Métrique en Ligne
P = préposition
C = clitique
M = voyelle masculine
F = "e" féminin
| = césure
LOY_2/LOY43
Charles LOYSON
ÉPÎTRES ET ÉLÉGIES
1819
ÉLÉGIES
ÉLÉGIE II
LA MALADIE DE LANGUEUR(1)
Muse, qui d'un regard | honoras mon berceau, 6+6 a
Que je veux invoquer | jusqu'au bord du tombeau, 6+6 a
Viens, ah ! viens, de tes sœurs | emprunte tous les charmes. 6+6 b
Vous ayez, je le sais, | essuyé bien des larmes ; 6+6 b
5 Vous avez soutenu | des grands dans leurs revers, 6+6 a
Des sages dans l'exil | et des rois dans les fers ! 6+6 a
Pour des maux plus cruels | aurez-vous un remède ? 6+6 b
Voyez ce malheureux | que votre amour possède ; 6+6 b
Jeune encore, et déjà | de langueur accablé, 6+6 a
10 Loin de vos bois chéris | ses maux l'ont exilé. 6+6 a
Souvent son sang s'allume, | et son œil étincelle ; 6+6 b
Il prend encor son luth ; | mais sa force infidèle 6+6 b
De son enthousiasme | a trahi les élans. 6+6 a
Ainsi le voyageur, | dans des déserts brûlans, 6+6 a
15 Couché près d'une source | où sa soif peut s'éteindre, 6+6 b
Dans d'impuissans efforts | meurt sans pouvoir l'atteindre. 6+6 b
Adieu, plaisirs divins ! | adieu, charmans accords ! 6+6 a
Qui de son ame ardente | enflammiez les transports ! 6+6 a
Adieu, chères erreurs ! | adieu, douce fumée, 6+6 b
20 Songes de l'avenir, | gloire, éclat, renommée, 6+6 b
Noble orgueil du talent | qui croit sentir son prix ! 6+6 a
Et vous, Ô ses travaux, | vainement entrepris ! 6+6 a
On arrache sa lyre | à sa main affaiblie, 6+6 b
Et pour sauver ses jours | on veut qu'il vous oublie. 6+6 b
25 Eh ! que lui font sans.vous | des jours infortunés, 6+6 a
Dans l'éternelle nuit | en silence entraînés ? 6+6 a
Lâches avis ! Non, non, | qu'il brille et se consume ! 6+6 b
C'est pour périr bientôt | que le flambeau s'allume ; 6+6 b
Mais il brûle un moment | sur les autels des dieux. 6+6 a
30 Voyez, quand le trépas | va lui fermer les yeux, 6+6 a
Ce fils de qui l'on veut | écarter une mère, 6+6 b
Contre son sein mourant | il la tient, il la serre, 6+6 b
Il lui sourit encore, | et tranquille en ses bras, 6+6 a
De la mort qui s'avance | il n'entend plus les pas : 6+6 a
35 Tel l'enfant d'Apollon, | près de la rive sombre, 6+6 b
Embrasse encor la gloire, | et s'attache à son ombre. 6+6 b
Fuyez, soucis cruels ; | fuyez, noires terreurs ; 6+6 a
Laissant à l'harmonie | endormir ses douleurs, 6+6 a
Il veut, les yeux fixés | sur les fleurs de la rive, 6+6 b
40 Livrer au fier torrent | sa barque fugitive, 6+6 b
Et dans l'abîme affreux | mollement descendu, 6+6 a
Y disparaître enfin | sans l'avoir aperçu. 6+6 a
Sous ses doigts défaillans, | à l'instant qu'il expire, 6+6 b
Un son mélodieux | anime encor sa lyre : 6+6 b
45 Et, bercé par la Muse | à son dernier moment, 6+6 a
Dans des rêves de gloire | il s'endort doucement. 6+6 a
Ainsi, près des autels, | de festons couronnée, 6+6 b
La tranquille victime | aux Muses destinée 6+6 b
Regardant sans effroi | les sacrificateurs, 6+6 a
50 Tombe au milieu des chants, | de l'encens et des fleurs. 6+6 a
Tel l'immortel oiseau | de l'heureuse Arabie, 6+6 b
Lorsque pour la reprendre | il va quitter la vie, 6+6 b
Se compose à lui-même | un bûcher parfumé, 6+6 a
Où des feux du soleil | sans douleur consumé, 6+6 a
55 Il renaît tout-à-coup | de ses cendres fumantes, 6+6 b
Et dans des tourbillons | de flammes odorantes, 6+6 b
Rajeuni par la mort, | brillant et glorieux, 6+6 a
Il fuit loin de la terre, | et se perd dans les cieux. 6+6 a
(1)  Cette pièce a déjà été imprimée, ainsi que la suivante et la cinquième ; l'auteur a cru devoir les faire reparaître ici dans leur place naturelle.
mètre profil métrique : 6+6
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