Métrique en Ligne
a voyelle stable
er voyelle ambigüe
e "e" masculin
e "e" féminin
e "e" élidé
e "e" ignoré
e "e" écarté
12 longueur métrique
6-6 mètre
LOR_2/LOR100
Jean LORRAIN
LA FORÊT BLEUE
1883
LA FORÊT BLEUE
LA HALTE
Le second jongleur dit :
BROCÉLIANDE
A VICTOR HUGO
I
Les genêts étaient d'or et dans Brocéliande 6+6 a
L'iris bleu, ce joyau des sources, la lavande 6+6 a
Et la menthe embaumaient : c'était aux mois bénis, 6+6 a
Où le hallier s'éveille à l'enfance des nids, 6+6 a
5 Et les pommiers neigeaient dans les bois frais et calmes. 6+6 a
Au pied d'un chêne énorme, entre les larges palmes 6+6 a
Des fougères d'Avril et les touffes de lys, 6+6 a
Viviane et Myrdhinn étaient dans l'ombre assis. 6+6 a
Svelte, un hennin brodé ceignant l'orfèvrerie 6+6 a
10 De ses longs cheveux roux et, la robe fleurie 6+6 a
Sur un fond vert de mer d'arabesques d'argent, 6+6 a
Elle avait l'air, charmante et la gorge émergeant 6+6 a
De la tunique ouverte et glissant des épaules, 6+6 a
D'une abeille posée au feuillage des saules ; 6+6 a
15 Et ses bras nus étaient chargés d'anneaux d'orfroi. 6+6 a
Auprès d'elle, envahi d'un lent et vague effroi 6+6 a
Et, ses vieux doigts posés sur les cheveux d'or fauve 6+6 a
De la dame, Myrdhinn inclinait son front chauve 6+6 a
Sur sa barbe argentée et se taisait.
Au loin 6+6 a
20 Dans la verte clairière, impassible témoin 6+6 a
De leurs amours, paissaient deux blanches haquenées. 6+6 a
Ils avaient fait la route à petites journées 6+6 a
Et d'Ys en Cornouaille, où la mer est d'azur, 6+6 a
Par la lande aux fleurs d'or et par le clair obscur 6+6 a
25 Des grands bois odorants, où le jour pleut et tremble 6+6 a
En traits bleus, depuis l'aube ils chevauchaient ensemble 6+6 a
Et l'instant de la halte était enfin venu. 6+6 a
e experte et savante au regard ingénu, 6+6 a
La dame, entre ses doigts faisant couler ses tresses, 6+6 a
30 Les ouvrit et, roulant en soyeuses caresses 6+6 a
Leur or lisse et fluide oint d'essence et de nard 6+6 a
Sur la barbe neigeuse et le cou du vieillard, 6+6 a
« M'aimez-vous,ô Myrdhinn, m'aimez-vous, puissant maître » 6+6 a
Implora-t-elle, et lui, les yeux clos, sans paraître 6+6 a
35 L'écouter, lui tendit une fleur de glaïeul. 6+6 a
Et les flots de sa barbe étaient comme un linceul 6+6 a
D'écume, où la parole était morte et raidie. 6+6 a
« Le hâle et l'air des bois m'ont-ils donc enlaidie 6+6 a
« A ce point, qu'aujourd'hui, dédaigneux de me voir, 6+6 a
40 « Vous refusiez, Myrdhinn, à mes yeux le miroir 6+6 a
« De vos yeux, ces chers yeux emplis de mon image 6+6 a
« Jadis » et souriant tristement, le vieux mage 6+6 a
Lui tendit de nouveau le frais glaïeul en fleur. 6+6 a
Or, comme elle hésitait, l'œil obscurci d'un pleur, 6+6 a
45 Le vieux sire effeuillant la fleur fraîche cueillie. 6+6 a
« Ce glaïeul, humble fleur de rosée embellie, 6+6 a
« Offre son thyrse humide aux passants ; son amour 6+6 a
« Pénètre, embaume, enivre et pourtant, nuit et jour, 6+6 a
« Le glaïeul est muet et fleurit en silence. » 6+6 a
50 — « Votre fleur de glaïeul, maître, est une insolence : 6+6 a
« C'est une fleur de rustre, étant fille des bois. 6+6 a
« L'Amour , l'Amour des dieux, des dames et des rois, 6+6 a
« Éros était brodé sur la tapisserie 6+6 a
« De la chambre d'Arthus, où, dans l'ombre fleurie 6+6 a
55 « De lys d'or, il ouvrait ses bras nus ravisseurs 6+6 a
« Entre Apollo Phœbus et les neuf Muses sœurs ; 6+6 a
« Mais il n'était qu'aveugle, aveugle et non morose : 6+6 a
« Car de sa lèvre, ouverte au tracé d'un fil rose, 6+6 a
« Des devises de gloire et des tendres serments 6+6 a
60 « Signés de noms fameux, tragiques et charmants, 6+6 a
« Se déroulaient au ciel en fines banderolles. 6+6 a
« L'amour sur votre lèvre est morne et sans paroles, 6+6 a
« Doux sire, et cependant, vous qui pensez ainsi, 6+6 a
« Myrdhinn, vous êtes sage et je vous dois merci ; 6+6 a
65 « Mais j'aimais mieux l'Éros de la mythologie, 6+6 a
« Il riait » et, sortant de sa robe élargie 6+6 a
Sa gorge droite et nue entre ses cheveux roux, 6+6 a
Elle entra plus avant entre les deux genoux 6+6 a
Du vieillard et, posant sa nuque délicate 6+6 a
70 Sur sa robe de myre en samit écarlate : 6+6 a
« Un mage, comme vous, doit aimer les odeurs ! » 6+6 a
Dit-elle et, de ses doigts caressants et rôdeurs 6+6 a
Elle fit en flots blancs couler dans sa poitrine 6+6 a
La barbe du vieux sire, enivrant sa narine 6+6 a
75 De l'odeur de ses seins à sa robe appuyés, 6+6 a
Et, tandis qu'ébloui, les yeux extasiés, 6+6 a
Frôlé par ces doigts frais et ces tresses errantes, 6+6 a
Il humait cette gorge et ces mains odorantes, 6+6 a
La dame, elle, attentive au trouble de ses yeux, 6+6 a
80 Entonna lentement ce lai mystérieux : 6+6 a
Des parfums de mes lourdes tresses 8 a
Mêlés au goût de mes baisers, 8 b
J'ai fait de savantes caresses 8 a
Pour les désirs inapaisés. 8 b
85 Au suc des chardons bleus des dunes 8 a
J'ai mêlé sous mes yeux ardents 8 b
Les froids rayons des vieilles lunes, 8 a
Pris au froid émail de mes dents. 8 b
Et j'en ai fait un fier breuvage, 8 a
90 Un vin d'espérance et de vœux, 8 b
Un philtre amoureux et sauvage 8 a
De la couleur de mes cheveux. 8 b
M on cœur est l'orgueilleuse amphore, 8 a
Où l'âpre vin luit nuit et jour, 8 b
95 Luit, attendant la rouge aurore, 8 a
Où tu boiras, féru d'amour. 8 b
Rampante à tes pieds, en extase, 8 a
Suppliante au cœur douloureux 8 b
J'exalte vers toi le beau vase, 8 a
100 Écumant du philtre amoureux 8 b
La coupe au niveau de ta lèvre 8 a
Rayonne, et mes débiles mains, 8 b
Dans le désir et dans la fièvre, 8 a
Implorent les bleus lendemains ; 8 b
105 Et tandis que, blême, j'écoute 8 a
Et fléchis au poids de l'affront, 8 b
Le vin déborde goutte à goutte 8 a
Et tu détournes, toi, le front. 8 b
Tu me dédaignes, mais prends garde, 8 a
110 Car la salamandre aux yeux verts 8 b
Est ma complice et te regarde, 8 a
Vieux mage implacable et pervers. 8 b
La salamandre est ma complice 8 a
Et je sais, vieillard soupçonneux 8 b
115 La combe, où fleurit la mélisse, 8 a
La plante chère aux cœurs haineux. 8 b
Dans l'herbe folle et dans l'ivraie, 8 a
Je sais quels sinistres avis 8 b
Le crapaud coasse à l'orfraie, 8 a
120 Qu'une reine Juive a suivis. 8 b
Des parfums de mes lourdes tresses, 8 a
Mêlés au goût de mes baisers, 8 b
J'ai fait de savantes caresses 8 a
Pour les désirs inapaisés. 8 b
125 Et la dame, en un spasme entr'ouvrant ses dents froides, 6+6 a
Lui mordit les genoux à travers les plis roides 6+6 a
Du samit écarlate, et le myre indulgent 6+6 a
« L'âge a fait mes sourcils et ma barbe d'argent, 6+6 a
« Je suis trop vieux pour vous, belle dame amoureuse, 6+6 a
130 « Trop las pour votre ardeur attirante et fiévreuse, 6+6 a
« Trop usé pour le rêve et l'impossible essor, 6+6 a
« Que médite votre âme ; et, parmi vos crins d'or, 6+6 a
« En vain, voluptueuse et morbide couleuvre, 6+6 a
« Pour me plaire avez-vous, enfant, mis tout en œuvre ; 6+6 a
135 « Le sang de mes vingt ans, que l'âge a refroidi, 6+6 a
« Trahit le vieux Myrdhinn et,dans l'ombre engourdi, 6+6 a
« Songeur lourd de regrets, de tristesse et d'années, 6+6 a
« Je suis le morne époux des vieilles fleurs fanées, 6+6 a
« Un diseur de légende, autrefois gai chanteur 6+6 a
140 « Des gloires de mon siècle ; et le ruisseau menteur 6+6 a
« Qui bavarde, emportant les fleurs à la dérive, 6+6 a
« Dit plus de gais refrains aux roseaux de la rive, 6+6 a
« Que Myrdhinn, aujourd'hui las des temps révolus, 6+6 a
« N'en a jamais chantés aux douze preux d'Arthus. 6+6 a
145 « La vieillesse a figé le sang bleu de mes veines 6+6 a
« Et votre jeune espoir poursuit des ombres vaines. 6+6 a
« Que faites-vous assise encore à mes genoux ! 6+6 a
« Un chevalier robuste à l'œil clair, au poil roux, 6+6 a
« Voilà l'heureux ami qui calmerait votre âme , 6+6 a
150 « Et vous perdez ici votre temps, belle dame. » 6+6 a
Et la dame sourit et lui répondit. « Non , 6+6 a
« Car serve de Myrdhinn est encore un beau nom, 6+6 a
« Et mon rêve d'amour est un rêve de gloire. 6+6 a
« Mais, dit-elle en riant, conte-moi quelque histoire, 6+6 a
155 « Toi qui sais la légende et les mythes païens, 6+6 a
« Fais-moi quelque récit d'ombre et d'amour anciens 6+6 a
« EtJe me consolerai du triste sort du nôtre. 6+6 a
— « Et l'on dira plus tard : « Myrdhinn était l'apôtre 6+6 a
« Et dame Viviane était son clerc d'amour, » 6+6 a
160 Interrompit Myrdhinn, en riant à son tour, 6+6 a
« Soit, je vous dirai donc que dans Brocéliande 6+6 a
« Une dame galloise, amoureuse et friande, 6+6 a
« Étant un soir assise à l'endroit que voilà… » 6+6 a
Viviane, elle, dit : « Non, non, pas celle-là, 6+6 a
165 « Doux sire, mais plutôt cette étrange légende 6+6 a
« D'Orient, où l'on voit un roi de Samarcande 6+6 a
« Dans une ville bleue aux toits en parasol, 6+6 a
« Et des mages persans interroger le vol 6+6 a
« Des aigles, au chevet d'une reine captive… 6+6 a
170 « Je me souviens, le roi voulait l'enterrer vive 6+6 a
« Pour l'avoir à lui seul cachée à tous les yeux… 6+6 a
« Il s'agissait d'un charme ailé, mystérieux 6+6 a
« Et c'était effrayant, ce vieux roi sur ce trône 6+6 a
« Entrevu, lourd de pourpre et d'anneaux d'ambre jaune 6+6 a
175 « Et ce charme endormeur aux savants rythmes d'or 6+6 a
« Ce divin conte ailé, je veux l'entendre encor, 6+6 a
« Myrdhinn ! » et, dans sa robe aux tons d'aiguë marine, 6+6 a
Elle appuyait sur lui ses bras et sa poitrine, 6+6 a
L'enivrant de son corps à son corps enlacé, 6+6 a
180 Et le vieillard pensait : « Esprit froid et rusé, 6+6 a
« Embûche de galloise et d'âme ambitieuse, 6+6 a
« Par le roi Salomon, la dame est périlleuse ! » 6+6 a
Mais il eut bientôt fait de dompter son effroi 6+6 a
Et, prenant dans ses mains les bras cerclés d'orfroi 6+6 a
185 De la dame et, comptant des poignets aux aisselles 6+6 a
Les anneaux, « Le vieux conte est âpre aux demoiselles, 6+6 a
« Mais, quand ma dame prie, elle ordonne, et le vent 6+6 a
« De son léger caprice est un chêne mouvant, 6+6 a
« Où ses désirs émis sont fleurs épanouïes. 6+6 a
190 « Je vais donc vous conter des choses inouïes ; 6+6 a
« Mais j'ai là dans une outre un breuvage divin 6+6 a
« Dont je voudrais avant, dans mon casque d'or fin, 6+6 a
« Boire large rasade… après, si ma voix tremble, 6+6 a
« Que Myrdhinn soit hué , nous en boirons ensemble, 6+6 a
195 « (C'est un vin merveilleux) vous, pour mieux écouter, 6+6 a
« Moi pour chauffer ma verve et pour bien raconter. » 6+6 a
Il dit et, renversant son vieux buste en arrière, 6+6 a
Myrdhinn, ayant sifflé trois fois dans la clairière, 6+6 a
L'un des deux palefrois accourut au grand trot. 6+6 a
200 Ayant flatté la bête au front, comme au garot, 6+6 a
Myrdhinn prit en riant à l'arçon de la selle 6+6 a
Une outre de cuir fauve et, parmi la vaisselle, 6+6 a
Dont deux plats de vermeil étaient tout le trésor, 6+6 a
Un vieux casque héraldique, émaillé sur fond d'or. 6+6 a
205 « La belle Viviane, au lieu d'un vidrecome, 6+6 a
« De Myrdhinn voudra-t-elle accepter l'humble heaume 6+6 a
Et la dame ayant dit : « Pour un honneur pareil 6+6 a
« Cléopâtre eut donné l'ongle de son orteil ! » 6+6 a
Myrdhinn versa le vin de l'outre dans le casque. 6+6 a
210 Le casque était orné d'un mufle de tarasque 6+6 a
Et l'œil de la tarasque est funeste au félon. 6+6 a
Aussi, quand Viviane, avec un geste long, 6+6 a
Eut remis le breuvage et le heaume au vieux sire, 6+6 a
Lui ne put réprimer dans sa barbe un sourire 6+6 a
215 Et, cachant son triomphe et son front dans ses doigts. 6+6 a
Il se rassit dans l'ombre et d'une lente voix : 6+6 a
« Il était autrefois un roi de Samarcande… » 6+6 a
II
Les lys étaient d'argent et dans Brocéliande, 6+6 a
Où la lune au ciel clair et pâle errait sans bruit, 6+6 a
220 Myrdhinn, spectre écarlate entrevu dans la nuit, 6+6 a
Contemplait à ses pieds Viviane endormie. 6+6 a
« Douce et perfide dame, adorable ennemie, 6+6 a
« Ces lys en sont témoins, je voulais t'épargner, 6+6 a
« Mais ton sauvage orgueil n'a pu se résigner 6+6 a
225 « Et j'ai dû t'endormir, ô dame périlleuse ! 6+6 a
« Le breuvage a fermé ta bouche astucieuse 6+6 a
« Et le charme endormeur aux souples rythmes d'or, 6+6 a
« Le charme, que ta bouche en rêve implore encor, 6+6 a
« Va t'enclore à jamais, invisible et vivante, 6+6 a
230 « Dans le cercle mouvant de sa danse savante. 6+6 a
« O doigts blancs et légers, qui frôliez mes genoux, 6+6 a
« Lents baisers, bras errants et frais, longs cheveux roux 6+6 a
« Qui méditiez ma perte, un léger sortilège 6+6 a
« De Myrdhinn vous déjoue, et les cheveux de neige 6+6 a
235 « Et la barbe argentée ont pris les cheveux d'or. 6+6 a
« Ni corbeau croassant ni fanfare de cor, 6+6 a
« Quand j'aurai prononcé les trois phrases magiques, 6+6 a
« Ne pourront éveiller tes beaux yeux léthargiques 6+6 a
« Et tu vas dans la ronce et les lys à jamais 6+6 a
240 « T'engloutir invisible, et pourtant je t'aimais ! » 6+6 a
Il dit, et, dans ses mains ayant pris les mains froides 6+6 a
De la dame et baisé longuement ses yeux roides, 6+6 a
Il lui croisa les bras sur sa robe aux longs plis 6+6 a
Et, puis ayant posé dans les touffes de lys 6+6 a
245 Cette adorable tête, ardente et douloureuse, 6+6 a
« Adieu, murmura-t-il, adieu ; pâle amoureuse ! » 6+6 a
Et le mage, en cadence élevant les deux bras, 6+6 a
Se mit au clair de lune à tracer pas à pas 6+6 a
Un grand cercle et, sa bouche égrenait des paroles 6+6 a
Magiques.
250 Et les lys, entr'ouvrant leurs corolles, 6+6 a
Embaumaient ; les iris, emplis d'une lueur, 6+6 a
Resplendissaient dans l'ombre, et, le front en sueur, 6+6 a
Myrdhinn dansait toujours la danse ensorcelée. 6+6 a
Myrdhinn dansait, l'œil fixe et la barbe emmêlée, 6+6 a
255 Et des lieux éloignés, du fond des antres frais 6+6 a
Des rires et des voix, vains échos des forêts 6+6 a
Nocturnes, bruissaient, musique bourdonnante ; 6+6 a
Et la sueur coulait sur la peau frissonnante 6+6 a
Du vieux myre,. et c'étaient au fond des bois perdus 6+6 a
260 Des appels et des pas, vaguement entendus 6+6 a
Puis rien, rien que le bruit des deux pieds sur la mousse 6+6 a
Retombant en mesure, et de l'herbe qui pousse 6+6 a
Rapide, épaisse et noire, humide et froid linceul 6+6 a
De la dame endormie au pied du chêne aïeul. 6+6 a
265 La lune entre des pins était alors cachée. 6+6 a
Myrdhinn alors fit trêve et, la tête penchée, 6+6 a
Ayant neuf fois tourné sur lui-même, écouta, 6+6 a
Et dans la forêt brune un fou rire éclata, 6+6 a
Un rire jeune et frais, suivi d'un grand silence. 6+6 a
270 Effilant les lys bleus en pâles fers de lance, 6+6 a
La lune à ce moment surgit entre les pins 6+6 a
Et la clairière obscure et le creux des ravins 6+6 a
Apparurent, peuplés de blanches silhouettes 6+6 a
Et Myrdhinn murmura « C'est quelque cri de chouettes » 6+6 a
275 Et, comme un clair défi, le rire étrange et frais 6+6 a
Éclata de nouveau, mais cette fois, plus près, 6+6 a
« C'est quelqu'esprit des bois qui dans l'ombre erre et rôde, » 6+6 a
Dit le mage, et cherchant à son doigt l'émeraude 6+6 a
Qui le rend invisible et chasse les esprits, 6+6 a
280 Myrdhinn, vieux loup royal au piège enfin surpris, 6+6 a
Sentit fondre son âme et tomber sa superbe. 6+6 a
D'entre ses mains glissée et de ses mains dans l'herbe, 6+6 a
L'émeraude à son doigt n'était plus.
Jeune et fou 6+6 a
Le rire à son oreille éclata. « Le hibou 6+6 a
285 « N'a pas ce rire ailé, dit une voix connue, 6+6 a
Et férocement rousse et férocement nue, 6+6 a
Les seins droits et pourprés, rouge tentation, 6+6 a
Le heaume de Myrdhinn sur l'or en fusion 6+6 a
De ses fauves cheveux bondissant sur ses hanches, 6+6 a
290 Viviane apparut, farouche, entre les branches. 6+6 a
L'émeraude à son doigt scintillait dans l'or roux. 6+6 a
Myrdhinn lui, sanglotait, tombé sur ses genoux : 6+6 a
« Puisque Myrdhinn a fait la folle rêverie 6+6 a
« D'endormir à jamais ma tunique fleurie 6+6 a
295 « Et d'enchanter ma robe et mon hennin doré, 6+6 a
« J'ai dû ceindre le heaume aux guerriers consacré, 6+6 a
« Le heaume, où, te fiant aux vertus des tarasques, 6+6 a
« Tu verses aux félons des breuvages fantasques. 6+6 a
« Se venger d'une dame en tenant endormis 6+6 a
300 « Sa robe et son hennin, Arthus a-t-il permis, 6+6 a
« Myrdhinn, cette traîtrise aux preux de son cortège ? 6+6 a
« Hennin de Viviane, on vous a pris au piège. 6+6 a
« O doigts blancs et légers qui frôliez ses genoux, 6+6 a
« Lents baisers, bras errants et frais, longs cheveux roux 6+6 a
305 « Qui méditiez sa perte, un léger sortilège 6+6 a
« De Myrdhinn vous déjoue et, les cheveux de neige 6+6 a
« Et la barbe argentée ont pris les cheveux d'or. 6+6 a
« Ni corbeau croassant ni fanfare de cor, 6+6 a
« Quand j'aurai prononcé les trois phrases magiques, 6+6 a
310 « Ne pourront éveiller tes beaux yeux léthargiques, 6+6 a
« Et tu vas dans la ronce et les lys à jamais 6+6 a
« T'engloutir invisible, et pourtant je t'aimais ! » 6+6 a
Et, riant à Myrdhinn, qui pleurait en silence, 6+6 a
La dame au clair de lune exécuta la danse. 6+6 a
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