Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LOR_2/LOR113
Jean LORRAIN
LA FORÊT BLEUE
1883
LA FORÊT BLEUE
LA HALTE
LE FAUNE I
LE SOMMEIL
A THÉODORE DE BANVILLE
Un faune était, cynique et fauve, 8 a
Vivant effroi du bois obscur, 8 b
Prenant la forêt pour alcôve, 8 a
Et de l'ombre indignant l'azur. 8 b
5 Il n'était source, ni fontaine, 8 a
Où l'on ne vit son front cornu 8 b
Rôder, errer, toujours en peine, 8 a
D'un bras de femme ou d'un pied nu. 8 b
Ses yeux ardents de convoitise 8 a
10 La nuit, le jour, au fond des bois, 8 b
Sous le troëne et le cythise 8 a
Guettaient la dryade aux abois. 8 b
Sa conduite en Juillet infâme 8 a
Était le scandale d'Avril, 8 b
15 Traitant l'herbe des bois en femme, 8 a
Mettant jusqu'aux fleurs en péril. 8 b
Diane avait senti son souffle 8 a
Effleurer son épaule un soir ; 8 b
Bref ce faune était un marouffle 8 a
20 Malappris, grossier et fort noir. 8 b
Un matin que, vautré dans l'herbe, 8 a
Auprès de sa flûte à sept trous, 8 b
Le demi dieu ronflait superbe, 8 a
Des perles d'eau dans son poil roux, 8 b
25 Trois nymphes, filles du vieux Rhône 8 a
Passant au fond du bois païen, 8 b
Surprirent le sommeil du faune 8 a
Et reconnurent le vaurien. 8 b
Tremblante, le doigt sur la bouche, 8 a
30 Les yeux pleins de mauvais desseins, 8 b
Chacune s'arrêta, farouche ; 8 a
Un blanc courroux gonflait leurs seins. 8 b
Néère parle la première : 8 a
« Vengeons-nous, tressons des liens 8 b
35 « D'écorce de hêtre et de lierre, 8 a
« Puis, chargé de nœuds gordiens, 8 b
« Dans la source au courant rapide, 8 a
« Où le pied s'écorche au cailloux, 8 b
« Poussons-le, traînons-le livide, 8 a
40 « En le fouettant avec des houx… 8 b
« Qu'il trébuche et pleure, qu'il saigne 8 a
« Que la verge entame son flanc ! 8 b
« Je veux que l'onde où je me baigne, 8 a
« Soit rouge et trouble de son sang… 8 b
45 « Que la rougeur au front lui monte… 8 a
« De rage et d'angoisse étouffant, 8 b
« Qu'il en pleure et rugisse…ô honte ! 8 a
« Fustigé par des mains d'enfant , 8 b
« Par des nymphes… sur une route, 8 a
50 « Comme un ilote ivre et voleur, 8 b
« Sous les yeux du bois qui l'écoute, 8 a
« Et rit dans l'ombre à sa douleur ! 8 b
— « Votre conseil est bon, Néère, 8 a
« Mais le dieu serait le plus fort 8 b
55 « Et malheur à la téméraire, 8 a
« Qu'il saisirait dans son transport. 8 b
« Un songe ailé nous favorise. 8 a
« Pourquoi provoquer son réveil ? 8 b
« Mettons à profit la surprise, 8 a
60 « Où nous l'a livré le sommeil 8 b
« Le faune est là, fauve et superbe, 8 a
« Les reins velus, les bras nerveux ! 8 b
« Qu'il s'éveille affreux, glabre, imberbe, 8 a
« Rasons sa barbe et ses cheveux ! 8 b
65 « Qu'il en fasse peur à Silène, 8 a
« Qu'il soit pelé, ras et tondu, 8 b
« Hideux à faire perdre haleine 8 a
« Le soir au képhir éperdu… 8 b
« Que partout, où fuira sa course, 8 a
70 « L'insulte l'accueille en chemin, 8 b
« La nuit, au miroir de la source, 8 a
« Le jour, au creux vert du ravin. 8 b
« Que, poursuivi par les murmures 8 a
« Des Satyres et du dieu Pan, 8 b
75 « Sur son front ras et noir de mûres 8 a
« Coulent des larmes d'ægipan ? » 8 b
Et les deux nymphes sous les saules, 8 a
Les yeux de vengeance éclatants, 8 b
Des perles d'eau sur leurs épaules, 8 a
80 Souriaient et montraient les dents, 8 b
Alors, ouvrant dans le feuillage 8 a
Ses grands yeux de biche aux abois, 8 b
Daphné, la nymphe au doux visage, 8 a
Dit aux deux autres à mi-voix : 8 b
85 « Mes sœurs, pourquoi chercher la lutte, 8 a
« Si le Faune allait s'éveiller, 8 b
« Croyez-moi, prenons lui sa flûte 8 a
« Vous l'entendrez d'ici crier ! » 8 b
mètre profil métrique : 8
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