Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LSR_1/LSR3
Daniel LESUEUR
(Jeanne LOISEAU)
POÉSIES
1986
VISIONS DIVINES
LA CHARITÉ DE BOUDDHA
Un jour, les pieds meurtriset brûlés de poussière, 6+6 a
Las d'avoir trop marchésous un soleil de feu, 6+6 b
Gautama, le doux princeaux yeux pleins de lumière, 6+6 a
Vit d'humbles murs surgirdans l'air ardent et bleu. 6+6 b
5 Ce n'était plus le tempsde ses splendeurs mondaines, 6+6 a
Des repos nonchalantsdans ses jardins fleuris, 6+6 b
Tandis qu'au bruit charmeurdes sonores fontaines 6+6 a
Dansent rêveusementles lascives houris. 6+6 b
Il avait tout laissédes voluptés royales, 6+6 a
10 Car il ne pouvait plusles gter sans remord 6+6 b
Depuis qu'il avait vuces trois choses fatales, 6+6 a
Savoir : la pauvreté,la souffrance et la mort. 6+6 b
Recherchant le secretde la douleur humaine, 6+6 a
Durant des jours sans nombreil avait médité, 6+6 b
15 Et sur l'arbre mûritla science certaine 6+6 a
S'était formé pour luile fruit de charité. 6+6 b
Dans ses rêves profondssous le divin ombrage, 6+6 a
Lui, l'éternel Bouddha,venait d'apprendre enfin 6+6 b
Que l'homme, ignorant tout,a pour meilleur ouvrage 6+6 a
20 D'aimer, et de donnerlorsque son frère a faim. 6+6 b
Maintenant il allaitsous le ciel impassible, 6+6 a
Cherchant un malheureuxpour lui prendre la main, 6+6 b
Et murmurant les motsde tendresse indicible 6+6 a
Qui devaient éclairernotre aride chemin. 6+6 b
25 Et voici que vers lui,la cruche sur l'épaule, 6+6 a
Venait, à pas lassés,la femme d'un soudra. 6+6 b
Le grand Réformateuralors comprit son rôle, 6+6 a
Un céleste sourireà ses lèvres erra. 6+6 b
Il vit en un éclairl'infranchissable abîme 6+6 a
30 Que la caste mauditeentre les cœurs creusait 6+6 b
La femme que voilàne pouvait pas sans crime 6+6 a
Approcher l'Aryen,dont l'orgueil l'écrasait. 6+6 b
Et c'était une atroceet honteuse souillure 6+6 a
Que rien dans l'avenirne pouvait effacer, 6+6 b
35 Pour lui, que partagerle pain ou bien l'eau pure 6+6 a
Avec celle qui, lenteet triste, allait passer. 6+6 b
Et le prince du sang,dont la très noble race 6+6 a
Se peint sur son front blancet dans son fier regard, 6+6 b
S'avance… Mais la femme,en hâte, lui fait place, 6+6 a
40 Puis, l'entendant parler,s'arrête, l'œil hagard. 6+6 b
Et Gautama disait,d'une voix dont la terre 6+6 a
Toujours, de siècle en siècle,entend l'écho sacré : 6+6 b
« J'ai soif, ma route est longueet l'âpre vent m'altère. 6+6 a
Penche vers moi ta cruche,ô femme ! et j'y boirai. » 6+6 b
45 Mais elle, doucement,lui répliquait, confuse : 6+6 a
« Hélas ! je suis en toutta servante, seigneur ; 6+6 b
Mais mon père est soudra.Vois quelle erreur t'abuse. 6+6 a
A boire par ma maintu perdrais ton honneur. 6+6 b
‒ « Femme, dit Gautama,je te demande à boire, 6+6 a
50 C'est tout. Ne me dis pointque ton père est soudra. 6+6 b
Ces mots sont vanité,sœur, et tu peux me croire, 6+6 a
Car par ma voix demainle monde l'apprendra. » 6+6 b
Et la femme inclina,muette de surprise, 6+6 a
Sa cruche, et regardacet homme au noble sang 6+6 b
55 Dont la lèvre effleuraitla rude argile grise, 6+6 a
Et qui semblait joyeuxde l'acte avilissant. 6+6 b
Elle ne savait pas,la pauvre dédaignée, 6+6 a
Que celui qui buvait,humblement, de sa main, 6+6 b
Verrait à ses autelsla terre prosternée 6+6 a
60 Et plierait sous sa loile tiers du genre humain. 6+6 b
Et lorsque, se perdantsur la poudreuse route, 6+6 a
Le voyageur eut ditson fraternel adieu, 6+6 b
Elle, qui le suivitd'un long regard sans doute, 6+6 a
Dans le passant songeurn'entrevit pas le dieu. 6+6 b
mètre profil métrique : 6+6
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