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C = clitique
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F = "e" féminin
| = césure
LFT_4/LFT471
Jean de LA FONTAINE
ŒUVRES DIVERSES II
1656-1696
LETTRES À DIVERS
IX
A M. FOUQUET
RELATION DE L'ENTRÉE DE LA REINE DANS PARIS,
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
De toutes parts on y vit 7 a
Une nombreuse affluence, 7 b
Et je crois qu'elle se fit 7 a
Aux yeux de toute la France. 7 b
5 Ce jour-là le soleil | fut assez matineux ; 6+6 a
Mais, pour mieux laisser voir | ce pompeux équipage, 6+6 b
Il tempéra | son éclat lumineux, 4+6 a
En quoi je tiens qu'il fut sage : 7 b
Car, quand il eût eu des habits 8 a
10 Tout parsemés de rubis, 7 a
Et couverts des trésors | du Pactole et du Tage, 6+6 a
Qu'il eût paru plus beau | qu'il n'est au plus beau jour, 6+6 b
Le moins brillant | des seigneurs de sa cour 4+6 b
Eût brillé cent fois davantage. 8 a
15 La cour ne se mit pas | seule sur le bon bout, 6+6 a
Et le luxe passa | jusqu'à la bourgeoisie. 6+6 b
Chacun fit de son mieux : | ce n'étoit qu'or partout : 6+6 a
Vous n'avez vu de votre vie 8 b
Une si belle infanterie ; 8 a
20 On eût dit qu'ils sortoient | tous de chez le baigneur : 6+6 b
Imaginez-vous, monseigneur, 8 b
Dix mille hommes en broderie. 8 a
Ce fut un bel objet | que messieurs du conseil : 6+6 a
Aussi leurs majestés | s'en tiennent honorées ; 6+6 b
25 On n'en peut trop louer | le pompeux appareil ; 6+6 a
Leur troupe étoit des mieux parées. 8 b
Tout le monde admira | leurs superbes atours, 6+6 c
Leurs cordons d'or, | leurs housses de velours 4+6 c
Et leurs différentes livrées. 8 b
30 Leur chef, vêtu de brocart d'or 8 a
Depuis les pieds jusqu'à la tête, 8 b
Ce jour-là parut un Médor, 8 a
Et fut un des beaux de la fête. 8 b
Je ne puis assez dignement 8 a
35 Louer le riche accoutrement 8 a
Qui le para cette journée ; 8 a
Ni le coffret des sceaux, | que portoit fièrement 6+6 b
La chancelière haquenée, 8 a
Nommée ainsi très-justement. 8 b
40 De vouloir peindre aussi | les trois cours souveraines, 6+6 a
Et leur auguste majesté, 8 b
Ma muse n'y perdroit | que son temps et ses peines ; 6+6 a
C'est un sujet trop vaste | et trop peu limité. 6+6 b
Messieurs de ville | eurent en vérité 4+6 a
45 Bonne part de l'honneur | en cette illustre fête. 6+6 b
Je trouvai surtout bien monté 8 a
Celui qui marchoit à la tête 8 b
Il n'est pas jusqu'à Rocollet 8 a
Qui ne fût sur sa bonne mine : 8 b
50 Son cheval qui n'étoit pas laid, 8 a
Et sembloit de taille assez fine, 8 b
Lui secouoit un peu l'échine, 8 b
Et pensa mettre en désarroi 8 a
Ce brave serviteur du roi. 8 a
55 Si je m'étois trouvé plus près 8 a
Des harangueurs et des harangues, 8 b
Vous auriez en vers quelques traits 8 a
De ce qu'ont dit ces doctes langues : 8 b
Sans mentir, j'ai beaucoup perdu 8 a
60 De n'en avoir rien entendu : 8 a
Car, en fait de magnificence, 8 a
Les compliments sur les habits 8 b
L'ont emporté, comme je pense ; 8 a
Mais tout cela n'est rien au prix 8 b
65 Des mulets de Son Éminence. 8 a
Leur attirail | doit avoir coûté cher. 4+6 a
Ils se suivoient en file | ainsi que patenôtres : 6+6 b
On en voyoit d'abord | vingt et quatre marcher, 6+6 a
Puis autres vingt et quatre, | et puis vingt et quatre autres. 6+6 b
70 Les housses des premiers | étoient d'un fort grand prix ; 6+6 a
Les seconds les passoient, | passés par les troisièmes ; 6+6 b
Mais ceux-ci n'ont, à mon avis, 8 a
Rien laissé pour les quatrièmes. 8 b
Monsieur le cardinal | l'entend, en bonne foi ; 6+6 a
75 Car après ces mulets | marchoient quinze attelages, 6+6 b
Puis sa maison, et puis ses pages, 8 b
Se panadant en bel arroi, 8 a
Montés sur chevaux aussi sages 8 b
Que pas un d'eux, comme je croi. 8 a
80 Figurez-vous que dans la France 8 a
Il n'en est point de plus haut prix ; 8 b
Que l'un bondit, que l'autre danse, 8 a
Et que cela n'est rien au prix 8 b
Des mulets de Son Éminence. 8 a
85 Bientôt après | les seigneurs de la cour, 4+6 a
Propres, dorés, | et beaux comme des anges, 4+6 b
Ou comme le dieu d'amour, 7 a
Attirèrent nos louanges : 7 b
J'entends le dieu d'Amour, | quand il tient du dieu Mars, 6+6 a
90 Et qu'il marche tout fier | du pouvoir de ses dards ; 6+6 a
Car ces seigneurs, | qui sont près d'une belle 4+6 a
Aussi doux que des moutons, 7 b
Sont pires que vrais lions 7 b
Quant ils ont une querelle, 7 a
95 Ou que le bruit des canons 7 b
Leur échauffe la cervelle. 7 a
En habits sous l'or tout cachés, 8 a
En chevaux bien enharnachés, 8 a
Ils avoient fait grosse dépense 8 a
100 Et quand à moi je fus surpris 8 b
De voir une telle abondance, 8 a
Et n'estimai plus rien au prix 8 b
Les mulets de Son Éminence. 8 a
Incontinent on vit passer 8 a
105 Des légions de mousquetaires. 8 b
C'est un bel endroit à tracer ; 8 a
Mais, sans que je m'attire | un tel nombre d'affaires, 6+6 b
Leur maître n'a que trop | de quoi m'embarrasser. 6+6 a
Vous le voyez quelquefois : 7 a
110 Croyez-vous que le monde | ait eu beaucoup de rois, 6+6 a
Ou de taille aussi belle, | ou de mine aussi bonne ? 6+6 b
Ce n'est pas mon avis ; | et lorsque je le vois, 6+6 a
Je crois voir la grandeur | elle-même en personne. 6+6 b
Comme jadis | le monarque des cieux 4+6 a
115 Dans le ciel fit son entrée, 7 b
Après avoir puni | l'orgueil audacieux 6+6 a
Des suppôts de Briarée ; 6 b
Ou bien comme Apollon, | des traits de son carquois 6+6 a
Ayant du fier Python | percé l'énorme masse, 6+6 b
120 Triompha sur le Parnasse ; 7 b
Ou comme Mars entra | pour la première fois 6+6 a
Dans la capitale de Thrace ; 8 a
Ainsi je crois encor | voir le prince qui passe ; 6+6 a
Et vous pouvez | choisir de ces trois-là 4+6 a
125 Celui qu'il vous plaira. 6 a
Mais comment de ces vers | sortir à mon honneur ? 6+6 a
Ceci de plus en plus | m'embarrasse et m'empêche ; 6+6 b
Et de fièvre en chaud mal | me voici, monseigneur, 6+6 a
Enfin tombé sur la calèche. 8 b
130 On dit qu'elle étoit d'or, | et sembloit d'or massif, 6+6 a
Et qu'il s'en fait peu de pareilles ; 8 b
Mais je ne la pus voir, | tant j'étois attentif 6+6 a
A regarder d'autres merveilles. 8 b
Ces merveilles étoient | de fort beaux cheveux blonds, 6+6 a
135 Une vive blancheur, | les plus beaux yeux du monde, 6+6 b
Et d'autres appas sans seconds 8 a
D'une personne sans seconde. 8 b
Qu'on ne me demande pas 7 a
Qui c'étoit que la personne 7 b
140 En qui logeoient tant d'appas : 7 a
La question seroit bonne ! 7 b
Tant d'agrément, tant de beauté, 8 a
Tant de douceur, | et tant de majesté, 4+6 a
Tant de graces si naturelles, 8 a
145 Où l'on trouveroit de quoi 7 b
Faire un million de belles, 7 a
Ne peuvent en bonne foi 7 b
Se trouver qu'en la merveille 7 a
Sans égale, et sans pareille, 7 a
150 Qui donne aux autres la loi, 7 a
Et qui dort avec le roi. 7 a
mètre profils métriques : 7, 8, 6, 6+6, 4+6
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