tous tes dieux sont morts sous ton bras forcené ; 6+6 b
Mais d'autres de ton sein vont naître, et tes entrailles 6+6 a
Demain feront jaillir ton rêve nouveau-né. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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